Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Recherche

8 juillet 2012 7 08 /07 /juillet /2012 16:08

001-CL’ignorance et le fanatisme à l’œuvre… pour le pire

 

La culture en otage

 

Tombouctou est par excellence la ville de la culture du Mali sahélien, dépositaire de l’un des patrimoines les plus anciens et les plus riches du continent, patrimoine précieusement préservé du moyen âge à nos jours, par la ville, aujourd’hui assistée par l’Etat malien et l’UNESCO, qui contribuent à la sauvegarde, la conservation et la restauration de ce trésor désormais dédié à l’Humanité. (Les manuscrits appartiennent en fait à quelques familles  de notables de la ville).

 

La ville, par les différents lieux culturels et religieux qu’elle renferme, et par son passé prestigieux, ne manque pas d’intérêt. Ce n’est pas un hasard si certains de ses monuments sont aujourd’hui classés par l’UNESCO au patrimoine mondial. Peu de villes du continent peuvent se targuer d’une telle reconnaissance nullement usurpée.

 

Ce patrimoine culturel, religieux et laïc, est d’une extrême diversité, mais tous ses éléments, à des degrés divers, apportent un témoignage historique de valeur inestimable.

 

A côté des maisons anciennes (transformées en musée) où séjournèrent les premiers visiteurs européens : l’Ecossais Major Alexander Gordon Laing (1826), le Français René Caillié (1828), l’Allemand Dr. Heinrich Barth (1855), l’attention est d’emblée attirée par l’architecture typiquement sahélo-soudanien, propre à quelques autres villes du Nord-Mali : Djenné, Gao…

 

Enfin, c’est dans cette ville que fut érigé récemment le monument de la « Flamme de la Paix », symbolisant la fin de la rébellion touarègue de mars 1996, et scellant la réconciliation solennelle de tous les enfants du pays, date à partir de laquelle fut instituée une cérémonie de commémoration désormais célébrée tous les ans.

 

La « Flamme de la Paix » justifie bien son nom, car, ce 26 mars 1996, les rebelles touaregs rassemblés, jetèrent solennellement leurs 3 000 armes utilisées durant la rébellion dans un gigantesque brasier, en présence des autorités maliennes, libyennes, algériennes…

 

etoile 116Trésors de haute valeur


bouton 007— Les fameux manuscrits de Tombouctou qui ont tout d’abord une portée symbolique par le fait qu’ils révèlent une Afrique scientifique bien avant la colonisation européenne du 19e siècle. La ville renferme entre 700 000 et 1 000 000 de manuscrits conservés avec un soin méticuleux qui font la fierté de ses habitants. Ils recouvrent plusieurs âges, de l’époque préislamique au 12e siècle, écrits pour la plupart en arabe et en peul, par des érudits de l’ancien empire du Mali. La diversité des thèmes abordés, leur richesse scientifique et pédagogique, font de cet ensemble un lointain ancêtre de l’Encyclopédie des philosophes du 18e siècle en France.

 

manuscrits-tombouctou1.jpg

 

Tous les domaines de la connaissance des époques couvertes y sont abordés : astronomie, musique, botanique, médecine, mathématiques, religion, histoire, géographie, droit, commerce…

Depuis 1970 et la création du « Centre de Documentation et de Recherche Ahmed Baba », l’UNESCO recueille et restaure certains de ces manuscrits. Ce trésor culturel unique et d’une valeur inestimable, en proie à la fureur de l’obscurantisme, pourrait-il disparaître demain, subissant le même sort que les mausolées ?

 

bouton 007— Les mausolées -un art funéraire de qualité reconnue- le 3e élément majeur de cette richesse culturelle et historique est constitué par un ensemble de 16 mausolées auxquels Tombouctou doit également sa renommée. Les mausolées sont d’importantes constructions funéraires. Chacun d’eux renferme la tombe d’un saint. Ils constituent un ensemble architectural original et sont partie intégrante du système religieux, objets d’une grande dévotion.

 

mausolee-tombouctou.jpg

 

« La ville aux 333 saints », classée depuis 1988 au patrimoine mondial de l’UNESCO, est aussi riche du témoignage d’un riche passé. Tombouctou, dont la fondation remonte au 5e siècle de l’Hégire (11e siècle ap. JC) ,est le foyer d’un art funéraire original, incarné par ces mausolées-monuments.

 

C’est à ces vestiges célèbres que s’attaquent les djihadistes de Ansar-ed Dine, détruisant à ce jour 7 mausolées sur 16.

 

destruction-mausolee.jpg

 

Le mot « saint » au sens où il est traditionnellement compris par la population de Tombouctou n’a pas de connotation religieuse. Il s’agit plutôt de « sages », c’est-à-dire de savants et d’érudits, qui ont tous marqué leur temps et agi pour le bien de la population, et qui sont à ce titre reconnus comme référence dans leurs domaines respectifs, et pour cela vénérés.On est saint parce que bienfaiteur public, reconnu comme tel, unanimement respecté et apprécié.

 

bouton 007— Une université multiséculaire, Sankoré, fait aussi partie des joyaux culturels et historiques de Tombouctou. La célèbre université de Sankoré, qui fut du 14e au 18e siècle le plus brillant foyer de culture et d’éducation avec ses 25 000 étudiants au 15e siècle, est sans équivalent sur le continent.

