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1 septembre 2011 4 01 /09 /septembre /2011 09:07

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Lu pour vous


 

bouton_007.gifL'Union africaine va aider les victimes de la sécheresse

 

Les gouvernements africains étaient appelés hier, lors d'une conférence de l'Union africaine, à contribuer à l'aide internationale en faveur des 12 millions de personnes frappées par la sécheresse dans la Corne de l'Afrique.

Le déblocage d'une « enveloppe globale » de 245 millions d'euros a été annoncé.

 

C'est une première. La première fois que l'Union africaine (UA) organise une conférence pour lever des fonds destinés à lutter contre une crise humanitaire sur le continent. La première fois que ses dirigeants se retrouvent pour prendre en main un destin régional. Et le résultat a été à la hauteur de l'attente. La banque africaine de développement a promis une aide de 209 millions d'euros étalée sur plusieurs années tandis que les pays africains et d'autres donateurs réunissaient pour leur part 36 millions d'euros.

[…]

L'Afrique, pourtant concernée au premier chef, n'a pas semblé d'abord prendre la mesure de l'urgence. Une première réunion de l'Union africaine, prévue le 9 août, a été repoussée au 25. À Addis-Abeba hier matin, les rangs étaient clairsemés. Les quelques dirigeants présents, les intéressés, le président somalien, Cheikh Sharif Ahmed, le premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, et le président djiboutien Ismaël Omar Guelleh devaient fulminer contre le manque de solidarité de leurs homologues.

Les voilà probablement rassurés. Ces promesses de dons, si elles sont réalisées viendront combler un peu plus l'immensité des besoins : sur 1,7 milliard d'euros nécessaires, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), 760 millions devaient encore être financés. Le président de la commission de l'UA, Jean Ping, avait lancé le 17 août un appel à la solidarité : « Il faut montrer au reste du monde que nous savons être mobilisés », avait-il insisté, avant d'ajouter : « Même un État membre que l'on pourrait qualifier de pauvre devrait apporter sa contribution, en argent ou en nature, même symbolique. »

MARION QUILLARD

(La Croix 26 août 2011)

 

Concrètement ?


 

bouton_007.gifL'Afrique se mobilise pour la Somalie

 

A Addis- Abeba, hier, 21 des 54 pays africains se sont engagés à verser 245 millions d'euros pour lutter contre la famine.

« C'est la première fois que l'Afrique montre sa solidarité pour une cause africaine », s'est réjoui le président guinéen Teodoro Obiang Nguema, à la tête de l'Union africaine. L'équivalent de 245 millions d'euros ont été collectés.

La Banque de développement fournit, à elle seule, 207 millions. Les donateurs les plus généreux sont l'Algérie (6,9 millions), l'Égypte (3,4 millions), la République démocratique du Congo et le Gabon. « C'est un point de départ, nous sommes très heureux du résultat », a commenté Jean Ping, président de la Commission de l'Union africaine.

Des organisations humanitaires, telle Oxfam, sont plus réservées. En effet, seule une poignée de chefs d'État a participé à cette conférence. Autres motifs de déception : 33 pays n'ont encore rien donné et le secteur privé, pourtant sollicité, était quasi-absent.

En Somalie, en Éthiopie, à Djibouti, dans le nord du Kenya et de l'Ouganda, la sécheresse décime le bétail et ruine les cultures. Selon l'ONU, 12,4 millions d'habitants sont affectés. Parmi eux, 2,8 millions ont besoin d'une aide d'urgence et 450 000 sont touchés par la famine. Et il reste plus de 700 millions d'euros à trouver.

 

À Paris, hier, des ministres réunis à Matignon ont évoqué l'emploi des 30 millions d'euros débloqués par la France. 10 millions ont été « décaissés fin juillet, le restant le sera dans les prochains jours ». La Croix-Rouge et des ONG financeront ainsi des kits d'hygiène, des matériels permettant l'accès à l'eau. Le 1er septembre, un cargo quittera Toulon avec 320 t de nourriture.

(Ouest France, 26 août 2011)

 


 

bouton_007.gifPAROLE

 

PATRICK DIKOUMÉ

Porte-parole du Collectif « Diaspora Afrique »

« Nous appelons les Africains au sursaut »

 

« La famine a été annoncée le 20 juillet, et nous sommes fin août. Pendant tout ce temps, les Africains n'ont pas su se saisir de cette affaire-là : quel échec ! J'attendais de la conférence de l'Union africaine qu'elle casse cette spirale de confort dans laquelle les dirigeants africains se complaisent en laissant les autres faire à leur place. Il faut que les Africains soient les premiers à s'occuper des affaires africaines. J'attendais une mobilisation d'urgence, car il faut que les leaders que sont l'Afrique du Sud et le Nigeria mettent de l'argent sur la table. Il faudrait aussi une solution de moyen terme : doter l'Union d'une structure opérationnelle de gestion des crises alimentaires. C'est une priorité. Nous appelons les Africains au sursaut : la légitimité de l'Union ne pourra passer que par l'instauration de mécanismes de solidarité. »

RECUEILLI PAR MARION QUILLARD

(La Croix 26 août 2011)

 

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bouton_007.gifLe délai entre le début de la crise alimentaire et la réaction de l’Union africaine est en effet saisissant. Mais, comment ne pas se réjouir de cette prise de conscience même tardive, même insuffisante !

C’est une première. L’espoir est donc permis. Il faut l’amplifier et continuer dans ce sens, en donnant un contenu non seulement à « l’Union africaine », mais aussi à la « solidarité africaine », afin que ce sursaut tardif et partiel soit tout sauf un feu de paille.

L’apprentissage de la solidarité entre États africains est un indice positif et prometteur pour l’avenir du continent. Il peut porter en germe l’exercice de la solidarité au sein des États, entre populations, au-delà des clivages, ethniques, religieux…

 

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24 août 2011 3 24 /08 /août /2011 10:12

1525R-140774La politique en France, un système verrouillé

 

      La politique, ce sont d’abord des partis et des hommes qui les animent, ce rouage est indispensable au fonctionnement normal de la démocratie. Mais en France, ce moteur semble tourner en rond inexorablement, au risque de s’user et se scléroser. La principale caractéristique de la politique dans ce pays, c’est la permanence des hommes, des discours et des pratiques.

La classe politique française peut-elle se réformer ? C’est-à-dire se délester des mœurs d’antan ? Celles du XIXe siècle ? Peut-elle se défaire de la culture des « petites phrases » ? Celle de l’artifice et de la politique spectacle ? Est-elle apte à éviter la confusion entre ambition pour le pays et ambition personnelle ?

