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14 avril 2024 7 14 /04 /avril /2024 09:53

Sophie Taeuber-Arp
Deux cercles, deux plans et lignes croisées

 

****

LA VISION DE L’ART DE GOTTFRIED HONEGGER

DANS SA LETTRE À SOPHIE TAEUBER

Sophie Taeuber-Arp sur le billet suisse de 50 francs.

*

Dans cette lettre Honegger aborde plusieurs aspects de l’art, l’art et l’argent, l’art dans le temps, l’art créé par des femmes, le combat des artistes…

 

***

 

« Très chère,

Hier à Zurich, on m'a rendu dans un magasin un billet sur lequel, chère madame, était gravé votre portrait... j'aimerais savoir par curiosité : vous a-t-on demandé votre permission ? Personnellement je trouve ce pseudo-hommage sur un billet suisse plus que discutable. D'autant que, jusqu'à présent, on n'a pas été tellement tendre avec vous dans ce pays. On vous a supprimé votre poste de professeur à l'École des arts décoratifs de Zurich, parce que vous étiez membre du Cabaret Voltaire. Ne l'oublions pas, dada était mal vu dans notre ville. Et voilà qu'on vous utilise pour faire honneur à la Suisse.

J'ai demandé à la vendeuse si elle savait qui était Ia dame sur le billet. La réponse fut : « Non, pas Ia moindre idée ». Elle ne connaissait pas non plus les autres « honorés » : Le Corbusier, Arthur Honegger, Alberto Giacometti — pour elle, tous des inconnus. Je trouve que la banque nationale devrait au moins fournir un minimum d'explication. Vraiment — notre culture de l'argent ne connaît plus de bornes. Aujourd'hui l'art est tout juste bon à servir de feuille de vigne à notre société de divertissement. L'art comme public relations. D'autant que vous ne réussissez à vendre que peu ou aucune de vos œuvres en Suisse. C'est Paris, Ia France qui vous a accueillie, tout comme Le Corbusier, Honegger, Giacometti qui tous y ont vécu et travaillé. C'est l'étranger qui vous a fait crédit, a reconnu l’importance de votre œuvre. À propos de reconnaissance : lorsque votre mari, Jean Arp, a voulu devenir citoyen dans notre Suisse, à Wegis au lac des Quatre-Cantons, sa demande a été rejetée. Les artistes deviennent trop souvent des assistés — une charge pour la commune.

De tels incidents et la situation pas brillante de l’art en général ont conduit mon ami Herbert Read, un incorruptible, à faire dans une lettre ce pénible constat : « Les artistes mènent un combat perdu d'avance dans notre civilisation technique et je ne vois pour eux aucun espoir. Le poète est devenu un anachronisme. Même un clown a plus de valeur que lui : il amuse ».

C'est ainsi et pourtant nous devons continuer à travailler, continuer à espérer, continuer à rêver. Qui sait, chère Madame, peut-être cette résistance publique nous rendra plus forts, nous endurcira. Parce que telle est la situation aujourd'hui, le courage d'éclairer, d'agir reste notre mission.

Notre société ne se sent bien que dans le passé. Là où ne se pose plus aucune question, où il n’y a plus d'inconnu. Le passé est comme une paire de lunettes de soleil qui rendrait supportable le présent aveuglant. Cette fuite hors de notre époque est pour moi un signe alarmant de résignation. On ne croit pas aux valeurs du présent.

Tiré d'un livre de Karl Gerstner, Les artistes et la majorité : « Finalement ça ne nous aide pas d'exorciser le passé. Nous n'avons plus besoin de Saint-Pierre de Rome... Il devrait être possible en esprit et avec les matériaux actuels d'atteindre au moins un niveau comparable à celui du passé et à l'héritage, et d'instaurer pour le présent : la culture avec des aspects entièrement démocratiques ».

C'est justement ce point de vue que personne ne veut aujourd'hui admettre. Or cette vérité est pourtant le sens profond de tout art.

Vous êtes en outre marginalisée parce que vous êtes une femme. À l'art des femmes colle toujours le soupçon d'« ouvrage de dame ». Ce qui a pour conséquence que les artistes femmes veulent trop souvent se donner des allures masculines. Mais laissons cela. Vos tableaux n’ont rien à voir avec cette question. Ils sont simplement là, l’art dans sa forme la plus pure. J’ai vu hier, ici, à Paris quelques-uns de vos travaux. J'ai été étonné de votre façon souveraine de donner à l'art concret une impulsion nouvelle et surprenante. En partant de l’angle droit, vous ouvrez la voie à un monde de liberté, un monde riche de possibilités d’expression insoupçonnées.

Amicalement. »

 

Sophie Taeuber-Arp (1889-1943)

 

--> Qui était Sophie Taeuber ?

Brève biographie

Sophie Taeuber (Sophie Henriette Gertrude) est une artiste, peintre, sculptrice et danseuse suisse, naturalisée française. Elle est née en 1889 à Davos (Suisse) et morte en 1943 à Zurich.

De père allemand et de mère suisse allemande, Sophie grandit dans un milieu où l’art est présent dans la vie de tous les jours.

À Saint-Gall, elle apprend le dessin décoratif et les techniques de la broderie et de la dentelle, puis étudie dans les « ateliers expérimentaux » de Hermann Obrist et de Wilhem von Debschitz, à Munich, où elle se forme à toutes les disciplines artistiques, y compris au travail sur bois et à l’architecture. En 1912-1913, elle apprend également le tissage à l’École des arts décoratifs de Hambourg. (Archives of women artists research).

Elle découvre la danse d’expression grâce à son amie Mary Wigman.

En 1915 elle s’installe à Zurich et rencontre Jean Arp, qu’elle épouse en 1922, et sera désormais connue sous le nom de Sophie Taeuber-Arp. Elle participe avec lui au mouvement dada.

Sophie Taeuber dit du mouvement dada : « Le mouvement dada est compliqué à expliquer, c’est même presque son but ! Il se compose de pièces de théâtre bruyantes, de lectures de poèmes qui n’ont aucun sens… De manière plus générale, dada est un mouvement mené par des artistes contre la bourgeoisie. Ces artistes protestent contre la culture de la société qui a, selon eux, mené à l’effroyable première guerre mondiale. »

1925 : Sa participation à l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes la conduit à Paris, où le couple, qui obtiendra la nationalité française l’année suivante, côtoie les surréalistes. Leur maison-atelier devient, de 1929 à 1939, un foyer de rencontres artistiques internationales.

Grâce à son talent de danseuse, elle va danser au Cabaret Voltaire de façon anonyme car en même temps elle enseigne à l’École des arts appliqués de Zurich (1916-1929).

Pendant cette période elle réaliste une série de Têtes Dada qui font partie de ses œuvres les plus célèbres.

1927-1928, le couple s’installe à Clamart. Leur maison-atelier devient un foyer de rencontre artistiques internationales, de 1929 à 1939.

Elle rejoint les associations Cercle et Carré et Abstraction Création.

(1937-1939), S. Taeuber édite la revue multilingue Plastique jusqu’à la veille de la guerre. Elle est très concernée par la politique et essaie de renouer les liens entre les artistes dispersés.

Son mari et elle s’installent à Grasse, lors de l’exode ; là, ils réalisent des dessins à quatre mains avec Alberto Magnelli et Sonia Delaunay, dessins qui manifestent leur opposition au fascisme.

Le couple projette de s’installer au États-Unis, mais c’est un échec. Ils se réfugient alors en Suisse (novembre 1942).

1943, Sophie Taeuber meurt en 1943 peut-être « intoxiquée par le monoxyde de carbone émis par un poêle à gaz défectueux. » (Wikipédia) ou selon Gabriele Mahn « Sa mort reste une énigme »

Sophie Taeuber-Arp
Quatre espaces à croix brisée (1932)

Brève biographie de Gottfried Honegger : voir articles du blog :

  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Jean Arp (13-10-2021)
  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Léonard de Vinci (20-04-2022)
  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Sonia Delaunay (19-03-2023)

Gottfried Honegger (1917-2016)

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30 mars 2024 6 30 /03 /mars /2024 08:32

LA VIE EN VERS

Un très beau poème de Sandrine Mage, poétesse contemporaine, sur l’éphémère de la vie.

(http://stereen.over-blog.com/2022/04/le-temps-qui-passe.html)

 

Et puis, plus rien...