 

« Le sel vient du nord, l’or vient du sud et l’argent du pays des Blancs, mais la parole de Dieu, les trésors de la sagesse ne se trouvent qu’à Tombouctou ». Ce diction en usage au Mali sera-t-il demain altéré par le poison du fanatisme ?


 

etoile 119Pourquoi tant de haine contre la connaissance ?


La destruction de ces trésors culturels et religieux constitue un crime non seulement contre Tombouctou et le Mali, mais aussi contre l’Histoire et l’Humanité. De même que la disparition d’une espèce vivante quelconque creuse un vide irréparable, de la même manière, la destruction de ces symboles du passé crée dans la mémoire de l’Humanité un vide tout aussi irréparable. Ce vide est encore plus profond s’agissant de peuples dits « sans écriture ».

 

Le champ d’étude privilégié des ethnologues depuis la fin du 19e siècle, concerne prioritairement les peuples sans écriture, donc supposés sans histoire et sans passé. Les premiers contacts entre Europe et Afrique depuis le 15e siècle ont abouti à la colonisation que les Européens justifièrent entre autres arguments, par leur supériorité culturelle fondée, elle, sur l’écriture.

 

Et, quand, au début du 20e siècle, des archéologues et des collectionneurs d’art occidentaux firent des découvertes affirmant le contraire, il a bien fallu prendre en compte ce paradoxe et cette réalité. Mais, malheureusement pour les Africains, et pendant longtemps, les vestiges de grandes civilisations furent attribués à des peuples non africains. On prétendit ainsi que les anciens empires du Soudan sahélien étaient gouvernés par des Juifs ou des Berbères. Des tentatives furent aussi faites pour prouver que les bronzes du Bénin étaient l’œuvre des Portugais, et les têtes Ifé du Nigéria, celles d’artistes égyptiens. Quant aux fameuses ruines du Zimbabwe découvertes en Afrique centrale, on tenta de les attribuer à la civilisation arabe, voire européenne…

 

Tombouctou fut jusque-là un modèle de synthèse culturelle, joignant l’écrit à l’oral et à l’archéologie. Cette ville fut aussi, à travers les âges, le carrefour de multiples rencontres, une symbiose heureuse et harmonieuse entre peuples différents, entre culture de l’écrit et culture de l’oralité, entre Blancs et Noirs, nomades et sédentaires, cultures du nord et du sud du Sahara, un foyer de tolérance et de paix.

 

gif anime puces 251Toute cette richesse doit-elle disparaître sous la nuit profonde de l’ignorance ?

 

MB900439169

Partager cet article
Repost0
1 juillet 2012 7 01 /07 /juillet /2012 07:54

canstock4325552

 

 

 

 

Les mots sans les actes ?

 

 

arb plante 003

 

 

 

petale009LA DECLARATION DE BAMAKO

TEXTE INTEGRAL 

 

Nous, Ministres et Chefs de délégation des Etats et gouvernements des pays ayant le français en partage, réunis à Bamako pour le Symposium International sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone ;

 

Nous fondant sur les dispositions de la Charte de la Francophonie, qui consacrent comme objectifs prioritaires l’aide à l’instauration et au développement de la démocratie, la prévention des conflits et le soutien à l’Etat de droit et aux droits de l’Homme ;

 

Rappelant l’attachement de la Francophonie à la Déclaration universelle des droits de l’Homme et aux Chartes régionales, ainsi que les engagements des Sommets de Dakar (1989), de Chaillot (1991), de Maurice (1993), de Cotonou (1995), de Hanoi (1997) et de Moncton (1999) ;

 

Inscrivant notre action dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour l’éducation aux Droits de l’Homme (1995-2004) ;

 

Considérant l’action d’accompagnement des processus démocratiques menée par la Francophonie ces dix dernières années ;

 

Soucieux de progresser vers la démocratie par le développement économique et social et une juste répartition des ressources nationales pour un accès égal à l’éducation, à la formation, à la santé et à l’emploi ;

 

Souhaitant répondre à l’objectif fixé au Sommet de Moncton, de tenir un Symposium International sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone, pour approfondir la concertation et la coopération en faveur de l’Etat de droit et de la culture démocratique, et d’engager ainsi une étape nouvelle dans le dialogue des Etats et gouvernements des pays ayant le français en partage, pour mieux faire ressortir les axes principaux tant de leur expérience récente que de leur spécificité ;

 

1 – Constatons

 

• que le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone, au cours de ces dix dernières années, comporte des acquis indéniables : consécration constitutionnelle des droits de l’Homme, mise en place des Institutions de la démocratie et de l’Etat de droit, existence de contre-pouvoirs, progrès dans l’instauration du multipartisme dans nombre de pays francophones et dans la tenue d’élections libres, fiables et transparentes, contribution de l’opposition au fonctionnement de la démocratie, promotion de la démocratie locale par la décentralisation ;

 

• que ce bilan présente, aussi, des insuffisances et des échecs : récurrence de conflits, interruption de processus démocratiques, génocide et massacres, violations graves des droits de l’Homme, persistance de comportements freinant le développement d’une culture démocratique, manque d’indépendance de certaines institutions et contraintes de nature économique, financière et sociale, suscitant la désaffection du citoyen à l’égard du fait démocratique ;

 

2 - Confirmons notre adhésion aux principes fondamentaux suivants :

 