 

     Parmi les grands pays démocratiques du monde, la France se signale par la verticalité politique. Quant à ses partis politiques, hiérarchie et allégeance sont les maîtres mots, ceux qui les définissent le mieux. Partout, la verticalité est de rigueur. C’est la norme hors laquelle aucun fonctionnement n’est imaginable. Indépendamment des partis politiques, cette verticalité se ressent ailleurs, pratiquement dans tous les compartiments de la vie publique. Il est significatif à cet égard que l’expression, « France d’en haut et France d’en bas » ait été si facilement apprivoisée car elle correspond au vécu des Français en bien des domaines. Ce qu’elle a de critique et de critiquable n’apparaît guère. Or, il n’est de France d’en bas que pour ceux qui la regardent d’en haut. Cette expression n’est-elle pas en soi l’indice d’une fêlure à la fois sociale et civique ? La France d’en bas n’aurait-elle pas vocation à devenir la France d’en haut ? Quel tribut ceux d’en haut ont-ils payé à la nation pour mériter la vocation d’être la France d’en haut ?

     France d’en haut, France d’en bas, le destin des uns et des autres serait-il scellé à la naissance quoi qu’ils fassent comme du temps de la société des trois ordres… sans appel ? Citoyens passifs contre citoyens actifs pour toujours ?

      Mais en politique, sans doute plus qu’ailleurs, la verticalité est bien réelle. C’est la rectitude absolue du sommet à la base, du Président du parti au militant lambda, allégeance absolue des niveaux locaux, départementaux et régionaux à l’état-major parisien. En France, l’ascension d’un homme politique aux premières magistratures du pays est obligatoirement liée à son parcours et son rang au sein d’un parti. En Grande-Bretagne comme en Allemagne et surtout aux Etats-Unis un jeune novice qui porte bien et parle bien, muni de quelques idées claires et ordonnées pour seul viatique, à condition de se draper de la bannière d’une formation politique peut, du jour au lendemain, sortir de l’anonymat quasi parfait pour gravir les plus hautes marches du pouvoir d’Etat. C’est tout particulièrement le cas aux Etats-Unis encore plus qu’ailleurs. Dans ce pays, les voies qui mènent au sommet sont multiples, à condition d’être porté par un parti qui assure l’intendance.

       En France, le cursus honorum, le parcours qui mène à la plus haute magistrature du pays est digne de figurer parmi les douze travaux d’Hercule. Ce parcours politique a ses rites, ses passages obligés. Il reste sans doute marqué des réminiscences des lointaines pratiques sociales des temps anciens de notre histoire et porte de ce fait sans nul doute les stigmates d’une nation vieillie. Ses étapes obligées sont connues, banalisées et incontournables. Son schéma, calqué en tous points sur celui d’anciennes corporations médiévales comporte environ six degrés ou niveaux principaux.

 bouton_007.gif Le premier degré correspond au stade du « néant » où le militant n’a ni voix, ni opinion.

 bouton_007.gif Le deuxième, à celui d’apprenti ou il n’est que simple exécutant, toujours sans voix, mais figure dans les annales locales et sur la liste des corvéables et autres colleurs d’affiches.

   bouton_007.gifLe troisième correspond au niveau de « demi-valet ».

  bouton_007.gifLe quatrième, à celui de valet.

  bouton_007.gifQuant au cinquième stade, il correspond au degré de vice-maître.

  bouton_007.gifEnfin le sixième menant au sommet du parti correspond au degré ultime, celui aboutissant à la cime de la pyramide, c’est le stade de « Maître », de « Sphinx », intouchable. Trônant au firmament de la hiérarchie, le chef, (Président, Premier secrétaire, Secrétaire général, Secrétaire national…) tel un monarque de droit divin en son conseil, distribue à sa guise titres de noblesse élevant à la dignité suprême, ou lettres de cachet condamnant au bannissement provisoire ou définitif.

     Dans ce système, le parrainage a force de loi. C’est la condition de l’ascension de la base au sommet. L’accès à la maîtrise requiert ainsi des années d’efforts, de peines, des ressources intérieures suffisantes pour avaler maintes couleuvres parfois, l’ensemble constituant un dogme bien connu et bien convenu qui ne tolère ni déviance, ni iconoclasme ou hérésie d’aucune sorte. Cette maîtrise tend parfois à se fermer, se plomber sur un cercle de courtisans bien délimité. De ce fait seuls y accèdent les fils de maîtres ou de clients de maîtres, l’adoubement constituant la règle, avec son rituel immuable.

      Cet hermétisme politique peut avoir comme vertu principale d’asseoir au sommet de l’Etat des personnalités trempées parce que frottées de longue date aux dures réalités du parcours, façonnées par la vertu de la patience, éclairées par les lanternes de l’expérience. Dans un tel système, l’amateurisme est d’office disqualifiant, la velléité suspecte, le solitaire condamné.En effet,"il est plus facile de faire appel à quelqu'un qui a fait ses preuves que de risquer sa confiance en celui qui a peu d'expérience". Le garde-fou ainsi érigé protège de l’aventure dont la jeunesse est suspecte, il met à l’abri de l’inconnu dont on sait peu, puisque n’ayant pas fait ses preuves dans les ateliers du parti au vu de tous… Cela donne des hommes d'Etat de grande qualité. Si ces avantages sont indéniables, cette pratique n’est pas sans risques. Le manque de sang neuf inhérent au non-renouvellement des hommes, peut à terme signifier le non-renouvellement des idées qui est source de sclérose, d’hibernation politique, synonyme de fermeture sociale. C’est précisément ce danger qui menace sans doute moins la France que la République. Mais qu’est-ce que la France sans la République ?

(Tidiane Diakité, France que fais-tu de ta République ?, L’Harmattan)

 

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21 août 2011 7 21 /08 /août /2011 08:34

001-copie-2La solidarité africaine à l’épreuve du drame somalien  

 

Le drame qui se joue en Somalie constitue un autre test qui enrichit la réflexion sur la solidarité africaine.

Que les dirigeants (au Nord comme au Sud)  du continent soient muets lorsqu’il s’agit de dénoncer les violations des droits humains en Afrique ou ailleurs dans le monde, cela reste une habitude ancienne constatée. Mais, qu’ils demeurent sourds et muets lorsqu’il s’agit de désastre humanitaire comme c’est actuellement le cas avec la famine qui sévit dans la Corne de l’Afrique, particulièrement en Somalie, sous leurs yeux, cela ne manque pas de symboles.

Que je sache, toute l’Afrique n’est pas victime de la sécheresse ni de pénurie alimentaire ! Il est des États aux greniers pleins et aux récoltes abondantes, aux terres généreusement arrosées et florissantes. Outre ces élus de la bonne terre fertile, il y a ceux du pétrole abondant, du gaz, de l’or, du diamant, du cuivre… Ceux-là ne peuvent esquisser le moindre geste de solidarité, ou exprimer le moindre mot de compassion à l’égard des enfants et vieillards qui meurent de faim et de carences alimentaires aiguës chaque jour ?