Il y avait ce fruit juteux sur l’arbre de la vie

Que j’ai croqué un soir d’été, d’un élan rassuré ;

Il avait la peau douce et le cœur plein d’envies

Et le goût passionnel des caresses effleurées.

 

Il y avait cette fleur dans le nid de l’amour

Qui s’est envolée en lâchant ses pétales,

Libre, dans le souffle d’un nouveau jour,

Sereine, sur un chemin inspirant le graal.

 

Il y avait ces douleurs qui resteraient à quai

Quels que soient les efforts, les gestes, les pardons,

Les combats dans le vent que les nuits ont pleurés,

Les forces bâillonnées dans un cri d’abandon.

 

Il y avait toutes ces couleurs habillées d’éphémère,

Qu’on aurait voulu protéger dans un écrin ;

Il y avait tous ces rêves qui cherchaient la lumière,

Suspendus à l’horloge du temps, et puis... plus rien...

                                              (Sandrine Mage, Texte primé au concours de poésie, Commune de Beynat 19 Juin 2022- Thème « L’Ephémère »)

 

 

¤ Qui est Sandrine Mage ?

SANDRINE MAGE est originaire du Ségala côté Paternel et de Rocamadour, côté maternel; elle habite à Loubressac. Autrice contemporaine, elle aime les mots et écrit surtout de la poésie.

Poétesse, écrivaine, elle est aussi animatrice culturelle, créatrice de spectacles, conteuse, aussi bien pour les enfants que pour les adultes, notamment dans les EHPAD.

Elle n’a de cesse de découvrir de nouveaux  "territoires"  littéraires.

Elle vient de sortir mon 3è recueil de poésies "Brûlants Souvenirs" qu’on peut découvrir sur son blog :  http://sandrineartiste.centerblog.net/

Ce 3e recueil réunit quelques textes de ses deux précédents recueils qu’elle ne peut plus éditer et une quarantaine de poèmes inédits. Sandrine Mage dit à propos de ce recueil :

« Mes lecteurs me réclamaient quelques vers poétiques et mes précédents recueils étant épuisés, j’ai concocté cet ouvrage en attendant le prochain projet qui se voudra plus original. »

Pendant 8 ans et jusqu'en 2023 elle a été présidente de la Délégation Lotoise de la Défense de la Langue Française.

Maintenant elle a créé sa propre Compagnie : La plume de Sand, avec laquelle elle propose différents spectacles (Poétiques et musicaux, des spectacles de Noël...) et animations notamment en Ehpad.  (http://laplumedesand.fr/)

 

***

Ses ouvrages:

- Les mots pour le dire, 2006- Poésies
- Contes de Noël, 2010- Contes illustrés pour la jeunesse
- Les maux du poète, 2012- Poésies
- Un coquelicot sur un oreiller, 2018- Roman
- Entre Douceur et Tendresse- 2021Contes illustrés pour la jeunesse 
- Brûlants Souvenirs, mars 2024- Poésies

 

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10 mars 2024 7 10 /03 /mars /2024 09:36

 

LA LANGUE FRANÇAISE

 

 

Voici écrite par Marcel Arland une analyse de notre langue, la langue française, une langue riche et belle.

 

****

 

« Parmi les caractères que l'on a le plus souvent et le plus justement attribués à la langue française, je crois que la clarté vient en premier lieu. Cette clarté qui faisait dire à Brunetto Latini, le maître de Dante, que, s'il usait non de l’italien, mais du français, c'est que le français était, de toutes les langues, non seulement la plus « délectable », mais, par sa clarté, la plus compréhensible, la plus « commune à toutes gens », la plus propre aux échanges de l’esprit. Et tel est bien le rôle que le français a longtemps joué, au XVIIIe siècle surtout, quand il était devenu la haute langue de l'Europe. On sait que cette prédominance s’est aujourd’hui effacée devant celle de l'anglais ; on sait que le caractère d’universalité que l’on reconnaissait à notre langue se trouve fort discuté et combattu. Est-ce à dire que ce caractère ait disparu ? Je ne le crois point. Je tiens notre prose, telle qu’elle se manifeste encore aujourd'hui, à ses bonnes heures, pour une école où toute autre prose peut trouver sinon une leçon, à tout le moins un contrôle. Je Ia tiens pour une école de portée universelle, au même titre que notre peinture.

*

Cela dit, reconnaissons que cette fameuse clarté s'est altérée. Non point que nous manquions, même aujourd'hui, d'une forme claire et jusqu’à la transparence. Mais il en va de la langue comme du roman ; un roman au ton pur, un roman que la philosophie, la science, la politique n'ont pas envahi, roman-roman, un roman qui ne propose rien d'autre que lui-même, mais qui met là sa justification et son orgueil, — eh bien, ce roman est aujourd'hui assez dédaigné, à tout le moins suspect ; suspect de conformisme et de pauvreté. De même pour la forme ; si elle est claire, apparemment aisée, si elle ne pose pas de problèmes (ou plutôt n'en semble pas poser), elle n'attire pas l'attention, elle ne semble pas assez moderne, on la traite en parente de province. Comme si l’aisance était synonyme de facilité ; comme si la clarté et la transparence étaient synonymes de vide et de fadeur. II n'est pas de transparence sans mystère intime ; il n’est pas de plus pur secret —et qui toujours s'entretient, se nourrit, se renouvelle — que celui d'une forme de claire apparence, quand elle vient d'un écrivain véritable.

*

On ne saurait parler de clarté sans parler de construction. La construction régulière de notre langue peut apporter à la fois une aisance et un frein. Vous vous rappelez que Fénelon déplorait un peu cette régularité, qui engendre la monotonie. Je ne vois pas toutefois que nos grands écrivains n'aient su la plier à leur génie propre : un Pascal (c'est, il est vrai, le plus grand de nos écrivains, et le plus complet), un Fénelon lui-même à ses grandes heures (aux heures de combat ou de révolte), bien entendu, un Rabelais, un Saint-Simon, un Michelet. Mais il me semble que la construction de notre langue, très forte encore chez Victor Hugo, et même un peu trop apparente, un peu ostentatoire et redondante, a perdu, non seulement de sa régularité, mais de sa vigueur...

*

Si l'on parle des rapports de la littérature et de la langue contemporaines comment esquiver la fameuse question de la grammaire et de la syntaxe, le fameux problème de la correction ? La grammaire est une institution nationale ; les journaux littéraires et même les autres ont des tribunes de grammaire, des consultations grammaticales ; les lecteurs questionnent et les professeurs répondent : « Est-ce que Giono a raison d'écrire Je m'en rappelle ? — Non, il a tort ». « Et Gide, quand il écrit malgré que ? Eh, eh ! on ne peut pas dire qu'il ait raison, étant donné qu'il ne s'agit pas de l'expression malgré que j’en aie ». « Et François Mauriac, quand il écrivait dans La Table ronde en 1952 : Cela s'est avéré faux ? —Mauriac ! ah ! diable Mauriac ! Nous vous répondrons un autre jour ». Etc. Et de toutes ces réponses on fait des livres ; et sur les livres des articles. C'est un jeu plaisant, mais tout compte fait, assez vain. On peut estimer sans doute qu'il existe un certain nombre d'erreurs dont tout écrivain doit se garder. Sans doute encore est-il bon et nécessaire que quelques écrivains usent d'une langue aussi pure que possible. Mais si, pour critère de correction, on prend l'usage ancien, faut-il absolument négliger l’usage qui tend à s'établir, qui se forme sous nos yeux ? Il me semble que le principe le plus sage est celui-ci : quelque considération que l'on ait pour l’usage — et j’entends l'usage des bons écrivains — il n'est de fautes vraiment graves que celles qui menacent l’esprit de notre langue...

*

Brice Parain, dans un essai qu'il me communiquait voilà quelques jours, déclare que l’une de ses plus fortes raisons d'espérer, c'est de voir qu'un langage commun est en voie de formation dans notre littérature, un langage qui échappe à une littérature trop savante ou trop éprise de son jeu, pour devenir entre tous les hommes l'instrument fondamental de l'union.

*

Cette tendance existe, elle est forte, elle est naturelle, elle se développe. Naturelle, donc légitime. Et l'on voit bien que, si notre littérature s'y ferme de parti-pris, elle court le risque de dessécher notre langue et de la séparer à jamais du langage populaire. Mais l'on voit aussi que, si elle s'y abandonne, notre langue va perdre, ou du moins altérer, ses caractères les plus précieux : élégance, clarté, précision, rigueur, harmonie, et force dans la délicatesse.