1. La démocratie, système de valeurs universelles, est fondée sur la reconnaissance du caractère inaliénable de la dignité et de l’égale valeur de tous les êtres humains ; chacun a le droit d’influer sur la vie sociale, professionnelle et politique et de bénéficier du droit au développement ;

 

2. L’Etat de droit qui implique la soumission de l’ensemble des institutions à la loi, la séparation des pouvoirs, le libre exercice des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ainsi que l’égalité devant la loi des citoyens, femmes et hommes, représentent autant d’éléments constitutifs du régime démocratique ;

 

3. La démocratie exige, en particulier, la tenue, à intervalles réguliers, d’élections libres, fiables et transparentes, fondées sur le respect et l’exercice, sans aucun empêchement ni aucune discrimination, du droit à la liberté et à l’intégrité physique de tout électeur et de tout candidat, du droit à la liberté d’opinion et d’expression, notamment par voie de presse et autre moyen de communication, de la liberté de réunion et de manifestation, et de la liberté d’association ;

 

4. La démocratie est incompatible avec toute modification substantielle du régime électoral introduite de façon arbitraire ou subreptice, un délai raisonnable devant toujours séparer l’adoption de la modification de son entrée en vigueur ;

 

5. La démocratie suppose l’existence de partis politiques égaux en droits, libres de s’organiser et de s’exprimer, pour autant que leur programme et leurs actions ne remettent pas en cause les valeurs fondamentales de la démocratie et des droits de l’Homme. Ainsi, la démocratie va de pair avec le multipartisme. Elle doit assurer à l’opposition un statut clairement défini, exclusif de tout ostracisme ;

 

6. La démocratie requiert la pratique du dialogue à tous les niveaux aussi bien entre les citoyens, entre les partenaires sociaux, entre les partis politiques, qu’entre l’Etat et la société civile. La démocratie implique la participation des citoyens à la vie politique et leur permet d’exercer leur droit de contrôle ;

 

3 – Proclamons

 

1. que Francophonie et démocratie sont indissociables : il ne saurait y avoir d’approfondissement du projet francophone sans une progression constante vers la démocratie et son incarnation dans les faits ; c’est pourquoi la Francophonie fait de l’engagement démocratique une priorité qui doit se traduire par des propositions et des réalisations concrètes ;

 

2. que, pour la Francophonie, il n’y a pas de mode d’organisation unique de la démocratie et que, dans le respect des principes universels, les formes d’expression de la démocratie doivent s’inscrire dans les réalités et spécificités historiques, culturelles et sociales de chaque peuple ;

 

3. que la démocratie, cadre politique de l’Etat de droit et de la protection des droits de l’Homme, est le régime qui favorise le mieux la stabilité à long terme et la sécurité juridique ; par le climat de liberté qu’elle suscite, la démocratie crée aussi les conditions d’une mobilisation librement acceptée par la population pour le développement ; la démocratie et le développement sont indissociables : ce sont là les facteurs d’une paix durable ;

 

4. que la démocratie, pour les citoyens -y compris, parmi eux, les plus pauvres et les plus défavorisés- se juge, avant tout, à l’aune du respect scrupuleux et de la pleine jouissance de tous leurs droits, civils et politiques, économiques, sociaux et culturels, assortis de mécanismes de garanties. Il s’agit là de conditions essentielles à leur adhésion aux institutions et à leur motivation à devenir des acteurs à part entière de la vie politique et sociale ;

 

5. que, pour préserver la démocratie, la Francophonie condamne les coups d’Etat et toute autre prise de pouvoir par la violence, les armes ou quelque autre moyen illégal ;

 

6. que, pour consolider la démocratie, l’action de la Francophonie doit reposer sur une coopération internationale qui s’inspire des pratiques et des expériences positives de chaque Etat et gouvernement membre ;

 

7. que les principes démocratiques, dans toutes leurs dimensions, politique, économique, sociale, culturelle et juridique, doivent également imprégner les relations internationales ;

 

4 - Prenons les engagements suivants :

 

A. Pour la consolidation de l’Etat de droit

 

1. Renforcer les capacités des institutions de l’Etat de droit, classiques ou nouvelles, et œuvrer en vue de les faire bénéficier de toute l’indépendance nécessaire à l’exercice impartial de leur mission ;

 

2. Encourager le renouveau de l’institution parlementaire, en facilitant matériellement le travail des élus, en veillant au respect de leurs immunités et en favorisant leur formation ;

 

3. Assurer l’indépendance de la magistrature, la liberté du Barreau et la promotion d’une justice efficace et accessible, garante de l’Etat de droit, conformément à la Déclaration et au Plan d’action décennal du Caire adoptés par la IIIème Conférence des Ministres francophones de la justice ;

 

4. Mettre en œuvre le principe de transparence comme règle de fonctionnement des institutions ;

 

5. Généraliser et accroître la portée du contrôle, par des instances impartiales, sur tous les organes et institutions, ainsi que sur tous les établissements, publics ou privés, maniant des fonds publics ;

 

6. Soutenir l’action des institutions mises en place dans le cadre de l’intégration et de la coopération régionales, de manière à faire émerger, à ce niveau, une conscience citoyenne tournée vers le développement, le progrès et la solidarité ;

 

B. Pour la tenue d’élections libres, fiables et transparentes

 