La mobilisation est à l’œuvre partout ailleurs : Europe, Amérique, ainsi qu’au sein d’organisations internationales. La Turquie n’est pas en reste. Son Premier ministre Erdogan est arrivé le 19 août dernier dans la capitale somalienne Mogadiscio, accompagné de plusieurs de ses ministres. Sa première visite fut réservée aux camps de déplacés où croupissent enfants, femmes et vieillards démunis de tout, puis aux hôpitaux qui accueillent malades et impotents de la faim.

C’est une preuve supplémentaire de l’intérêt porté au drame somalien par le gouvernement turc qui déploie depuis le début de la famine dans cette partie de l’Afrique une activité humanitaire remarquée. La visite du Premier ministre fut précédée par l’envoi de 4 avions remplis de dizaines de tonnes de vivres et de médicaments destinés aux Somaliens dont 4 millions sont dépendants de l’aide humanitaire d’urgence.

Si aucune comparaison des moyens et des capacités n’est possible avec les pays de l’Amérique du Nord ou ceux de l’Union européenne, l’Afrique n’est pas complètement démunie dans son ensemble. Indépendamment des États, l’Afrique a aussi ses multimillionnaires en dollars et en euros dont le nombre augmente sensiblement depuis deux décennies.

 

110 F 1665070 9YIJBCixpZ5oh4IBCZ5pCDEbetG80FQuid de la solidarité africaines ?

 

Tshitenge Lubabu M.K. donne son avis dans l’hebdomadaire Jeune Afrique :

 

J'ai beau tendre l'oreille, aucun chef d'État ne s'est exprimé sur cette tragédie annoncée. Rien, même pas un chuchotement. Comme d'habitude. Indifférence, fatalisme? Si je comprends bien la signification de ce silence, j'imagine à quoi pensent nos dirigeants. Ils se disent: « Nous sommes pauvres, donc impuissants. » Ou encore: « Nous avons d'autres chats à fouetter. » Soit. Sauf que, à force de mettre en avant la pauvreté, on aboutit à la paralysie des neurones. Or, dans leurs discours, de quoi parlent les dirigeants ? De l'unité du continent. De solidarité africaine. Des mots, rien que des mots. Car, lorsque le malheur touche un des membres de la famille, ils adoptent l'attitude stérile du spectateur. À l'évidence, même dans les pays les plus fertiles, il n'existe aucune réserve alimentaire.

 

Pour exprimer notre solidarité – la vraie, pas celle des discours de circonstance – à l'égard de nos frères de la Corne, j'ai quelques pistes intéressantes. Première piste : que toutes les limousines achetées à l'occasion des sommets de l'Union africaine et des cinquantenaires soient vendues aux enchères pour trouver de l'argent. Deuxième piste : les chefs d'État doivent renoncer pendant un an à la dotation présidentielle et aux fonds secrets. Troisième piste : ils doivent mobiliser la population afin que chacun donne selon ses moyens. Les gens sont trop pauvres pour agir ? Peut-être. Mais pourquoi les pauvres roulent-ils en 4x4 ou en voiture de luxe ? Pourquoi boivent-ils les meilleurs champagnes, vins, spiritueux du monde ? Pourquoi entretiennent-ils ces deuxièmes, voire centièmes bureaux[i] ?  Frères africains, vous pour qui la vie est un long fleuve tranquille, vous dont le train de vie ne correspond pas à vos revenus officiels, ne pouvez-vous pas, un seul instant, y renoncer et sauver ceux dont les ventres n'ont plus d'oreilles ?

On me rétorquera qu'ailleurs il n'y a rien non plus à manger. Pas sûr : mes yeux ont vu des légumes et des fruits en quantité industrielle pourrir en Guinée ou au Bénin. J'ai vu des troupeaux de bovins en parfaite santé au Tchad ou au Rwanda, et j'en passe. Si chaque pays pouvait donner le peu qu'il a pour exprimer sa solidarité aux habitants de la Corne de l'Afrique, plutôt que de s'autoproclamer démuni, le pire serait évité. Vous me direz que je rêve éveillé. Non. Je suis un afro-optimiste impénitent. Sans rêve, pas d'avenir.

(Jeune Afrique, 31 juillet-6août 2011)



[i] Les maîtresses

 

 

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16 août 2011 2 16 /08 /août /2011 17:01

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Félix Eboué, premier gouverneur noir, un grand homme, un grand destin

 

      Guyanais, premier gouverneur noir aux Antilles et en Afrique (de Guadeloupe, du Tchad, gouverneur général de l'Afrique Equatoriale Française), Félix Eboué fut également le premier grand Résistant noir en Afrique après s'être rallié au général de Gaulle dès juin 1940.

        Il fournit ainsi au chef de la France Libre à la fois un espace, une patrie, des troupes (40 000 hommes) et surtout, une légitimité aux yeux des Alliés, principalement Churchill et Eisenhower.

          En rendant à de Gaulle sa légitimité, Félix Eboué rendait à la France son honneur et aidait à son relèvement. C'est lui qui fit entrer l'ensemble des colonies françaises d'AEF avant celles d'AOF dans la Résistance derrière de Gaulle. Il fit également de la progression des Forces françaises combattantes en Afrique du Nord une de ses priorités.

           Personnalité éminente, le gouverneur Eboué fut aussi un grand administrateur colonial. Homme de devoir, de conviction et d'honneur, le premier gouverneur noir de la France parmi les Noirs d'Afrique, voulut (comme Lyautey ou Brazza) concilier colonisation et respect des indigènes, force publique et intérêt des faibles.

             Membre du Conseil de l'Ordre de la Libération, honoré de la Croix de la Libération, Compagnon de la Libération et officier de la Légion d'Honneur, il sut, dans son action comme dans sa pensée, mettre le service de la France au service des Africains, avec humanisme et humilité. Il repose au Panthéon depuis le 2 mai 1949.

           La qualité du personnage, sa vision de la France, de l'Outre-Mer et de l'Homme, transparaissent dans son fameux discours prononcé au lycée Carnot à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, le 1er juillet 1937, à l'occasion de la traditionnelle distribution des prix.