*

La position que nous choisissons est celle de l'extrême milieu ; elle peut sembler facile, elle ne l’est pas ; elle l'est moins que jamais aujourd'hui. Nous souhaitons que notre langue se renouvelle sans se perdre ; nous souhaitons l'expérience, mais aussi le contrôle. Je précise. Qu'il y ait chez la plupart de nos écrivains une bonne et belle langue, sans recherches trop savantes ou trop hardies, mais sans complaisance à l'égard des lecteurs de nos magazines et de nos auditeurs de la radio : voilà ce qui constituera le gros de nos forces et le plus constant. Que certains écrivains d'autre part fassent résolument appel à un langage plus libre, plus populaire, débraillé à l'occasion, je l'admets fort bien et le trouve utile — tout en remarquant qu'il n'est pire littérature littéraire et littératurante que celle des sans-culotte. Je l’admets donc, mais c'est à condition qu'en face d'eux et à I ‘opposé la France connaisse cette équipe, ces écoles, ce laboratoire, qu'elle a toujours connus et qui ont fait la souveraine qualité de notre langue, soit qu'il s'agisse de raffinement, soit d'audace.

*

Mais je sens bien que cette équipe elle-même, dont le rôle me paraît capital et absolument nécessaire, je sais que l'on peut être parfois inquiet de l’action qu'elle exerce sur notre langue. Oui, l'on pourrait dire que toute littérature originale, toute nouveauté, tout apport, remet en jeu l'état d'une langue. On pourrait prétendre, bien plus, que toute originalité est une maladie, que tout style est une maladie, et qu'ils imposent ou proposent à Ia langue une maladie. Une langue ne peut rester absolument intacte, à la venue d'un esprit, d'une sensibilité et d'un art nouveaux. Il n'est pas jusqu'au sens des mots, qui plus ou moins ne se modifie ; et non point parce que l'écrivain le veut ainsi, d'une façon orgueilleuse ou perverse, mais parce qu'il ne peut pas faire autrement s'il veut être lui-même ; parce que le mot « arbre » ou le mot « ciel » ont dans son cœur un sens particulier, et que, s'il est vraiment un artiste, ce sens original passera dans son œuvre et se manifestera, soit par l'accent particulier et la valeur particulière que lui donne sa place dans la phrase, soit par l'éclairage qu'il reçoit des mots voisins. Qu’on le veuille ou non, c'est la loi de l'œuvre d'art. Eh quoi I Est-ce qu'avec Joinville, avec Commynes, avec Rabelais, avec Amyot, Bossuet, Pascal, Saint-Simon, Rousseau et tant d'autres, la langue française n'a pas changé ? Ce qui nous apparaît aujourd'hui comme une évolution naturelle et quasi fatale fut souvent tenu à l'origine pour une altération et même un sacrilège. On disait de Marivaux, en son temps, qu'il était illisible à force de charabia ; il me semble qu’on le lit beaucoup aujourd'hui. On a dit de Ramuz qu'il n'écrivait même pas la langue d’un canton ; il me semble que cette langue a dépassé les limites de plus d'un canton.

*

Nous ne voulons point d'une langue abâtardie, certes, et complaisante ou raccrocheuse. Mais nous ne voulons point d'une langue morte, ou qui se meure. Ce qui est à proscrire, c'est la nouveauté qui ne vise qu’au jeu, à l’étonnement du badaud (et que de badauds dans les cercles avertis !) ou au scandale. C’est la nouveauté qui renie l'esprit profond d'une langue. Car, ici encore, le critère, c'est le génie de la langue, et Dieu sait combien il peut nous apparaître complexe et accueillant, habile à faire son miel ; combien il y a de chambres dans la maison du Père ! une langue ne vit qu'en se renouvelant ! mais on ne la renouvelle valablement que par l'amour, par toutes les formes et les nuances de l'amour. Je ne crois pas que jamais une langue ait mérité plus d’amour que la nôtre. »

                                                                             (MARCEL ARLAND, in Cinq propos sur la langue française, (Fondation Singer-Polignac, 1955))

I

Marcel Arland (1899-1986)

¤ Marcel Arland

Marcel Arland est un écrivain, essayiste, critique littéraire et scénariste français. Il est né en 1899 à Varennes-sur-Amance et mort en 1986 à Saint-Sauveur-sur-École. Il est issu d’une famille de petite bourgeoisie rurale.

À trois ans il perd son père et est élevé par sa mère et ses grands-parents. Sa mère, veuve inconsolable, en oublie l’amour maternel pour ses deux fils.

Cette conscience d’être orphelin et de la figure absente de son père mais aussi de sa mère, marque son œuvre.

Il fait de brillantes études au collège de Langres, puis à la faculté la Sorbonne, à Paris (1919).

Il enseigne au collège de Jouy-en-Josas de 1924 à1929.

Responsable de la partie littéraire de la revue de l’Université de Paris, il y publie ses premiers textes. De grands noms d’écrivains collaborent à cette revue : Proust, Mauriac, Cendrars, Giraudoux.

Marcel Arland commence sa carrière dans la révolte et la contestation de la société suite au désordre provoqué par la Première Guerre mondiale et face aux injustices sociales.

1920 : il adhère au dadaïsme et fonde la revue d’avant-garde Aventure.

Il fréquente Dhôtel, Vitrac, Crevel, Limbour. Il fait aussi la connaissance d’André Malraux.

En 1924 il publie dans La Nouvelle Revue française (NRF).

1929, il reçoit le prix Goncourt pour l’Ordre (long roman de formation (Bildungsroman), seul vrai roman qu’il écrira et dont le héros, Gilbert, est une sorte de Rimbaud des années 1920. Il collabore de plus en plus à la NRF sauf durant l’Occupation où il se retire dans sa maison de Brinville, près de Paris où il vit en reclus, écrivant des essais.

1930, il épouse Jeanine Béraud, tante maternelle de Michael Lonsdale.

Après la Libération Arland déploie une grande activité critique et une attention particulière aux jeunes talents.

1952, Arland reçoit le Grand Prix de la Littérature de l’Académie Française

1953 : Il partage avec Jean Paulhan, la direction de la Nouvelle NRF et à la mort de ce dernier, assurera seul cette fonction jusqu’en 1977.

1960, Arland reçoit le Grand Prix national des Lettres.

1968, il entre à l’Académie française

1986 : Arland meurt subitement dans sa maison de Brinville, au mois de janvier, et son épouse meurt la même année en octobre.

Ses manuscrits et sa correspondance ont été légués à la bibliothèque littéraire Jacques Douvet.

 

*

Quelques-unes de ses œuvres

Essais    

-Anthologie de la poésie française (1942)

-La Prose française : anthologie, histoire et critique d’un art (1951)

-Proche du silence, mémoires (1973)

-Terres de France, essai sur la paysannerie

...

Fictions

-Terres étrangères (1923)

-Les Âmes en peine (1927)

-L’Ordre (1929)

-Les Vivants (1934)

-Sur une terre menacée (1941)

-Zélie dans le désert (1944)

-Il faut de tout pour faire un monde (1947)

-La consolation du voyageur (1952)

-L’Eau et le feu (1960)

-Le grand Pardon (1965)

-La musique des anges (1967)

 

 Réflexions

On remarque l’évolution de la langue française tout au long des années, des siècles, et c’est une bonne chose. Une langue doit rester vivante sinon elle disparaîtra.

Des mots nouveaux apparaissent, apportés par l’évolution de la société, des sciences, les nouveaux métiers… Des mots inventés par les jeunes pour se différencier des parents, ne pas toujours être compris par ceux-ci : verlan, argot à l’école…

Puis il y a les apports étrangers grâce aux voyages de plus en plus aisés, lointains, fréquents ; les déplacements des différentes populations, immigration…

Notre langue s’enrichit.

Si elle n’est plus la langue universelle du 18e siècle, elle reste parlée dans beaucoup de pays et régions du globe.

 

Mais attention : si nous limitons le nombre d’étudiants étrangers qui propagent notre langue, celle-ci risque à plus ou moins longue échéance, de se « ratatiner », de ne plus être parlée qu’en France. Elle perdra de son aura et notre pays également.

Attention aussi à l’utilisation trop fréquente de termes anglais.