7. S’attacher au renforcement des capacités nationales de l’ensemble des acteurs et des structures impliqués dans le processus électoral, en mettant l’accent sur l’établissement d’un état civil et de listes électorales fiables ;

 

8. S’assurer que l’organisation des élections, depuis les opérations préparatoires et la campagne électorale jusqu’au dépouillement des votes et à la proclamation des résultats, y inclus, le cas échéant, le contentieux, s’effectue dans une transparence totale et relève de la compétence d’organes crédibles dont l’indépendance est reconnue par tous ;

 

9. Garantir la pleine participation des citoyens au scrutin, ainsi que le traitement égal des candidats tout au long des opérations électorales ;

 

10. Impliquer l’ensemble des partis politiques légalement constitués, tant de la majorité que de l’opposition, à toutes les étapes du processus électoral, dans le respect des principes démocratiques consacrés par les textes fondamentaux et les institutions, et leur permettre de bénéficier de financements du budget de l’Etat ;

 

11. Prendre les mesures nécessaires pour s’orienter vers un financement national, sur fonds public, des élections ;

 

12. Se soumettre aux résultats d’élections libres, fiables et transparentes ;

 

C. Pour une vie politique apaisée

 

13. Faire en sorte que les textes fondamentaux régissant la vie démocratique résultent d’un large consensus national, tout en étant conformes aux normes internationales, et soient l’objet d’une adaptation et d’une évaluation régulières ;

 

14. Faire participer tous les partis politiques, tant de l’opposition que de la majorité, à la vie politique nationale, régionale et locale, conformément à la légalité, de manière à régler pacifiquement les conflits d’intérêts ;

 

15. Favoriser la participation des citoyens à la vie publique en progressant dans la mise en place d’une démocratie locale, condition essentielle de l’approfondissement de la démocratie ;

 

16. Prévenir, et le cas échéant régler de manière pacifique, les contentieux et les tensions entre groupes politiques et sociaux, en recherchant tout mécanisme et dispositif appropriés, comme l’aménagement d’un statut pour les anciens hauts dirigeants, sans préjudice de leur responsabilité pénale selon les normes nationales et internationales ;

 

17. Reconnaître la place et faciliter l’implication constante de la société civile, y compris les ONG, les médias, les autorités morales traditionnelles, pour leur permettre d’exercer, dans l’intérêt collectif, leur rôle d’acteurs d’une vie politique équilibrée ;

 

18. Veiller au respect effectif de la liberté de la presse et assurer l’accès équitable des différentes forces politiques aux médias publics et privés, écrits et audiovisuels, selon un mode de régulation conforme aux principes démocratiques ;

 

D. Pour la promotion d’une culture démocratique intériorisée et le plein respect des droits de l’Homme

 

19. Développer l’esprit de tolérance et promouvoir la culture démocratique dans toutes ses dimensions, afin de sensibiliser, par l’éducation et la formation, les responsables publics, l’ensemble des acteurs de la vie politique et tous les citoyens aux exigences éthiques de la démocratie et des droits de l’Homme ;

 

20. Favoriser, à cet effet, l’émergence de nouveaux partenariats entre initiatives publiques et privées, mobilisant tous les acteurs engagés pour la démocratie et les droits de l’Homme ;

 

21. Ratifier les principaux instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’Homme, honorer et parfaire les engagements ainsi contractés, s’assurer de leur pleine mise en œuvre et former tous ceux qui sont chargés de leur application effective ;

 

22. Adopter en particulier, afin de lutter contre l’impunité, toutes les mesures permettant de poursuivre et sanctionner les auteurs de violations graves des droits de l’Homme, telles que prévues par plusieurs instruments juridiques internationaux et régionaux, dont le Statut de Rome portant création d’une Cour Pénale Internationale ; appeler à sa ratification rapide par le plus grand nombre ;

 

23. Créer, généraliser et renforcer les institutions nationales, consultatives ou non, de promotion des droits de l’Homme et soutenir la création dans les administrations nationales de structures consacrées aux droits de l’Homme, ainsi que l’action des défenseurs des droits de l’Homme ;

 

24. Prendre les mesures appropriées afin d’accorder le bénéfice aux membres des groupes minoritaires, qu’ils soient ethniques, philosophiques, religieux ou linguistiques, de la liberté de pratiquer ou non une religion, du droit de parler leur langue et d’avoir une vie culturelle propre ;

 

25. Veiller au respect de la dignité des personnes immigrées et à l’application des dispositions pertinentes contenues dans les instruments internationaux les concernant ;

 

A ces fins, et dans un souci de partenariat rénové, nous entendons :

 

• Intensifier la coopération entre l’OIF et les organisations internationales et régionales, développer la concertation en vue de la démocratisation des relations internationales, et soutenir, dans ce cadre, les initiatives qui visent à promouvoir la démocratie ;

 

• Renforcer le mécanisme de concertation et de dialogue permanents avec les OING reconnues par la Francophonie, particulièrement avec celles qui poursuivent les mêmes objectifs dans les domaines de la démocratie et des droits de l’Homme ;

 

5 - Décidons de recommander la mise en œuvre des procédures ci-après pour le suivi des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone :

 

1. Le Secrétaire général se tient informé en permanence de la situation de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone, en s’appuyant notamment sur la Délégation à la Démocratie et aux Droits de l’Homme, chargée de l’observation du respect de la démocratie et des droits de l’Homme dans les pays membres de la Francophonie ; Une évaluation permanente des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone sera conduite, à des fins de prévention, dans le cadre de l’Organisation internationale de la Francophonie, sur la base des principes constitutifs énoncés précédemment.