           Nonobstant le contexte dans lequel il fut prononcé, ce discours "Jouer le jeu", mérite d'être rappelé non seulement aux jeunes Guadeloupéens, mais aussi aux jeunes métropolitains, aux jeunes Africains, ainsi qu'aux moins jeunes de 2011.


bouton 007A cette jeunesse que l’on sent inquiète, si incertaine devant les misères de ces temps qui sont les misères de tous les temps ; à cette jeunesse, devant les soucis matériels à conjuguer ; à cette jeunesse dont on veut de part et d’autre, exploiter les inquiétudes pour l’embrigader ; à cette jeunesse qui me fait penser à ce mot de GUYAU : « pour connaître et juger la vie il n’est pas besoin d’avoir beaucoup vécu, il suffit d’avoir beaucoup souffert » ; à cette jeunesse, généreuse et spontanée, n’ai-je pas le devoir, me tournant vers elle, de l’adjurer à mon tour de rester indépendante ,  

N’ai-je pas pour obligation de lui dire ; ne te laisse pas embrigader, ne souffre pas que l’on t’enseigne comme suprême idéal le fait de marcher au pas, en colonnes parfaites, de tendre la main ou de montrer le poing. En l’acceptant, tu consacreras le triomphe de la lettre au détriment de l'esprit, parce qu'on t'aura enseigné que le rite tient lieu de culte.  

Ne devons-nous pas conserver à cette jeunesse ses qualités essentielles : l’indépendance, la fierté, l’orgueil, la spontanéité, le désintéressement ? 

Je ne résiste pas, quant à moi, au désir de vous indiquer, mes jeunes amis, une autre formule qui permet de gagner, sinon à tous les coups, mais de gagner sûrement en définitive.  

« Soyez sportifs ! Soyez chics !… »

Je vous dirai : « Jouez le jeu ! »

Jouer le jeu, c'est être désintéressé.

Jouer le jeu, c'est réaliser ce sentiment de l'indépendance dont je vous parlais il y a un instant.

Jouer le jeu, c'est piétiner les préjugés, tous les préjugés, et apprendre à baser l'échelle des valeurs uniquement sur les critères de l'esprit. Et c'est se juger, soi et les autres, d'après cette gamme de valeurs. Par ainsi, il vous sera permis d'affirmer et de faire admettre que les pauvres humains perdent leur temps à ne vouloir considérer que les nuances qui les différencient, pour ne pas réfléchir à trois choses précieuses qui les réunissent : les larmes que le proverbe africain appelle "les ruisseaux sans cailloux ni sable", le sang qui maintient la vie et, enfin, l'intelligence qui classe ces humains en hommes, en ceux qui ne le sont pas ou qui ne le sont guère ou qui ont oublié qu'ils le sont.

Jouer le jeu, c'est garder farouchement cette indépendance, parure de l'existence ; ne pas se laisser séduire par l'appel des sirènes qui invitent à l'embrigadement, et répondre, en pensant aux sacrifices qu'elles exigeraient en retour :

Quelle mère je quitterais ! Et pour quel père !

Jouer le jeu, c'est savoir prendre ses responsabilités et assumer les initiatives, quand les circonstances veulent que l'on soit seul à les endosser; c'est pratiquer le jeu d'équipe avec d'autant plus de ferveur que la notion de l'indépendance vous aura appris à rester libres quand même. Jouer le jeu consiste à ne pas prendre le ciel et la terre à témoin de ses déconvenues, mais, au contraire, à se rappeler les conseils laminaires d'Epictète à son disciple :   «  il y a des choses qui dépendent de nous ; il y a des choses qui ne dépendent pas de nous ».

Jouer le jeu, c'est savoir tirer son chapeau devant les authentiques valeurs qui s'imposent par la qualité de l'esprit et faire un pied de nez aux pédants et aux attardés.

Jouer le jeu, c’est accepter la décision de l'arbitre que vous avez choisi ou que le libre jeu des institutions vous a imposé.

Jouer le jeu, c'est, par la répudiation totale des préjugés, se libérer de ce qu'une expression moderne appelle le complexe d'infériorité. C'est aimer les hommes, tous les hommes, et se dire qu'ils sont tous bâtis selon la commune mesure humaine qui est faite de qualités et de défauts.

Jouer le jeu, c'est mépriser les intrigues et les cabales, ne jamais abdiquer malgré clameurs ou murmures et poursuivre la route droite que l'on s'est tracée.

Jouer le jeu, c'est pouvoir faire la discrimination entre le sourire et la grimace ; c'est s'astreindre à être vrai envers soi pour l'être envers les autres.

Jouer le jeu, c'est se pénétrer que ce n'est pas en tuant Caliban que l'on sauvera Ariel.

Jouer le jeu, c'est respecter l'opinion d'autrui, c'est l'examiner avec objectivité et la combattre seulement si on trouve en soi les raisons de ne pas l'admettre, mais alors le faire courageusement et au grand jour.

Jouer le jeu, c'est respecter nos valeurs nationales, les aimer, les servir avec passion, avec intelligence, vivre et mourir pour elles, tout en admettant qu'au delà de nos frontières, d'authentiques valeurs sont également dignes de notre estime, de notre respect. C'est se pénétrer de cette vérité profonde que l'on peut lire au 50e verset des Vers d'or: « Tu sauras, autant qu'il est donné à l'homme, que la nature est partout la même.. » et comprendre alors que tous les hommes sont frères et relèvent de notre amour et de notre pitié.

Jouer le jeu, dès lors, c'est s'élever contre le conseil nietzschéen du diamant au charbon ; « Sois dur ! et affirmer qu'au-dessus d'une doctrine de la force, il y a une philosophie du droit. »

Jouer le jeu, c'est proclamer qu'on ne « prend pas pour juge un peuple téméraire » et poursuivre son labeur sur le chemin du juste et de l'humain, même lorsque les docteurs et les pontifes vous disent qu'il est trop humain.

Jouer le jeu, c'est préférer à Wotan, Siegfried, « toute puissance de la jeunesse et spontanéité de la nature ».

Jouer le jeu, c'est refuser les lentilles pour conserver son droit d'aînesse.

Jouer le jeu, c'est fuir avec horreur l'unanimité des adhésions dans la poursuite de son labeur. C’est comprendre Descartes et admettre Saint Thomas ; c'est dire : « que sais-je ? » avec Montaigne, et « Peut-être ! » avec Rabelais. C'est trouver autant d'agrément à l'audition d'un chant populaire qu'aux savantes compositions musicales. C'est s'élever si haut que l'on se trouve partout à son aise, dans les somptueux palais comme dans la modeste chaumière de l'homme du peuple ; c'est ne pas voir un excès d'honneur quand on est admis là, et ne pas se sentir gêné quand on est accueilli ici ; c'est attribuer la même valeur spirituelle au protocole officiel, à l'académisme, qu'au geste si touchant par quoi la paysanne guadeloupéenne vous offre, accompagnée du plus exquis des sourires, l'humble fleur des champs, son seul bien, qu'elle est allée cueillir à votre intention.