-Beaucoup de chanteurs français (les jeunes surtout) chantent en anglais malgré le fait que bien des Français ne comprennent pas leurs chansons et donc ne les écoutent pas, ne les connaissent même pas.

-Les nouvelles entreprises prennent des noms anglais, peu attractifs pour la majorité des Français.

-Beaucoup de journalistes, de personnes publiques… utilisent des termes anglais (par snobisme ou est-ce par ignorance ou pauvreté du vocabulaire français ?) alors qu’il existe l’équivalent en français.

 

Et vous, chères lectrices et chers lecteurs, que pensez-vous de notre langue, de son évolution, de sa place dans le monde, de son avenir ?

 

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11 février 2024 7 11 /02 /février /2024 08:47

 

LES FEMMES DANS L’HISTOIRE

LEUR PUISSANCE

UN MOUVEMENT DE FEMMES PEU CONNU

LES BÉGUINES

 

Béguinage Saint-Vaast, Cambrai

 

¤ QUI ÉTATIENT LES BÉGUINES ?

Le béguinage, c'est d'abord l'invention, dans la Flandre du XIIe siècle, d'un nouveau mode de vie : pour la première fois, des religieuses mettent en place des communautés laïques de femmes en dehors des murs des monastères ou des couvents. Ces femmes, souvent veuves ou célibataires, adhèrent à certaines règles monastiques sans pour autant former de vœux perpétuels : elles restent donc indépendantes de l'Église. Elles étaient, bien souvent, cultivées et enseignaient dans des écoles attenantes au béguinage ou prodiguaient des soins dans les hôpitaux.

 

Elles vivent, en général, dans des maisons individuelles regroupées autour d'une église, un peu en marge des villes, comme à Louvain ou à Malines (Belgique). L’élaboration de ce nouveau mode d'existence est en partie liée à la conjoncture historique : les croisades, qui ont lieu jusqu'en 1291, ont conduit à une surpopulation féminine en Europe. Beaucoup de femmes, qui ne peuvent fonder un foyer, se tournent vers la religion. Mais les couvents sont pleins. Seule solution : amener la religion dans le monde laïc, à la manière des ordres mendiants (franciscains, dominicains, etc.) qui se développent à la même époque.

Les béguinages sont régis par des principes d'autogestion, de solidarité et d'entraide. « C'est une sorte de démocratie avant l’heure. Il n’y a pas de mère supérieure, juste une "Grande Dame" élue pour quelques années. De même, chaque béguinage édicte ses propres règles, toujours modifiables. » (Silvana Panciera, sociologue et auteure de Les Béguines, Fidélité, 2oo9).

Élisabeth de Hongrie (canonisée en 1235), de par sa position sociale, joue un rôle important à partir de 1227 en créant une émulation. Elle décide de soulager la misère des femmes seules en s’appuyant sur les hôpitaux. Mais ce lien hospitalier ne dure pas et les communautés deviennent indépendantes.

Cette indépendance des béguines, qui s'affranchissent de la domination masculine, est perçue d'un mauvais œil par les autorités ecclésiastiques. D’abord critiqués par Latran II, les béguinages sont encouragés par le pape avant que les religieuses laïques soient condamnées pour fausse piété et hérésie par le concile de Vienne de 1311. Le mouvement disparaît presque totalement, sauf en Flandre, où il est toléré.

La dernière béguine est morte le 14 avril 2013 à Courtrai en Belgique.

(Des béguinages d’hommes sont aussi apparus vers le 12e siècle, ces hommes étaient appelés béguards.)

 

Sacerdos libera sive Beguina, par Amman Jost, gravure sur bois, 1585. Bibliothèque municipale de Lyon

 

¤ LES BÉGUINES EN FRANCE

Ailleurs, en Europe, des béguinages s’installent aussi (Suisse, pays du Nord…) et même en France.

 

En France, c’est Saint Louis qui apporte une protection aux béguines. Il « leur a offert le terrain du béguinage de l’Ave Maria, dans le Marais, en 1264, et il les a protégées contre les critiques rencontrées par cette nouvelle forme de vie : des femmes qui, ayant fait le vœu de chasteté et le vœu d’obéissance à l’abbesse — élue — menaient une vie de prière en commun et sortaient pour travailler, sans autre habit commun que leur manteau à capuchon de béguine. Elles étaient connues pour leur charité envers qui frappait à leur porte. » (Lucetta Scaraffia, Femmes dans l’Église : « Comment les béguines ont disparu »)

En effet, à son retour de la 7e croisade, Saint Louis rencontre Hugues de Digne, frère franciscain qui lui enjoint de veiller sur les pauvres comme à la simplicité de sa vie. Louis IX se fait protecteur des ordres mendiants.

Hugues de Digne avait une sœur béguine, Sainte Douceline, autour de laquelle s’était constitué le béguinage, les « Dames de Roubaud ». Philippa Porcelet, proche disciple de Douceline, écrit en langue occitane (1297) une vie de Sainte Douceline. (Ernest Renan, considère cette œuvre comme un chef-d’œuvre en prose de la première littérature provençale).

Donc en 1264, comme dit plus haut, Louis IX installe une communauté de béguines à Paris qui comptera jusqu’à 400 béguines. Parmi les tâches quotidiennes des béguines de Paris, figuraient l’alphabétisation de jeunes et le soin aux pauvres.

Cependant la liberté de ces femmes est vue comme un danger par les théologiens de l’Université de Paris qui les considèrent comme « illettrées », ne maîtrisant pas le latin, qui était la langue de l’autorité ecclésiastique. Mais, plus grave, elles écrivaient en langue vernaculaire qui selon Gilbert de Tournai « transmettaient des « subtilitates » (hérésies) ».

Les béguines ont écrit ou fait écrire en français, en picard, en flamand, en allemand, en provençal… Et dans ces écrits il y avait une certaine posture de prêche interdite aux femmes, ce qui était insupportable à l’autorité ecclésiastique, de même qu’une interprétation personnelle et mystique de la foi qui échappait au contrôle dogmatique extérieur. (https://gallica.bnf.fr/blog/08102021/les-beguines-et-la-litterature-au-moyen-age?mode=desktop)

 

 

Grâce à l’ouvrage de Silvana Panciera « Les béguines, Une communauté de femmes libres », on découvre ce mouvement de femmes libres, très ancien.

¤ Silvana Panciera est née en Italie. Elle a mené ses études universitaires à l’Université Catholique de Louvain, en Belgique.

1978 : elle obtient un doctorat en sociologie à l’École pratique des Hautes Études de Paris.

1995 : elle obtient le prix Femme d’Europe pour la Belgique, pour ses nombreux engagements socio-culturels.

Silvana Panciera écrit :

« Les béguines cherchent des formes de vie qui leur permettent de poursuivre le projet évangélique, sans se greffer sur le système ecclésiastique ni sur les formes cléricales d’évangélisation et sans se couper du monde par l’éloignement monastique. »

 

Gravure sur bois représentant une béguine, tirée de l'ouvrage Des dodes dantzLübeck, 1489.

 

¤ Une béguine célèbre et forte, Marguerite Porete

Femme de lettres, mystique chrétienne, intransigeante, Marguerite Porete, resta toute sa vie fidèle à ses convictions, en dépit des menaces et des tentatives d'intimidation.

Sa pensée de l'amour et de la liberté, qui s'affranchissait de l'Église, lui valut d'être brûlée vive, Elle accepta son sort, plutôt que de se renier.

 

« Ces gens que je traite d’ânes, ils cherchent Dieu dans les créatures, dans les monastères par les prières, dans les paradis créés, les paroles humaines et les Écritures. » (Porete)

 

On ne connaît presque rien de la vie de cette mystique chrétienne, hormis sa fin tragique mais elle avait une grande culture théologique comme profane et avait sûrement reçu une bonne éducation. Née vers 1250 dans le comté de Hainaut (nord de la France), elle vécut sans doute à Valenciennes. Elle est essentiellement connue pour « le Miroir des âmes simples anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d'amour » publié en 1295, un dialogue allégorique entre l'Amour et la Raison.

Porete y décrit les sept phases de l'anéantissement de soi par lesquelles l'âme s'élève vers Dieu et s'unit à lui. Dans cette union mystique, l'âme se trouve réconciliée avec sa véritable nature, et n'est plus soumise à rien d'autre que l’amour : elle se libère de la morale aussi bien que de la raison.