Cette évaluation doit permettre :

 

• de définir les mesures les plus appropriées en matière d’appui à l’enracinement de la démocratie, des droits et des libertés,

 

• d’apporter aux Etats et gouvernements qui le souhaitent l’assistance nécessaire en ces domaines,

 

• de contribuer à la mise en place d’un système d’alerte précoce ;

 

2. Face à une crise de la démocratie ou en cas de violations graves des droits de l’Homme, les instances de la Francophonie se saisissent, conformément aux dispositions de la Charte, de la question afin de prendre toute initiative destinée à prévenir leur aggravation et à contribuer à un règlement. A cet effet, le Secrétaire général propose des mesures spécifiques :

 

• il peut procéder à l’envoi d’un facilitateur susceptible de contribuer à la recherche de solutions consensuelles. L’acceptation préalable du processus de facilitation par les autorités du pays concerné constitue une condition du succès de toute action. Le facilitateur est choisi par le Secrétaire général après consultation du Président de la Conférence ministérielle, en accord avec l’ensemble des protagonistes. La facilitation s’effectue en liaison étroite avec le CPF ;

 

• il peut décider, dans le cas de procès suscitant la préoccupation de la communauté francophone, de l’envoi, en accord avec le CPF, d’observateurs judiciaires dans un pays en accord avec celui-ci.

 

3. En cas de rupture de la démocratie ou de violations massives des droits de l’Homme, les actions suivantes sont mises en œuvre :

 

Le Secrétaire général saisit immédiatement le Président de la Conférence ministérielle de la Francophonie à des fins de consultation ;

 

La question fait l’objet d’une inscription immédiate et automatique à l’ordre du jour du CPF, qui peut être convoqué d’urgence en session extraordinaire, et, le cas échéant :

 

• confirme la rupture de la démocratie ou l’existence de violations massives des droits de l’Homme,

 

• les condamne publiquement,

 

• exige le rétablissement de l’ordre constitutionnel ou l’arrêt immédiat de ces violations,

 

Le CPF signifie sa décision aux parties concernées ;

 

Le Secrétaire général se met en rapport avec les autorités de fait. Il peut envoyer sur place une mission d’information et de contacts. Le rapport établi dans les plus brefs délais par cette mission est communiqué aux autorités nationales pour commentaires. Le rapport de la mission, ainsi que les commentaires des autorités nationales, sont soumis au CPF, pour toute suite jugée pertinente ;

 

Le CPF peut prendre certaines des mesures suivantes :

 

• refus de soutenir les candidatures présentées par le pays concerné, à des postes électifs au sein d’organisations internationales,

 

• refus de la tenue de manifestations ou conférences de la Francophonie dans le pays concerné,

 

• recommandations en matière d’octroi de visas aux autorités de fait du pays concerné et réduction des contacts intergouvernementaux,

 

• suspension de la participation des représentants du pays concerné aux réunions des instances,

 

• suspension de la coopération multilatérale francophone, à l’exception des programmes qui bénéficient directement aux populations civiles et de ceux qui peuvent concourir au rétablissement de la démocratie,

 

• proposition de suspension du pays concerné de la Francophonie. En cas de coup d’Etat militaire contre un régime issu d’élections démocratiques, la suspension est décidée ;

 

Lorsque des dispositions sont prises en vue de restaurer l’ordre constitutionnel ou de faire cesser les violations massives des droits de l’Homme, le CPF se prononce sur le processus de retour au fonctionnement régulier des institutions, assorti de garanties pour le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Il détermine les mesures d’accompagnement de ce processus par la Francophonie en partenariat avec d’autres organisations internationales et régionales ;

 

Si besoin est, le CPF saisit la Conférence ministérielle de la Francophonie par le canal de son Président ;

 

La question de la rupture de la démocratie ou des violations massives des droits de l’Homme dans un pays et des mesures prises, reste inscrite à l’ordre du jour du CPF aussi longtemps que subsistent cette rupture ou ces violations.

 

_____

 

Nous, Ministres et chefs de délégation des Etats et gouvernements des pays ayant le français en partage,

 

Adoptons la présente Déclaration ;

 

Demandons au Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie d’en assurer la mise en œuvre ;

 

Transmettons, à l’intention des chefs d’Etat et de gouvernement, en vue de leur 9ème Sommet à Beyrouth, le projet de Programme d’action ci-joint en annexe.

 

Bamako, le 3 novembre 2000

 tournesol003

 

Que l'Organisation Internationale de la Francophonie se mette donc à l'oeuvre avec détermination, dans la fidélité à ses engagements, afin de faire triompher les idéaux qui la fondent : liberté, respect de l'individu, de ses droits, démocratie, et mettre l'Afrique au diapason du monde. Agir pour donner aux mots le pouvoir de l'action.

 

Vous, Ministres et chefs de délégation des Etats et gouvernements des pays ayant le français en partage, faites que vos résolutions du 13 novembre 2000, consignées dans la Déclaration de Bamako, aient une application concrète en Afrique, pour que cessent sur ce continent les atteintes les plus intolérables aux droits et à la dignité de l'homme.