Jouer le jeu, enfin, c'est mériter votre libération et signifier la sainteté, la pureté de votre esprit. bouton 007

 fleur42



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14 août 2011 7 14 /08 /août /2011 08:08

hibou 002L'aide souhaitéelivre 010


S’agissant d’entreprises et d’esprit d’entreprise, le plan proposé pour vaincre le sous-développement en Afrique (voir, l’Afrique et l’aide déjà cité) prévoira la création de banques ou d’institutions financières spécifiques vouées exclusivement au soutien des entrepreneurs africains. Seront créés également des « instituts de conseil » pour la formation (stages de recyclages, conseils) de ces mêmes entrepreneurs.

Grâce à ce nouvel enseignement et à ce nouveau dispositif, l’Afrique doit pouvoir s’imprégner et vivre de ses valeurs mais sans renoncer à l’universalisme. Les Romains de l’Antiquité, après avoir assimilé le savoir de la Grèce et de l’Orient, devinrent les artisans de la diffusion d’une mentalité nouvelle et d’innovations technologiques qui traversèrent la Méditerranée jusqu’à « l’Extrême Occident » ; le relais fut pris ensuite par la « science et la technologie arabo-musulmane ». Dans cette course de relais de l’esprit et du savoir à travers la planète et à travers le temps, il n’y a pas eu de passage de témoin de l’Occident à l’Afrique. Les colonisations n’y ont pas pourvu. Entre l’Europe et l’Afrique, le flambeau de la science s’est noyé dans la mer, tombé des bagages du colonisateur. Le plan des Nations unies pour le continent africain doit aussi permettre de rétablir cet équilibre, en comblant cette lacune, ce qui serait par ailleurs un moyen de combler en partie le fossé entre l’Afrique démunie économiquement et intellectuellement et l’Europe nantie intellectuellement et économiquement. Dans les programmes élaborés et appliqués grâce à ce plan, il ne s’agira pas seulement d’apprendre à lire et à écrire aux jeunes Africains mais à les éduquer dans la maîtrise de la science et de la technique, les éduquer à l’universel car, « apprendre est un plaisir commun à tous les hommes » et, ainsi, en même temps que les germes du savoir, jeter les graines de l’universalisme parce que « les cultures du monde sont comme un arc-en-ciel mais l’arc-en-ciel ne se dessine que sur l’unité du ciel. Et ce ciel, c’est l’humanité en tant que telle ».

L’exécution de ce plan international de sauvetage de l’Afrique ne peut être assurée du succès escompté que si cela intervient dans une Afrique pacifiée, purifiée des démons des guerres fratricides absurdes qui, depuis des décennies, ont enclenché ce processus de régression et d’arriération du continent. Les conflits en Afrique seront par conséquent un des volets du plan des Nations unies, en vue d’enrayer ce fléau- là où il sévit mais aussi pour prévenir les conflits futurs.

La mise en place d’un Comité de résolution et de prévention des conflits, doté de moyens suffisants devrait permettre de pacifier l’Afrique. L’un des avantages immédiats d’un tel dispositif sera de mettre au service du développement de l’Afrique les milliards engloutis dans ces conflits. Supposons que les sommes colossales investies dans la guerre civile en Angola par les deux parties en conflit (l’Unita et le gouvernement officiel angolais) pendant 30 ans sans compter le coût des interventions de l’ONU ainsi que de la communauté internationale soient affectées à la mise en valeur de ce pays ! De même au Rwanda, au Congo - Zaïre, en Ethiopie, au Soudan, en Somalie, en Côte d’Ivoire, en Sierra Léone… ! La liste de toutes les guerres civiles dont ce continent a été le théâtre depuis 1960 est longue. Autant de fonds économisés constitueraient une manne de valeur inestimable au service du développement et auraient certainement permis des avancées sur la voie du progrès et du bien-être des populations. Combien d’écoles, combien d’hôpitaux et d’infrastructures routières et ferroviaires ?

Mais on ne saurait éradiquer ce fléau qui mine l’Afrique sans en analyser les raisons profondes, historiques, sociales, internes et externes. Il est primordial que les droits sociaux et économiques soient assurés et garantis à tous les niveaux, en tant que fondements de la paix.

L’éducation et la formation prévues dans le cadre du plan contribueront sans aucun doute à rendre les hommes plus fraternels. Il faut réussir à convaincre les Africains qu’il s’agit de rechercher, dans l’intérêt et pour le bien de tous, les chemins porteurs qui mènent à un avenir de paix et de développement en Afrique et dans le monde, que l’action des Nations unies s’inscrit dans cette vision qui dépasse les seules frontières africaines, bref, les convaincre que le sort et l’avenir du monde se jouent aussi en Afrique et qu’à ce titre, le devoir de paix s’impose à tous.

 

Aider l’Afrique à se développer, c’est aussi mettre un terme au pillage des ressources de son sous-sol qui perdure depuis le milieu du XIXe siècle (voir le roi des Belges, Léopold II, dont le Congo fut la propriété privée) sous toutes ses formes, même maquillé en aide ou en partenariat. Dans le même esprit, il s’agit de soutenir et valoriser les exportations africaines, tout au moins d’assurer la juste rémunération des paysans à hauteur du labeur fourni pour ce qui concerne les exportations agricoles. Quant aux ressources minérales, pétrole, or, diamant, cuivre, bauxite, manganèse, cobalt, saphir, uranium…, l’exploitation dont l’Afrique est victime se fait depuis les indépendances sous le couvert d’accords ou de contrats qui n’ont, le plus souvent, de contrat que le nom et qui couvrent en réalité des actes de bradage des richesses du continent. Comment en faire pour les Africains un moyen de développement et non une des raisons de la régression ou de la barbarisation ? Le plan prévoira la création d’une Commission spéciale en liaison avec la Haute Autorité qui aurait un double mandat : d’abord veiller à la régularité des clauses des contrats établis avec les pays qui reçoivent des compagnies étrangères exploitant le sous-sol ; ensuite exiger la tenue d’un cahier des charges que chaque compagnie devra avoir établi en fonction des besoins du développement. Il sera ainsi du ressort de cette Commission d’exiger la transparence des contrats signés avec les Etats et d’être intermédiaire pour la contribution des sociétés étrangères aux objectifs du plan.

D’une manière générale, ce plan ainsi conçu aurait l’avantage de la clarté, gage d’efficacité. Il éviterait que la coopération bilatérale soit le prétexte de combinaisons douteuses incarnées dans des réseaux douteux aux agissements préjudiciables à l’Afrique. De même serait ainsi révolu le temps où des compagnies étrangères, pétrolières comme Elf au Gabon ou au Congo, minières telles les compagnies minières belges dans l’ex-Zaïre, prenaient des gouvernements africains en otage et pillaient les ressources du continent en toute impunité. Le plan mettrait fin à l’ère des mercenaires en Afrique.