 

« Vertus, je prends congé de vous pour toujours : j'en aurai le cœur plus libre et plus gai, votre service est trop couteux, je le sais. J'ai mis un temps mon cœur en vous, sans rien me réserver, […] j’étais alors votre esclave, j'en suis maintenant délivrée ». (Porete)

 

L’ouvrage de Porete exerça une grande influence sur maître Eckhart (1260-1328), figure de proue du mysticisme rhénan des XIIIe et XIVe siècles, et sur les béguines. Cependant, il suscita rapidement la méfiance de « Sainte-Église-la-petite », comme l'appelait Marguerite Porete.

En effet, la démarche de Porete « se passe de l'Église comme institution, […] relativise les sacrements et rejette la morale », note le philosophe Olivier Boulnois.

Dès 1306, Guy de Colmieu, évêque de Cambrai, condamne l'ouvrage pour hérésie et le fait bruler en place publique, ce qui n'empêche pas Porete de continuer à promouvoir ses idées. Philippe de Marigny, successeur de Guy de Colmieu, la fait arrêter en 1308 : elle est incarcérée à Paris sur ordre de l’Inquisiteur général du royaume de France, Guillaume Humbert, mais refuse de répondre aux questions de l'Inquisition, qui suspecte son appartenance au mouvement du Libre-Esprit.

21 docteurs en théologie de l'université de Paris condamnent à nouveau « le Miroir » pour hérésie, mais la religieuse garde le silence et refuse de se rétracter. Elle est brûlée avec son ouvrage en place de Grève le 1er juin 1310. (Octave Larmagnac-Matheron, Philosophie Magazine, hors-série 43H)

Cependant son livre lui survit par un manuscrit du 15e siècle qui modernise le texte d’origine.

 

 

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4 février 2024 7 04 /02 /février /2024 11:40

Fontaine (1917) de Marcel Duchamp

***

LA VISION DE L’ART DE GOTTFRIED HONEGGER

DANS SA LETTRE À MARCEL DUCHAMP

 

 

Dans cette lettre, Gottfried Honegger s’en prend violemment à l’art dévoyé. Aujourd’hui, d’après lui, tout n’est plus que jeu, tout est permis, tout est à vendre, à acheter. Notre société est devenue consumériste. L’individualisme et le culte du moi priment. On le voit avec les réseaux sociaux où les personnes se montrent et se « remontrent » sur tous les angles.

Honegger attend mieux de l’art.

 

 

« Très cher,

Dans une de vos lettres vous évoquiez Ludwig Wittgenstein. Comme vous l'avez constaté à juste titre, il a remis en question de la manière la plus radicale non seulement l'art, mais aussi tous les problèmes philosophiques. Il ne demande pas « Qu'est-ce que l'art », sa pensée tourne autour de la théorie du jeu. La langue comme un jeu, obéissant comme tous les jeux à des règles.

Les questions que je vous pose ne portent pas sur ce qui est radical. Ce qui m'intéresse c'est votre influence, l'influence de votre œuvre sur les jeunes artistes d'aujourd'hui. Ce qui était pour vous un manifeste, disons un refus de l'art officiel, est devenu l'art officiel. Ce qui était chez vous encore hésitant, ce qui était question, est devenu réponse. Finie la remise en cause de l'art, désormais tout est permis. Votre art a-t-il ouvert toutes les écluses ? Les pionniers, leurs points de vue et leurs théories sont aujourd'hui largement oubliés, dépassés, exposés dans les musées, cimetières pour tourisme de masse.

À Cassel, à Venise, partout domine une effervescence multicolore. Sans honte, sans règles, la pacotille mercantile est ennoblie, donnée pour de l'art. Le ready-made est in. Votre œuvre exerce sur les jeunes une étonnante fascination. Chez vous, cher Marcel Duchamp, l'habituel devient inhabituel, les rapports familiers avec la réalité sont arbitrairement inversés. Chez vous, cela paraît si naturel que cela semble aller de soi et que ça influence notre façon de voir.

J'insiste — je ne vois dans le cirque ready-made, aujourd'hui dominant, qu'une culture de divertissement. Le divertissement domine largement le « jeune art ». Même l'architecture, le design, la mode ont trop souvent peur de la forme. Bilbao est un succès public parce que le musée de Frank Gery est spectaculaire. Disneyland à l'extérieur, cimetière à l'intérieur, écrit le magazine Der Spiegel. Que la fonction détermine la forme extérieure, c'est aujourd'hui oublié.

 

Certes, vous n'avez pas prévu cette vulgarisation de l'art. Certes les dadaïstes, parce que mal compris, ont participé au relâchement de notre culture. Pour moi le présent a trop pollué, trop consommé, trop transformé en produits de consommation. On vole et on falsifie, on pratique le culte de l'art-marchandise, qui correspond tout à fait à notre société consumériste. Si l'art est miroir, témoin de son temps, pourquoi les gardiens de la culture ne le disent-ils pas haut et fort ? Si l'art contemporain était le reflet du libre marché, de la globalisation, l'art d'aujourd'hui aurait une signification politique. Malheureusement cela arrive trop rarement. A la biennale de Venise, de mon point de vue, le kitsch artistique officiel est élevé au mythique. Les textes pratiquent le culte du moi. L'individualisme, la trace de la personnalité originelle, connaît un succès mondial. A une époque où, chaque jour, des centaines de milliers d'hommes meurent de faim, à une époque où l'économie de monopole supprime toutes les garanties humaines et où les États en sont réduits au football, l'art se doit de prendre position. Il ne doit jamais et en aucun cas être un « amusement ». L'art est arme ou vision. L'art est politique, histoire d'une époque.

Ma question est : quelle est votre attitude vis-à-vis de l'informe, de l'infantilisme régnant ?

 

Est-il faux de penser que l'art actuel devrait être avant tout forme et système, que l'art devrait contribuer à un avenir plus humain, un avenir social ? Suis-je naïf, un vieil aveugle hors du coup quand je remets en question les foires d'art contemporain, les ventes aux enchères, le commerce de l'art tout entier ?

Nous le savons : « La laideur nous rend malades ». Un environnement détruit et dominé par la spéculation, associé à la folie de la consommation, est le terreau où se développent le vandalisme, la criminalité et la corruption. Une aliénation autiste se répand. Je lis : « Le dialogue des cultures et des religions doit prévaloir sur les alliances politiques et les coopérations économiques. Des analystes perspicaces, de Georges Dumézil et Claude Lévi-Strauss à l'économiste Amartya Sen, l'ont déjà pronostiqué comme un devoir de pacification. Certes ce dialogue est aujourd'hui plus compromis que jamais ».

 

Tatlin et vous, cher Marcel Duchamp, avez élaboré des concepts esthétiques qui — aussi opposés qu'ils soient — non seulement ne respectaient pas la relation existante entre création artistique et théorie de l'art mais la remplaçaient par leurs propres interrogations liées à l'époque.

Vous devez savoir que ce qui m'importe n'est pas le jugement de valeur mais la volonté de comprendre.

Dans l'attente de votre réponse. »

Marcel Duchamp (1887-1968)

 

***

(Henri, Robert) Marcel Duchamp est né en 1887 à Blainville-Crevon et mort en 1968 à Neuilly-sur-Seine. C’est un peintre, plasticien et homme de lettres français.

Son père, Justin Isidore Duchamp était notaire à Blainville et sa mère, Marie Caroline Lucie née Nicolle, était une musicienne accomplie.

Marcel est le petit-fils d’Emile Frédéric Nicolle, courtier maritime et artiste qui enseigna l’art à ses petits-enfants. Dans cette famille de 7 enfants il y avait plusieurs artistes : Raymond Duchamp-Villon : sculpteur, Jacques Villon et Suzanne Duchamp : peintres

 

Le premier tableau de Marcel Duchamp, Madeleine au piano, est exécuté alors qu’il est en 4e au collège.

Il poursuit de brillantes études au lycée de Rouen.

1904 : avec l’accord de son père, il s’installe à Montmartre, chez son frère, le peintre Jacques Villon. Il s’inscrit à l’académie Julian mais en part au bout d’un an à cause des cours théoriques. Il dessine beaucoup et assiste aux numéros de cabaret humoristiques.

 

1908, il commence à exposer au Salon d’Automne (Grand Palais), il est alors très marqué par les impressionnistes et en 1909 il expose au Salon des indépendants (Orangerie des Tuileries). Il peint alors des paysages. Il commence à vendre ses œuvres. Il expose aussi à Rouen.