 

007

Partager cet article
Repost0
27 juin 2012 3 27 /06 /juin /2012 09:56

serpent.gif

 

gif anime puces 029Un sort peu enviable

 

photo.jpg


bouton 006« Tous les coups sont permis

 

Expulsions massives, violences sexuelles... Human Rights Watch s'inquiète de la brutalité des méthodes utilisées contre les clandestins congolais.

 

C’est devenu une habitude. Chaque année, des milliers de Congolais en situation irrégulière sont arrêtés par les autorités angolaises et renvoyés manu militari dans leur pays.


Selon Human Rights Watch (HRW), on a recensé « 55 590 expulsions, avec des pics confirmés en mai et en octobre 2011 », pour la seule période allant du 29 mars au 31 décembre 2011. Dans un rapport publié le 21 mai, l'organisation de défense des droits de l'homme a également répertorié 3770 cas de violences sexuelles: viols, viols collectifs, contraintes sexuelles, fouilles corporelles vaginales et anales sans utilisation de gants et autres humiliations sexuelles... Ces faits ont touché en grande majorité des femmes (2526 cas), mais aussi des filles (316) et des hommes (928).


À cela s'ajoutent 12 647 cas de violences physiques (torture, passages à tabac, emprisonnement dans des conditions dégradantes et privation de nourriture), 13 626 cas de détention prolongée et 12 647 cas de vol... Les conclusions sont accablantes.

 

bouton 007INVASION SILENCIEUSE. Les expulsions massives d'étrangers, originaires pour l'essentiel du Congo-Kinshasa, ont commencé en 2003. Pour Luanda, ces actions musclées sont menées dans le cadre de « la protection de la sécurité nationale » contre ce qui est considéré comme une « invasion silencieuse ». Les mauvais traitements commencent au moment des rafles, généralement dans les zones situées non loin des frontières communes, et se poursuivent durant l'acheminement vers les lieux de détention, puis pendant la détention et lors de l'expulsion.


La question des migrants est devenue très sensible entre la RD Congo et l'Angola. Pendant longtemps, Kinshasa s'est contenté d'adopter un profil bas. Jusqu'à ce que, sous la pression de son opinion, le gouvernement décide de réagir vigoureusement : c'était en septembre et octobre 2009. Au cours de cette période, quelque 40 000 Angolais vivant sur son territoire avaient dû regagner leur pays. HRW souligne que Luanda n'a jamais mené d'enquête sérieuse pour se rendre compte des violations des droits de l'homme auxquelles se livrent les différents services de sécurité. »

TSHITENGE LUBABU M.K.

(Jeune Afrique, 27 mai-2 juin 2012)

abstrait 022

 

 

flèche3VIVE L’UNION AFRICAINE !


Ce n’est pas toujours facile.


« Le pauvre n’est chez lui nulle part » (J.J. Rousseau)

 

Une réflexion de fond s'impose, en Afrique, sur l'Afrique, par des Africains aussi !

 

Il est nécessaire de réfléchir aux conditions à satisfaire pour que les Africains soient, demain, parmi les plus forts, ou tout simplement pour que, en Afrique, les Africains ne soient pas traités d’une manière aussi dégradante.

 

Les Africains ne peuvent être respectés ailleurs dans le monde s'ils ne se respectent pas chez eux (à défaut de s’aimer).

 

N'est-ce pas aussi pour cela que certains partent de chez eux pour l'Europe ou d'autres terres qu'ils imaginent plus clémentes, plus respectueuses des droits et de la vie ? Ce respect est le socle de l'épanouissement des individus, donc du bien-être moral et matériel, du développement au sens noble du terme.

 

Ce serait rendre service à l’Afrique et aux Africains que de mener cette réflexion de fond, avec lucidité, générosité et bonne foi, si difficile (ou dérangeante) soit-elle.

 

Scorpion-0.gif

 

Partager cet article
Repost0
24 juin 2012 7 24 /06 /juin /2012 09:05

 

casque colo

Démon ici, Ange là-bas

001.gif

 

 

L'histoire des colonies européennes d'Afrique fourmille d'épisodes où des populations soumises, accablées de charges, surtout humiliées par des brimades en tout genre de la part d'administrateurs, franchissent les limites administratives de leur territoire pour se rendre dans la colonie voisine sous domination d'une autre nation.

 

On migre ainsi selon les circonstances, en quête de protection ou pour fuir les exactions, d'autant plus aisément que de l'autre côté de la frontière se trouvent généralement des membres de la même ethnie (parfois de même famille) séparés en francophones, anglophones, lusophones...

 

Dans le cas français, les sujets coloniaux ont souvent eu une vision double de la France (ou de sa domination). Sa présence proche incarnée par l'administration coloniale (agents blancs ou noirs), s'opposait à la métropole (comme le roi et l'intendant dans les provinces de l'Ancien Régime).

 

Autrement dit, les Français de France incarnaient mieux la "Patrie des droits de l'Homme" et ses valeurs que les Français des colonies (même si les exceptions à cet égard sont plus nombreuses qu'on le croit. Il y eut des administrateurs, des coloniaux de tous statuts : médecins, enseignants, religieux... qui vivent encore dans la mémoire des Africains).