(Tidiane Diakité, L'Afrique et l'aide ou comment s'en sortir, L'Harmattan) 

 

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10 août 2011 3 10 /08 /août /2011 08:57

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Perte et renaissance à soi


"Tout au long de notre vie,

Nous quittons et nous sommes quittés.

Nous avons à renoncer à une grande part

De ceux que nous aimons.

La perte semble être le prix

De l'agrandissement de la vie.

C'est aussi la source

De la plupart de nos progrès."

(Jacques Salomé)

 

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Chercher et retrouver, dans tout ce qui nous arrive, dans tout événement, bon ou mauvais, le cadeau de la vie, caché... mais présent, pourvu que nous acceptions de le découvrir comme tel, semble un précepte positif à inscrire dans notre charte de vie.

 

bande 001

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7 août 2011 7 07 /08 /août /2011 07:33

hibou 002Les fondements du développementlivre 010 en Afrique

 

La démocratie, pour être vecteur de développement et de bien-être, doit reposer sur l’éducation, l’instruction, la formation ainsi que sur l’éveil au droit. Qu’est-ce que la démocratie dans une société analphabète à 80% ? L’éducation, c’est le socle, à la fois la substance et la racine de la démocratie.

Le chantier du développement ainsi ouvert en Afrique n’est donc pas qu’un chantier économique dans un objectif de croissance, mais aussi et surtout un chantier culturel, un chantier de construction de l’homme dans la plénitude de son humanité.

En Afrique, il n’y a pas que la dictature, le déni de justice et les méfaits des responsables politiques, il y a également une certaine culture qui tue la liberté et la pensée.

Il ne sert à rien de corriger le politique si on n’agit pas en amont sur la culture. Il faut donc corriger le politique par la démocratie et agir sur la culture par l’école. Si aider l’Afrique consiste à remplir le tonneau des Danaïdes, pour réussir dans cette tâche, là où échouèrent les filles de Danaos, il suffit de combler le fond troué du tonneau. Le matériau indiqué à cette fin, infaillible, c’est la promotion de l’éducation et de la formation adaptées aux besoins et aux réalités de l’Afrique, une éducation qui libère le corps et l’esprit. La communauté internationale est-elle prête à payer ce prix, définitivement et sans réticence, c’est-à-dire à mettre l’homme au centre de la coopération ?

A partir du moment où l’on a une écriture, latine ou africaine, peu importe, il faut en user et en abuser en vue de rattraper le temps perdu, alphabétiser, scolariser, former à outrance, car un homme à qui il manque l’écriture et l’éducation est un homme à qui il manque beaucoup. Aux Etats-Unis, si on construisait un peu plus d’écoles pour les jeunes Noirs, on fermerait certainement beaucoup de prisons. Il conviendrait de subordonner la poursuite de l’aide au progrès de la scolarisation dans les pays africains. Dans cette optique, l’ONU devra prévoir un système de contrôle permanent de la scolarisation, qui évaluera une fois par an, dans chaque Etat africain, le nombre d’écoles et d’enseignants par rapport à la population globale et la population scolarisable, aidera à la mise en état des établissements scolaires, les programmes demeurant de la compétence des gouvernements nationaux avec cependant droit de regard pour ce qui concerne l’intégration des notions de droit et de droits de l’homme, d’environnement, d’hygiène dans les programmes comme faisant partie du tronc commun des savoirs. Si les Nations unies par le biais de l’UNESCO s’occupent de l’entretien, de par le monde des monuments classés « patrimoine mondial » ainsi que de la restauration de ceux dits « monuments en péril », quoi de plus précieux que ce monument de suprême valeur de chair et de sang, qu’est le cerveau de jeunes africains qui, davantage encore que les monuments de pierre ou de bronze, sont la substance vivante de l’humanité ? Faut-il laisser cette substance en friche avec le risque d’en payer demain des frais incalculables ? Sauver ces petits cerveaux aujourd’hui du péril de l’obscurantisme, c’est cultiver les trésors, ces promesses de richesses infinies qui écloront demain pour le service et le bien de l’humanité. C’est décupler les possibilités de création d’autres monuments pour le patrimoine de l’humanité. Combien de Mozart, combien d’Albert Einstein et combien de Léonard de Vinci assassine-t-on en Afrique par jour, au berceau ?

Les programmes d’enseignement porteront sur tout l’éventail des disciplines classiques, techniques, pratiques qui devront permettre aux jeunes africains de s’imprégner de leurs réalités et de s’ouvrir au monde. A tous les niveaux, de la maternelle à l’Université, les programmes comporteront en plus des disciplines classiques, des cours d’éthique, d’initiation au droit et aux droits, d’ouverture sur l’individu, la société, le monde. Cette formation doit être aussi la formation à l’esprit critique, à la responsabilité et à l’esprit d’initiative qui doit mener à la réflexion et à l’action, à cette culture qui rend à la fois curieux et amoureux du monde, c’est-à-dire curieux et amoureux de soi et des autres.

Toute réflexion sur l’école en Afrique doit s’attacher à mettre en valeur ces axes majeurs. Elle doit également ne plus sacrifier la scolarité des filles. Afin de traduire ces faits dans la réalité, des règles fixées par les Nations unies doivent interdire que des filles soient retirées de l’école à douze ou quatorze ans pour être mariées, de telles pratiques étant désormais assimilées à des crimes contre la femme. Les effets bénéfiques de l’éducation de la femme ont été déjà démontrés et, les niveaux actuels de participation de celle-ci au développement en Afrique subsaharienne indiquent qu’il reste encore beaucoup à faire pour accroître la portée de ces effets dans la région.

On a beau inviter les Africains aux colloques internationaux consacrés à l’avenir du monde, on a beau ouvrir les marchés des pays riches aux produits africains, le manque de savoir et de savoir-faire dans les domaines de l’exportation et de la commercialisation constituera un obstacle pour l’Afrique. L’ouverture des portes ne suffit pas, il faut la capacité d’y entrer. Seules l’éducation et la formation fourniront, avec la clef, la capacité d’y entrer. La culture de la création et de l’innovation, le goût du risque et l’esprit d’entreprise inculqués par la nouvelle pédagogie seront les nouveaux ferments de développement.

 (Tidiane Diakité, L'Afrique et l'aide ou comment s'en sortir, L'Harmattan)


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3 août 2011 3 03 /08 /août /2011 08:18

097.gifL'Afrique dans l'Histoire, hier et aujourd'hui

De l’esclavage à la colonisation, l’Afrique s’est mêlée au monde de différentes manières. Comment écrire aujourd’hui l’histoire contemporaine de la Grande-Bretagne, de la France, du Portugal… en occultant leurs rapports avec l’Afrique ? Comment extraire l’histoire de l’esclavage des Noirs, donc la marque de l’Afrique, de l’histoire des Etats-Unis ? De l’histoire économique, de la démographie, de la société, de l’art, du sport, de la musique des Etats-Unis ? Que resterait-il de cette histoire sans cette marque africaine ? Peut-on extraire l’apport de ces Noirs d’Amérique de l’impact culturel, artistique, sportif des Etats-Unis sur le reste du monde ? Quel pays au monde peut se targuer d’échapper, de près ou de loin, à cette influence américaine à travers le sport et la musique qui sont autant de marques indirectes de l’Afrique ?