Il rejoint ses frères à Puteaux où il fréquente des peintres cubistes (Albert Gleizes, Fernand Léger, Jean Metzinger, Roger de la Fresnaye) et aussi des poètes (Guillaume Apollinaire, Henri-Martin Barzun, Maurice Princet, Georges Ribemont-Dessaignes)

 

Pendant ces périodes, Marcel Duchamp explore différents style artistiques : cubisme, impressionnisme, fauvisme symbolisme.

 

1912, Marcel Duchamp se rend à Munich, où il revoit son ami Max Bergmann. Il entre en contact avec l’avant-garde munichoise. Puis il passe par Bâle, Dresde, Berlin ce qui le mène à étudier un nouveau contexte intellectuel, artistique et scientifique.

Il expose à la galerie La Boétie, à Paris, auprès d’autres artistes qui l’influencent également.

1913, il expose aux Etats-Unis.

En cette année il commence aussi à travailler à la bibliothèque Sainte-Geneviève (Quartier Latin) ce qui le rend autonome financièrement.

 

Vers 1913-1915, il s’écarte de la peinture avec les premiers ready-mades, (ready-made : un artiste s’approprie un objet manufacturé en le privant de sa fonction utilitaire et opère sur lui une manipulation sommaire (retournement, suspension, fixation au sol ou au mur…) puis il ajoute un titre, une date, une inscription avant de l’exposer dans un lieu culturel en tant qu’œuvre d’art).

Duchamp prend des articles ordinaires, prosaïques, et les place quelque part où leur signification d'usage disparait sous le nouveau titre et le nouveau point de vue. en arrachant un objet manufacturé à son contexte et en le plaçant dans un lieux inhabituel, Duchamp élève ces objets au rang d'oeuvre d'art par son simple choix en tant qu'artiste. Il marche ainsi une césure profonde avec toute la tradition artistique qui l'a précédé. il se rapproche ainis des dadaïstes mais il souhaite garder son indépendance, n'appartenir à aucun mouvement.

Il collabore à la revue "Le Surréalisme au Service de la Révolution" (1930-1933)

Parallèlement à son art, il s'intéresse aussi au cinéma. 1935 : il dépose le brevet des  "rotoreliefs".

1955 : il est naturalisé américain.

Dans les années 1960 il est considéré comme un artiste majeur du 20e siècle avec son invention des ready-made.

 

Marcel Duchamp n’appartient à aucun courant artistique précis. Il casse les codes artistiques et esthétiques de l’époque. N’ayant pas suivi de cours dans une école d’art, Marcel Duchamp peut être considéré comme un autodidacte.

 

Porte-Bouteilles (1914)

***

 

Vous pouvez retrouver une courte biographie de Gottfried Honegger dans les articles précédents :

Articles du blog

  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Jean Arp (13-10-21)
  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Léonard de Vinci (20-04-22)
  • La vision de l’art de Gottfried Honegger dans sa lettre à Sonia Delaunay (19-03-23)

 

Gottfried Honegger (1917-2016)

 

 

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14 janvier 2024 7 14 /01 /janvier /2024 10:28

 

FEMMES POÉTESSES

CONTEMPORAINES

Il n’est pas nécessaire d’être poète de métier ; on peut aimer la poésie et écrire des poèmes en dilettante avec beaucoup de talent et de sensibilité.

Voici deux poèmes écrits par des femmes faisant partie de l’association « Poésie et Nouvelles en Normandie » (Pont-Audemer), tirés de la revue « D'une rive à l'autre », n° 54.

 

 

Le poème ci-dessous est de Michelle Chevalier. L’originalité réside dans le mélange de « points : tricot, couture, ponctuation … » et du déroulement de la vie.

 

Mes amis se sont en allés

Morts au dur combat de la vie

Point à l'endroit, point à l'envers.

Tous ces amis sont des poètes

Au regard bon, au sourire clair

Point de feston, point à la ligne.

Ils reposent sous mes paupières

Chers amis que j'ai tant aimés

Sans point de croix ni de travers.

 

Ce deuxième poème est de Nelly POIRIER. Il est plein de sagesse et de bon sens. Vivons pleinement le moment présent ; il ne tient qu’à nous de faire de ce moment un moment de bonheur.

 

VOIX DE SAGES

« Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie »

(Pierre de Ronsard)

« Hier et demain sont deux jours sans emploi »

(Tenzin Gyatso, dalaï-lama)

 

 

Deux journées dans l’année où l'on ne peut rien faire,

L'une s'appelle Hier, l'autre est nommée Demain.

Il faut dès aujourd'hui se prendre par la main.

L'expérience d'Hier nous est bien nécessaire

Et, sans Demain, chercher des forces, serait vain,

Le rêve est mon moteur, bien plus fort que le pain

Mais pour aimer, créer, pour tout simplement vivre,

Goûter les joies du monde ou plonger dans les livres,

Le Sage et le Poète ont même sentiment :

Le seul moment, c'est Maintenant.

 

 

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6 janvier 2024 6 06 /01 /janvier /2024 10:44

 

 

LA FORMATION DU CITOYEN (2)

DROITS ET DEVOIRS

LA CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L’ENFANT

 

 

Les enfants ayant des besoins spécifiques sont les oubliés dans la déclaration des Droits de l’Homme du Citoyen de 1789 et la déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948. Ce n’est qu’en 1989, enfin, que la Convention internationale des Droits de l’Enfant est adoptée par l’ONU et ratifiée par 196 pays.

La notion de droits de l’Homme se développe à travers le monde courant 18e siècle mais ce n’est que début 19e siècle que l’idée se répand qu’il est nécessaire de protéger les enfants par des droits spécifiques. Les premières lois protectrices de l’enfant apparaissent en Europe et concernent le travail des enfants.

La Convention définit les droits fondamentaux des enfants et aborde tous les aspects de la protection de l’enfance. Elle reconnaît que les enfants jouissent de droits fondamentaux et en sont des détenteurs actifs et autonomes

 

 

**Voici quelques extraits de cette Convention

 

Préambule

Les Etats parties à la présente Convention,

[...] Reconnaissant que l'enfant, pour l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension.

Considérant qu'il importe de préparer pleinement l'enfant à avoir une vie individuelle dans la société, et de l'élever dans l'esprit des idéaux proclamés dans la Charte des Nations Unies, et en particulier dans un esprit de paix, de dignité, de tolérance, de liberté, d’égalité et de solidarité. [...]

Sont convenus de ce qui suit :

*Article premier

Au sens de la présente Convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable.

*Article 2

1. Les États s'engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion publique ou autre de l'enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation.

2. Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour que l'enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille.

*Article 7

1. L’enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci, le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux.

2. Les États parties veillent à mettre ces droits en œuvre conformément à leur législation nationale et aux obligations que leur imposent les instruments internationaux applicables en la matière, en particulier dans le cas où faute de cela l'enfant se trouverait apatride.

*Article 8

1. Les États parties s'engagent à respecter le droit de l’enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels qu'ils sont reconnus par loi, sans ingérence illégale.

2. Si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d'entre eux, les États parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible.

 

***

*Article 12

1. Les États parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. À cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale.

*Article 13

1. L’enfant a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend Ia liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen du choix de l’enfant.

2. L’exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions qui sont prescrites par la loi et qui sont nécessaires :
a - Au respect des droits ou de la réputation d'autrui ;
b - À la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publiques.

 

*Article 14

1. Les États parties respectent le droit et le devoir des parents ou, le cas échéant, des représentants légaux de l'enfant, de guider celui-ci dans l'exercice du droit susmentionné d'une manière qui corresponde au développement de ses capacités. [...]

3. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut être soumise qu'aux seules restrictions qui sont prescrites par la loi et qui sont nécessaires pour préserver la sûreté publique, l'ordre public, la santé et la moralité publiques, ou libertés et droits fondamentaux d'autrui.

 

*Article 15

1. Les États parties reconnaissent les droits de l'enfant à la liberté d'association et à la liberté de réunion pacifique.

2. L’exercice de ces droits ne peut faire l'objet que des seules restrictions qui sont prescrites par la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l’intérêt de Ia sécurité nationale, de la sûreté nationale, de la sûreté publique ou de l'ordre public, ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertés d'autrui.