 

Ce sentiment d'une France double (la France d'ici et la France de là-bas), s'exacerbe en particulier dans les périodes de difficultés vécues par la métropole : les deux guerres mondiales, la grande crise économique des années 30, périodes où les charges pesant sur les populations des colonies sont les plus lourdes : impôts, taxes diverses, travail forcé, recrutement (combattants et travailleurs).

 

L'épisode de la fuite des notables de l'ethnie agni de Côte d'Ivoire vers la colonie britannique de Gold Coast (actuel Ghana) est une illustration de cette vision double de la France.

 

En 1917, en pleine guerre mondiale, les notables de l'ethnie agni de la zone frontalière de Gold Coast fuient le territoire français pour tenter de faire parvenir au gouvernement central à Paris, par l'intermédiaire du gouverneur anglais, les doléances de la population sous la forme d'une pétition, persuadés que la métropole ignore tout des vexations dont ils sont l'objet de la part du gouverneur et des administrateurs français.

 

etoile 006

 

carte

 

 

Les prélèvements militaires par grandes régions pendant la Première guerre mondiale (en % par rapport à la population de 1921)

Source : M. Michel, L’Appel à l’Afrique.

 

 

ligne 2 004

 

 

Pétition des réfugiés de Côte d'Ivoire remise au gouverneur de Gold Coast, Sir Hugh Clifford, par douze chefs agni du cercle d'Assinie.

 

Half Assinie, 10 Juin 1917

 

Excellence,

 

Nous avons l'honneur, nous chefs des 18 990 indigènes de la Côte-d'Ivoire réfugiés sur le territoire anglais et en leur nom comme au nôtre, de venir respectueusement vous faire part des motifs impérieux qui nous ont conduits à fuir momentanément de la terre de nos ancêtres pour le pays de Half Assinie et à nous placer sous la traditionnelle hospitalité des couleurs britanniques. Nous avons toujours été de loyaux sujets de la France. Nos pères avaient depuis des époques reculées entretenu avec elle des rapports d'amitié. En contribuant aujourd'hui à sa défense, nous ne ferions que rester fidèles à leur mémoire.

 

Mais l'Administrateur de notre district, Monsieur Bru, a trompé le gouvernement français en faisant connaître, ainsi que le bruit nous en est parvenu, que nous avons fui notre pays et nos biens par infidélité envers la France pour lui refuser de lui fournir les soldats qu'elle demande afin de l'aider dans cette guerre terrible qu'elle supporte.

 

Comment peut-il être justifié avec une apparence de raison cette accusation ? Le pays dont le drapeau nous abrite aujourd'hui est lui-même engagé aux côtés de la France dans cette guerre pour le droit des faibles et le respect des traités et il a demandé à ses sujets indigènes de servir dans les rangs de ses armées.

 

En réalité, Excellence, nous avons déjà fourni des hommes, mais à cette occasion nous avons été brutalisés, violentés, nos chefs ont été emprisonnés et soumis à de durs et humiliants travaux ; on les a expédiés demi-nus avec des pierres sur la tête, à la risée de la foule dans une ville comme Aboisso où tous les Blancs et beaucoup d'étrangers circulent et où leurs propres sujets ont pu voir dans cet appareil d'abjection, les héritiers de leurs anciens Rois.

 

Il y a longtemps que nous souffrons d'ailleurs ; les traités passés avec nos pères et qui réservaient la souveraineté de nos chefs et la propriété du sol ont été déchirés et foulés aux pieds.

 

Nous sommes devenus pauvres et comme des esclaves sur notre propre terre Agni ; les mines d'or ont été données à des étrangers sans indemnité pour nous et c'est le Gouvernement qui a pris les redevances et les a gardées ; nous-mêmes, pour y couper des arbres, (nous devons ?) payer de lourdes taxes et nous soumettre à une réglementation sévère et compliquée, où nous, pauvres Noirs, nous perdons toujours, ce qui entraîne de fortes amendes. Nous travaillons par force pour le Gouvernement, sur les routes, dans les rivières et partout sans être payés ni même nourris, mais nous sommes durement frappés par les hommes de police et emprisonnés sans jugement.

 

Nous étions donc à bout de souffrances. Les incidents relatifs au recrutement de volontaires n'ont été que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Le peuple Agni n'a pas pu comprendre qu'au moment même où l'on nous demandait un sacrifice suprême, celui de nos fils, on en usât avec nous et nos chefs, de pareilles ignominies au lieu de la persuasion paternelle (qui était difficile, il est vrai après la politique de domination brutale suivie envers nous) mais qui aurait trouvé l'écho de nos cœurs au nom de la France avec laquelle nos grands Rois d'autrefois se sont alliés engageant leurs descendants dans ces contrats essentiels.

 

Nous n'entendons pas, Excellence, demander au gouvernement Anglais, parce que ce serait incorrect de notre part, de se mêler de nos difficultés.

 

Nous aurions même voulu abréger notre séjour sur votre libre territoire mais les messages qui nous arrivent de notre pays annoncent que des châtiments sévères nous y attendent en cas de retour imposé par le Gouvernement Anglais et les chefs du pays, au lieu de la clémence qui eût facilité toutes choses.