Il n’est pas jusqu’à la bombe atomique d’Hiroshima et de Nagasaki, de sinistre mémoire, qui ne soit involontairement et indirectement associée à l’Afrique, l’uranium qui a servi dans la fabrication de cette bombe provenant de ce continent, plus précisément du gîte uranifère de Shinkolobwe (considéré comme le plus riche du monde) au Congo ex-Zaïre. Dans le même ordre d’idée, qui a jamais évalué la part des pierres précieuses et autres produits africains dans la confection des produits de la technologie de pointe, des ordinateurs aux éléments de l’aérospatiale, dans la fabrication de bijoux et de cosmétiques ? Et les produits alimentaires à base de matières premières en provenance d’Afrique ? On peut étendre la réflexion en évoquant la place de l’Afrique dans le développement des sciences, de l’anthropologie, l’épidémiologie, la démographie, l’économétrie… L’histoire de l’Europe, de l’Amérique et de l’Asie serait à réécrire si elle devait être amputée de sa part africaine, officielle et officieuse.

Que tous les édifices et monuments dans toutes ces villes d’Europe, d’Amérique et d’Asie, qui sont bâtis sur le profit tiré du contact de l’Afrique du VIIe au XXe siècle, direct ou indirect, soient subitement démolis.

Que tous les pays d’Europe anciens possesseurs de colonies en Afrique qui ont bénéficié des ressources du continent ainsi que du travail forcé imposé aux populations, notamment pendant la grande crise économique des années 1930, restituent la valeur numéraire de ces profits à l’Afrique.

Que toutes les entreprises multinationales qui ont exploité et continuent d’exploiter ce continent ainsi que les Africains payés au rabais en vue du développement de leur économie, remboursent au prix juste.

Que tous ceux en Europe, en Amérique et en Asie qui exploitent ou ont exploité des travailleurs africains déclarés ou non déclarés remboursent l’équivalant du salaire juste.

Que les sociétés étrangères qui encombrent et polluent l’Afrique de leurs produits invendables ou interdits de vente chez eux ou ailleurs dédommagent les Africains à la hauteur du préjudice subi.

 

Et c’est le fruit de toutes ces iniquités depuis si longtemps qui contribue à l’essor économique des Etats en Europe, en Amérique, en Asie. Quel impact l’arrêt de ces pratiques unilatérales et la compensation de ces indus n’aurait-il pas eu sur l’économie de ces Etats ? L’Europe (la France en tête) a décidé l’indemnisation des descendants des Juifs spoliés de leurs biens du fait de la déportation pendant la Deuxième Guerre mondiale. L’Allemagne vient de décider l’indemnisation des travailleurs esclaves raflés et employés dans l’industrie allemande pendant la guerre. Des entreprises de ce pays qui ont bénéficié de ce travail servile apporteront leur contribution à cette indemnisation. Les économies de tous les Etats d’Amérique, d’Europe, d’Asie qui ont utilisé le travail servile d’Africains pendant onze siècles supporteraient-elles l’indemnisation totale ou même partielle de centaines de millions de travailleurs en ce début de XXIe siècle ? Qui, en Afrique, a jamais songé à réclamer une telle indemnisation ?

Et l’impact de l’Afrique sur la culture européenne, sur la littérature, d’Alexandre Dumas à Alexandre Pouchkine[1] ? Les romans, pièces, récits de voyages et d’aventures, essais, films, tableaux inspirés par l’Afrique ?

Qu’on vide tous les musées du monde, toutes les bibliothèques de la terre de tout ce qui, de près ou de loin, rappelle l’Afrique. Qu’on vide tous les magasins, toutes les librairies, toutes les pharmacies, tous les zoos, toutes les cages, tous les étals, tous les marchés, tous les jardins du monde de ce qui évoque l’Afrique ! Qu’on gomme du vocabulaire tout ce qui de près ou de loin, se rapporte à l’Afrique ou aux Africains !

Qu’on arrache enfin des manuels d’histoire, des dictionnaires ou des ouvrages de littérature, partout dans le monde, les pages évoquant l’Afrique !

Et sans compter le sang des Africains répandu sur tous les champs de bataille du monde du IXe au XXe siècle. L’Afrique a fécondé le monde de la sueur et du sang de ses fils autant que de ses ressources.

L’Afrique, c’est le monde.

(Tidiane Diakité, Appel à la jeunesse africaine, L’Harmattan)

 



[1] Alexandre Dumas : écrivain français, né à Villers Cotterêts en 1802, mort à Puys près de Dieppe en 1870. Le plus populaire des écrivains français de l’époque romantique.

Alexandre S. Pouchkine : écrivain russe, né à Moscou en  1799, mort à Saint-Pétersbourg en 1837. Fondateur de la littérature russe moderne.

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31 juillet 2011 7 31 /07 /juillet /2011 08:13

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Pour comprendre l'offense, retour sur soi-même


 « Lorsque tu es offensé par l'impudence d'un homme, demande-toi aussitôt : « Se peut-il donc qu'il n'y ait pas d'impudents dans le monde ? » Cela ne se peut pas. Ne réclame donc pas l'impossible, puisque cet homme est l'un de ces impudents qui nécessairement se trouvent dans le monde. Sois prêt à te poser la même question devant un scélérat, un fourbe ou tout autre coupable. En te rappelant, en effet, qu'il est impossible qu'il n'existe pas des gens de cette sorte, tu deviendras plus indulgent pour chacun d'eux.

Il est utile encore de songer aussitôt à la vertu que la nature a donnée à l'homme pour remédier au vice que tu découvres. Comme antidote, en effet, contre l'ingratitude, elle a donné la bonté, et contre un autre défaut, une autre perfection. Et, somme toute, il t'est toujours loisible de ramener celui qui s'égare, car tout homme qui commet une faute s'écarte du but et s'égare.

Et puis, en quoi t'a-t-il lésé ? Car tu ne trouveras pas un seul de ces hommes contre lesquels tu t'exacerbes, qui ait pu te causer un dommage tel que ton âme en eût été rendue pire, et pour toi le mal et le dommage n'ont leur absolue consistance que là. Est-ce donc un malheur ou une étrangeté qu'un ignorant fasse acte d'ignorant ? Examine si tu ne dois pas plutôt t'accuser toi-même de n'avoir point prévu que cet homme commettrait cette faute. Ta raison, en effet, te fournissait des motifs de penser qu'il était vraisemblable que cet homme commettrait cette faute, et cependant, pour l'avoir oublié, tu t'étonnes de ce qu'il l'ait commise !