 

***

*Article 28

  1. Les États parties reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation, et en particulier, en vue d'assurer l'exercice de ce droit progressivement et sur la base de l'égalité des chances :

a - Ils rendent l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ;

b - Ils encouragent l'organisation de différentes formes d'enseignement secondaire, tant général que professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant, et prennent des mesures appropriées telles que l’instauration de la gratuité de l’enseignement et l'offre d'une aide financière en cas de besoin ;

c - Ils assurent à tous l'accès à l'enseignement supérieur, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés ;

d - Ils rendent ouvertes et accessibles à tout enfant l'information et l'orientation scolaires et professionnelles ;

e - Ils prennent des mesures pour encourager la régularité de Ia fréquentation scolaire et la réduction des taux d'abandon scolaire.

2. Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que la discipline soit appliquée d'une manière compatible avec la dignité de l'enfant en tant qu'être humain et conformément à la présente Convention.

3. Les États parties favorisent et encouragent la coopération internationale dans le domaine de l'éducation, en vue notamment de contribuer à éliminer l'ignorance et l'analphabétisme dans le monde et de faciliter l’accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux méthodes d'enseignement modernes. À cet égard, il est tenu particulièrement compte des besoins des pays en développement.

*Article 29

1. Les États parties conviennent que l'éducation de l'enfant doit viser à :

a - Favoriser l'épanouissement de la personnalité de l'enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités ;

b -Inculquer à l'enfant le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des principes consacrés dans la Charte des Nations Unies ;

c - Inculquer à l'enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne;

d - Préparer l'enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d'égalité entre les sexes et d'amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux, et avec les personnes d'origine autochtone ;

e - Inculquer à l'enfant le respect du milieu naturel.

2.Aucune disposition du présent article ou de l'article 28 ne sera interprétée d'une manière qui porte atteinte à la liberté des personnes physiques ou morales de créer et de diriger des établissements d'enseignement, à condition que les principes énoncés au paragraphe 1 du présent article soient respectés et que l'éducation dispensée dans ces établissements soit conforme aux normes minimales que l'État aura prescrites.

***

*Article 30

1. Dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ou des personnes d'origine autochtone, un enfant autochtone ou appartenant à une de ces minorités ne peut être privé du droit d'avoir sa propre vie culturelle, de professer et de pratiquer sa propre religion ou d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe.

*Article 31

1. Les États parties reconnaissent à l'enfant le droit au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et a des activités récréatives propres à son âge, et de participer librement à la vie culturelle et artistique.

2. Les États parties respectent et favorisent le droit de l'enfant de participer pleinement à la vie culturelle et artistique, et encouragent l'organisation à son intention de moyens appropriés de loisirs et d'activités récréatives, artistiques et culturelles, dans des conditions d'égalité.

*Article 32

1. Les États parties reconnaissent le droit de l'enfant d'être protégé contre l'exploitation économique et de n'être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social.

2. Les États parties prennent des mesures législatives, administratives, sociales et éducatives pour assurer l'application du présent article. À cette fin, et compte tenu des dispositions pertinentes des autres instruments internationaux, les États parties, en particulier :

a - Fixent un âge minimal ou des âges minimaux d'admission à l'emploi ;
b - Prévoient une réglementation appropriée des horaires de travail et des conditions d'emploi ;
c - Prévoient des peines ou autres sanctions appropriées pour assurer l'application effective du présent article.

 

 

Cette Convention internationale des Droits de l’Enfant, sur le papier, paraît excellente, mais qu’en est-il des droits de l’enfant dans les faits ?

Combien d’enfants travaillent dès leur plus jeune âge ? Combien sont mal traités ? Combien vivent seuls, dans la rue ?...

Et c’est valable pour la plupart des pays, pays en voie de développement, pays riches, grands et petits pays :  pays d’Afrique, d’Amérique du Sud, mais aussi Chine, Inde, Russie, États-Unis ou pays européens.

Il reste encore un grand travail à faire.

 

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3 janvier 2024 3 03 /01 /janvier /2024 09:44

CHÈRES LECTRICES

ET

CHERS LECTEURS DU BLOG

 

 

JE VOUS SOUHAITE

UNE BONNE ET HEUREUSE ANNÉE 2024

 

SANTÉ,

RÉUSSITE DANS CE QUE VOUS ENTREPRENEZ,

JOIE DE VIVRE TOUT SIMPLEMENT

 

 

 

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6 décembre 2023 3 06 /12 /décembre /2023 10:33

 

LA FORMATION DU CITOYEN (1)

DROITS ET DEVOIRS

 

 

Il est bon de rappeler de temps à autre les droits et les devoirs de la personne. Surtout en ce moment où le monde s’agite, où les droits de la personne sont bafoués dans beaucoup de pays sur notre terre, si mal traitée elle aussi.

Rappelons quelques articles de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.

***

Après la prise de la Bastille, les députés de l’Assemblée nationale constituante rédigent un texte qui doit définir les principes fondamentaux de la nouvelle société. Inspiré de la déclaration américaine de 1776, c'est un acte solennel qui rejette l’Ancien Régime et énonce des principes immortels et universels.

La Déclaration proclame la liberté et l'égalité de tous les hommes, elle précise les libertés et les garanties juridiques dont bénéficient les citoyens. Adoptée le 26 août 1789, elle sera placée en 1791 en tête de la première Constitution française.

 Composée d’un préambule et de dix-sept articles, elle est reprise par les constituants successifs. Ainsi en est-il de la Constitution de 1946 qui contient un préambule s'y référant directement et de celle de 1958.

 

***

 

Voici ce que dit l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789

Art. 6. La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celles de leurs vertus et de leurs talents.

 

***

 

Et aussi ce que disent les article 15 et 21 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 :

Art. 15. - 1. Tout individu a droit à une nationalité

2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.

Art. 21. - 1. Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par I ‘intermédiaire de représentants librement choisis.

2. Toute personne a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays.

3. La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics ; cette volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté du vote.

Il semble que ces droits et devoirs des êtres humains sont peu respectés voire peu connus dans beaucoup de pays qui ont à leur tête un homme ou un petit groupe d’hommes qui se pensent supérieurs au reste de leurs concitoyens et qui n’hésitent pas à les maltraiter, voire les liquider, qui ne pensent qu’à s’enrichir alors que beaucoup de leurs concitoyens vivent dans la misère, voire meurent de faim.

 

 

MAIS QU’EN EST-IL DES DROITS DE LA FEMME

 

De par le monde souvent la femme n’a que des devoirs, elle est mal traitée, enfermée, tuée…

Olympe de Gouges (1748-1793)

***

Olympe de Gouges (1748-1793) incarne la résistance face aux hommes pour l’égalité hommes-femmes. Inspiratrice incontestée des revendications des femmes pour leurs droits, elle revendique le droit au divorce et dénonce la peine de mort, et naturellement, le droit des femmes à la politique, à l’égalité avec les hommes. La femme a le droit de monter à l’échafaud, elle a droit aussi à prendre la parole à la tribune.

Dans l’histoire, de par le monde, beaucoup de femmes ont lutté pour leurs droits.

*Voir les articles du blog déjà parus en indiquant « femme » dans la recherche à gauche de l’écran.

En voici quelques-uns

-la longue marche des femmes (1 à 5)

-femmes d’ici et d’ailleurs

-femmes d’Afrique

-la Française d’hier et d’aujourd’hui

-droit des femmes, un combat universel

Madame Sartin …

-société des Signares au Sénégal

 

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18 novembre 2023 6 18 /11 /novembre /2023 08:59

 

LA SAGESSE DE BOUDDHA

 

 

Quelques pensées

 

 

 

> Un bref aperçu de sa vie

Bouddha (L’Éveillé), de son vrai nom, Siddhartha Gautama, serait né au 6e siècle avant J.C, à Lumbini (Népal actuel).

Son père, le roi Suddhodana, gouvernait le royaume des Sakya ; sa mère était la reine Maya, morte peu après sa naissance.

Selon les textes bouddhistes, à sa naissance, une prophétie annonçait qu’il deviendrait soit un roi puissant, soit un grand maître spirituel.

Il est instruit et éduqué dans le respect de l'hindouisme, loin de la souffrance et de la misère qui existent à l’extérieur du palais familial.

À 16 ans il épousa la jeune princesse Yasodhara qui lui donna un fils.

Siddhartha vivait dans le luxe du palais paternel jusqu'à son expérience avec les Quatre Signes (un homme âgé, un homme malade, un homme mort, un ascète religieux). Il comprit que tous ceux qu’il aimait, tout ce qu’il avait, disparaîtrait un jour car tout le monde est soumis à l’âge, la maladie, la mort. Mais il remarqua que l’ascète, bien que condamné aussi, restait serein. Celui-ci lui expliqua qu’il suivait le chemin de la réflexion spirituelle et du détachement, qu’il était donc indifférent à la perte.

Il prit aussi conscience de la misère dans laquelle vivait le peuple et une nuit, après avoir enfilé la robe d'un ascète, il quitta le palais. Il se tourna vers l’ascétisme et avec l’aide de grands maîtres, il pratiqua l’austérité et se concentra sur la méditation.

À 35 ans, s’asseyant sous un figuier, il promit de ne pas en partir avant d’avoir atteint la vérité ultime.

Il reconnut que la souffrance venait du fait de l’attachement des hommes à ce qu’ils sont, possèdent… alors que la vie n’est qu’évolution, transformation.

Il est le fondateur de la philosophie religieuse du bouddhisme.

Après une vie d’ascète et d’errance, Siddhartha Gautama, connu sous le nom de Bouddha, mourut vers 480 av J.C, à un âge très avancé.

 

 

>Très belle introduction de Marc de Smedt à son livre « Paroles du Bouddha ».

« Siddharta Gautama, qui sera appelé plus tard le Bouddha, l'Éveillé, est né il y a 2500 ans environ dans le nord de l'Inde, tout près de l'actuelle frontière du Népal, à Lumbini. On dit que son père était un roi : les fouilles archéologiques dans la région ont permis de découvrir que c'était en tout cas un seigneur, une sorte de chef de clan, celui des Shakyas. Il naquit donc dans une famille puissante, les Gautama, aux moyens d'existence nettement supérieurs à ceux du commun. La légende nous dit aussi que son père, soucieux d'une prédiction faite par un ermite au moment de la naissance de son fils, annonçant que celui-ci serait soit un grand roi, soit un grand sage, fit tout pour que cela soit évidemment la première partie de la prophétie qui se réalise. Le jeune prince Siddharta reçut donc une éducation guerrière et intellectuelle poussée, et son père fit tout pour lui éviter soucis et ennui. Danseuses, chasses, précepteurs, serviteurs l'occupent donc à plein temps. On le marie aussi à la jolie Yasodhara, fille d'un clan voisin qui lui donnera un fils. Mais tout cela ne fait pas son bonheur : il est en effet tourmenté et déprimé par l'existence de la maladie, de la misère, de la vieillesse et de la mort qui lui « ôtent toute fierté au sujet de cette vie que je menais » et dont il ressent la futilité. Alors, une nuit, il quitte le palais et sa famille, il s'enfuit loin de la vie facile pour chercher la vérité et essayer de comprendre le sens de l'existence. Il a trente ans. Il coupe sa longue chevelure, quitte ses vêtements luxueux pour une simple tunique et part suivre l'enseignement des sages du temps. Durant des années il pratique des techniques de yoga, il jeûne, il écoute des philosophies, mais sans apaiser sa soif de comprendre. Alors il décide de s'enfermer dans une grotte et d'y méditer jusqu'à découvrir le pourquoi des choses. Il y reste jusqu'à devenir une sorte de squelette halluciné qui se nourrit d'une graine par jour. Sans résultat. Dans un sursaut il sort de sa grotte pour ne pas y mourir comme un chien dans un trou, il se traîne jusqu'à un arbre où il s'adosse entre les racines pour, au moins, finir en plein jour. Et là, il entend un maître de musique s'installer avec ses élèves dans un bosquet proche. Le maître dit : « Pour qu'un luth fasse de la bonne musique, il faut qu'il soit bien accordé ; si les cordes sont trop lâches, le son est mou, si les cordes sont trop tendues, le son est discordant. Il faut trouver l'accord juste. » A ces paroles, Gautama a une véritable illumination. Il réalise qu'elles s'appliquent à son cas : prince, il menait une existence trop molle, déliquescente, et, vagabond errant, il mène une vie inutile qui le conduit aux portes de la déchéance, pour rien. Il comprend que la vérité est dans l'équilibre des forces et découvre ainsi le premier principe de ce qui deviendra le bouddhisme : la voie du juste milieu. Le corps et l'être doivent être harmonieusement accordés pour donner un juste mouvement et être utiles aux autres. Une nouvelle vie commençait pour lui : tout en reprenant vigueur il se recueillera encore longuement avant de se décider à enseigner ceux qui le désiraient dans ce qu'il a appelé le Noble Chemin, composé de huit préceptes qui peuvent nous servir encore aujourd'hui : la vision correcte, la parole correcte, l'action correcte, la vie correcte, l'effort correct, l'attention correcte et la méditation correcte. Il mourut à quatre-vingts ans : une nouvelle philosophie était née. Elle ne suscita jamais de guerres. » (Marc de Smedt, Paroles de Bouddha, Albin Michel, Carnets de sagesse.)

 

 

>Quelques pensées de Bouddha

 

« Toute conquête engendre la haine, car le vaincu demeure dans la misère. Celui qui se tient paisible, ayant abandonné toute idée de victoire ou de défaite, se maintient heureux. »

 

 

« Un homme peut bien dépouiller autrui, autant qu’il convient à se fins : mais dépouillé à son tour par autrui, tout dépouillé qu’il est, il le dépouille encore.

Tant que le fruit n’a pas mûri, le sot s’imagine : « Voici mon heure, voici mon occasion ! » Mais quand son acte a porté ses fruits, tout se gâte pour lui. Le tueur se fait tuer à son tour ; le vainqueur trouve quelqu’un pour le vaincre ; l’insulteur se fait insulter, le persécuteur a des tracas.

Ainsi par l’évolution de l’acte qui dépouille il est dépouillé à son tour. »

 

 

 

« Actuellement, ô brahmane, les gens sont enflammés de désirs illégitimes, accablés par leurs appétits dépravés, obsédés par de fausses doctrines. Étant ainsi, ils saisissent des glaives acérés et s’ôtent la vie les uns au autres, et beaucoup périssent. De plus, sur ces gens enflammés, accablés, obsédés, la pluie ne tombe pas régulièrement. Il est difficile d’avoir de quoi manger. Les récoltes sont médiocres, frappées de la moisissure, mal venues. Ainsi, beaucoup périssent. Telle est la raison, telle est la cause de l’apparente perte et croissance de l’humanité. Voilà pourquoi les villages ne sont plus des villages, les bourgs ne sont plus des bourgs, les villes ne sont plus des villes, et les régions campagnardes sont dépeuplées. »

 

 

« Faciles à voir sont les fautes d’autrui : celles de soi sont difficiles à voir. En vérité les fautes des autres, nous les passons au van comme la balle du grain, mais celles du soi nous les couvrons comme le rusé joueur cache le coup qui le ferait perdre. »

 

 

« Le temps est un grand maître, le malheur, c’est qu’il tue ses élèves. »

 

 

« Chaque matin nous renaissons à nouveau. Ce que nous faisons aujourd’hui est ce qui importe le plus. »

 

 

« Ne demeure pas dans le passé, ne rêve pas du futur, concentre ton esprit sur le moment présent. »

 

 

« Accepte de qui est, laisse aller ce qui était, aie confiance en ce qui sera. »

 

 

« Quand vous adorez une fleur, vous l’arrachez, mais quand vous aimez une fleur, vous l’arrosez tous les jours. Celui qui comprend cela, comprend la vie. »

 

Marc Smedt 

> Marc de Smedt

Né le 21 octobre 1946, est un écrivain et un journalise français, spécialiste des techniques de méditation et des sagesses du monde. Il est aussi éditeur.

Il dirige et codirige plusieurs collections chez Albin Michel : Carnets de sagesse, Paroles de, Espaces libres, Spiritualités Vivantes.

Il dirige aussi les Éditions du Relié.

Il est également Directeur de rédaction et de publication du magazine Nouvelles Clés (devenu Clés et qui a cessé son activité en 2016) qui est spécialisé dans l’exploration des traditions spirituelles qui peuvent aider chacun à faire le point sur les différentes sagesses, mais aussi sur la santé du corps et de l’esprit, sur l’écologie au sens large.

De 1970 à 1981, il a suivi l’enseignement du maître zen Taisen Deshimaru.

Il est membre du jury du prix Alexandra—David-Néel/Lama-Yongden.

 

 

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