C'est surtout lorsque tu reproches à un homme sa déloyauté ou son ingratitude, qu'il faut faire ce retour sur toi-même. Car c'est ta faute évidemment, si tu as présumé qu'un homme de ce caractère garderait sa foi, ou si, en lui rendant service, tu ne l'as point obligé sans réserve, ni de façon à retirer aussitôt de ton action même tout son fruit. Qu'exiges-tu de plus, si tu as fait du bien à quelqu'un ? Ne te suffit-il pas d'avoir agi selon ta nature, mais cherches-tu encore à en être payé ? C'est comme si l'œil exigeait une récompense pour voir, et les pieds pour marcher. De la même façon, en effet, que ces membres ont été faits pour une fonction déterminée et qu'en agissant selon leur propre constitution ils remplissent le rôle qui leur est particulier, de même l'homme, né pour la bienfaisance, lorsqu'il accomplit quelque action bienfaisante, ou simplement s'il aide son prochain en des choses ordinaires, agit conformément à sa constitution et atteint sa fin propre. »

Marc-Aurèle (121-180), Pensées.

 

A méditer et à discuter

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27 juillet 2011 3 27 /07 /juillet /2011 08:52

      etoile_110.gif Nafissatou Diallo, l'affaire aux multiples symboles africano-africains

        Vu du côté africain, c'est plutôt l'affaire Nafissatou Diallo que l'affaire DSK.

        J'en tire quelques enseignements qui n'ont aucun rapport avec l'aspect purement judiciaire, ne pouvant me prononcer d'une quelconque manière sur le fond.

         Le premier enseignement porte sur la solidarité au sein de la population guinéenne, qu'on peut élargir à la solidarité en Afrique en général, au sein des Etats et entre les Etats.

      En Guinée, si l'on en croit plusieurs sources, l'affaire Nafissatou Diallo met à nu le clivage ethnique entre Malinkés et Peuls, qui suinte des propos de nombre de Guinéens, tels ceux relevés dans le quotidien Le Monde :

     "L'origine peule de Mme Diallo nourrit la plupart des commentaires, surtout depuis que des doutes sont apparus sur son témoignage. Les attaques contre la jeune femme résonnent en effet comme en écho à la campagne électorale largement antipeule, menée l'an passé par Alpha Condé, premier chef d'Etat guinéen à être élu démocratiquement en novembre dernier.

         L' "Affaire Nafissatou" (plutôt que l'Affaire DSK) divise donc les Guinéens selon des clivages ethniques et de sexes. Il n'est que de tendre l'oreille dans un restaurant, d'interroger des responsables politiques ou simplement l'homme de la rue à Conakry pour le confirmer.

       Leur compatriote est décrite soit comme une manipulatrice qui fait honte à leur pays, soit comme une femme victime d'un homme puissant et de la justice des riches." (Le Monde, 8 juillet 2011).

       La question ethnique s'immisce ainsi dans le débat et entrave toute analyse impartiale et rationnelle. Même pour un sujet de cette nature, la solidarité entre Guinéens est prise en défaut. Ce cas particulier ouvre un large champ d'analyse sur la nature et la réalité de cette solidarité africaine érigée en principe intangible.

     Dans cette crispation ethnique , permanente ou sporadique (dont jouent certains chefs d'Etat africains pour consolider leur pouvoir et s'imposer), qui caractérise un nombre relativement important d'Etats africains, réside l'une des faiblesses majeures de ces Etats, minés par le conflit latent "identité nationale/identité ethnique". Les Etats les plus avancés sur la voie de la démocratie (voire du développement) sont, à bien des égards, ceux au sein desquels la question ethnique a perdu de son acuité ou de sa virulence corrosive.

          L'absence de cohésion des populations due à cette fracture ethnique expliquerait-elle le manque de solidarité entre les Etats du continent, justifiant par là-même la vulnérabilité excessive de ce dernier ainsi que sa dépendance chronique vis-à-vis de l'extérieur ?

        Le deuxième enseignement découle du regard porté sur la femme en Afrique. A cette question de l'envoyé spécial du Monde dans la capitale guinéenne au frère aîné de Nafissatou Diallo : "Alors qu'une telle révélation risque de briser sa vie, pourquoi a-t-elle saisi la justice ?" Ce dernier répond :

      "Parce qu'ici, c'est l'Afrique : il n'y a pas de respect de l'être humain. Des millions de viols sont commis mais personne n'ose en parler. Si ma soeur avait dit ici qu'il lui était arrivé ça avec un "boss", elle aurait été tuée, jetée dehors ou traitée de prostituée... Ici, en Afrique, les gens ont tellement besoin d'argent que les riches peuvent mentir et être crus..." avant de préciser "chez nous, ce sont les hommes qui décident, pas les femmes."

        Les conclusions de cette réponse sont lourdes de sens : pas de respect de la personne humaine, et, en Afrique, seuls les hommes décident. Les femmes sont ainsi sans défense face aux violences, surtout celles émanant de riches et de puissants, ce qui, à n'en pas douter, constitue une autre source des difficultés de l'Afrique à émerger. Et c'est ce sort réservé à la femme en général qui est de loin le plus préoccupant.

       Comment l'Afrique peut-elle avancer si la femme n'avance pas ? Si elle est privée des droits élémentaires dont celui de la protection de sa personne ?

        Comment la femme peut-elle avancer si elle forme le gros du cortège des analphabètes, des oubliés de l'éducation et de la formation ? Car malheureusement les propos de M. Diallo trouvent leur confirmation dans le premier rapport de l'ONU femmes récemment rendu public, et qui met en évidence les "violences domestiques et les discriminations en tous genres"... dont sont victimes les femmes. Ce rapport préconise l'adoption de "réformes juridiques pour inverser la tendance".

       L'aspect le plus saillant de ce rapport concerne en effet les inégalités dans l'accès à l'éducation et à la formation. La carte mondiale des inégalités et le document sur le sida ci-dessous (Voir Jeune Afrique, 10-16 juillet 2011) sont loin d'être favorables aux Africaines.

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        Comment, au vu de ces documents, ne pas établir un rapport de cause à effet entre la place de l'Afrique sur l'échiquier mondial, celle qu'elle occupe dans le classement du monde et la condition de la femme ?

           Même s'il faut par ailleurs se réjouir d'une timide représentation féminine en politique dans certains Etats comme le Rwanda, où 51% des élus et la moitié des juges de la Cour suprême sont des femmes, d'une manière générale, pour l'ensemble du continent, le chemin du progrès social reste encore long.

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