 

D'autre part, nous sommes convaincus que la France connue de tout temps pour sa politique généreuse envers les Noirs, qu'elle a, dans certains pays, affranchis et même élevés à la dignité de citoyens, ignore des troubles et les violences dont nous sommes l'objet et nous avons entrepris d'éclairer son opinion par son Parlement et le Gouvernement central en envoyant à Paris un mandataire dévoué à nos intérêts, capable de faire entendre nos plaintes et de réclamer l'application judicieuse des traités de Protectorat qui nous régissent et qu'un décret du Gouvernement de la République a contresigné par plus loin qu'en 1887.

 

Nous venons donc demander à votre Excellence de vouloir bien permettre que nous recevions encore l'hospitalité de nos frères appoloniens qui ont avec nous des rapports séculaires d'amitié, jusqu'à ce que notre métropole, mieux informée de notre histoire, de nos droits et de notre esprit de dévouement et de soumission, ordonne de nous accorder à l'avenir le traitement libéral qui nous est dû.

 

Les serviteurs respectueux, obéissants et soumis :

Assam N'Guetta

Sey ( ?) Kakou

Akouabinin (?) Bli

Eguiabe Anomah

Assire (?) Quame

Ehima Coffie

Bouah Akah

Amon Kotua (?)

Somiah Anvo

Aquet Ellichi

Aquequere (?) Assoumou

Yaovohin (?) Bleovie

 

Source : F.O.371/2860, Copie datée du 29 juin 1917 à Accra transmise par le Colonial Office au Foreign Office au sujet des fuites en Gold Coast.

 

ligne 2 004

 

"Mieux vaut s'adresser à Dieu qu'à ses saints"

 

girafe 020


Partager cet article
Repost0
20 juin 2012 3 20 /06 /juin /2012 09:12

005.gif

Ce que réclame la nature de l’homme

 oiseau mouche 013

 

A chaque action demande-toi : de quelle façon me convient-elle ? N'aurai-je pas à m'en repentir ?

 

[…]

 

Avant tout, ne te trouble point ; tout arrive, en effet, chats028.gifconformément à la nature universelle, et sous peu de temps, tu ne seras plus rien, comme ne sont rien Hadrien et Auguste. Ensuite, fixant les yeux sur ce que tu as à faire, considère-le bien ; et, te souvenant qu'il faut être homme de bien et de ce que réclame la nature de l'homme, accomplis-le sans te détourner et de la façon qui t'apparaît la plus juste, mais que ce soit seulement avec bonne humeur, modestie et sans faux-semblant.

 

La nature universelle a pour tâche de transporter là ce qui est ici, de le transformer et de l'enlever de là pour le porter ailleurs. Tout est changeant, mais tout est habituel, et il n'y a pas à craindre qu'il y ait du nouveau, les répartitions sont équivalentes.

 

images (4)Toute nature est contente d'elle-même lorsqu'elle suit la bonne voie. La nature raisonnable suit la bonne voie, lorsque, dans l'ordre des représentations, elle ne donne son assentiment, ni à ce qui est faux, ni à ce qui est incertain ; lorsqu'elle dirige ses impulsions vers les seules choses utiles au bien commun ; lorsqu'elle applique la force de ses désirs et de ses aversions aux seules choses qui dépendent de nous.

 

Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même.

 

DEC 073C

Partager cet article
Repost0
17 juin 2012 7 17 /06 /juin /2012 09:15

MB900439171

Comment gouvernaient-ils ?

 etoiles 017

 

fleche 254TELLI : Conquérir un vaste empire ne suffit pas, encore faut-il pouvoir le gouverner, l’administrer. C’est la tâche qui attend tout conquérant. Ce fut le cas pour Alexandre le Grand et Rome  dans l’Antiquité, pour Charlemagne au Moyen Age et pour Napoléon au début du XIXe siècle. De la capacité à fédérer des peuples soumis, de la méthode de gestion appliquée et de la nature des rapports entretenus avec les populations, dépend le sort et la viabilité de l’empire.

La France et la Grande-Bretagne qui ont eu l’empire colonial le plus vaste en Afrique ne pouvaient y échapper. Comment firent-ils puisque les Français et les Britanniques sur place n’étaient qu’une infime minorité parmi la masse des Africains ? Ils ne connaissaient ni le pays, ni les habitants et encore moins leurs langues et leurs coutumes.

 

fleche 026LUC : Ça a dû être très difficile.

 

fleche 254TELLI : A la veille de la Première Guerre mondiale, grosso modo de 1900 à 1914, l’occupation de l’Afrique était achevée du nord au sud, les territoires coloniaux définitivement tracés et délimités. Les différentes nations européennes occupantes s’affairaient à l’organisation de l’administration dans leurs colonies.

Cette période vit aussi la fin des rivalités coloniales entre Européens sur le terrain (en tout cas sont-elles désormais moins vives ou plus feutrées). L’heure est à la solidarité des colonisateurs face aux colonisés.

La carte de l’Afrique coloniale était prête. Sur cette carte émergeaient deux petits points lumineux correspondant aux deux seuls Etats africains qui ne furent jamais colonisés et ne furent donc à aucun moment éléments d’un empire colonial : l’Ethiopie (hormis plus tard l’épisode de la conquête et l’éphémère domination mussolinienne de 1935 à 1945) et le Liberia (qui accueillit au XIXe siècle les esclaves noirs d’Amérique libérés, d’où son nom).

Pour ne prendre que l’exemple de la France, l’ensemble de ses colonies dans toute l’Afrique noire : son empire colonial africain (sans l’Afrique du Nord : Algérie, Maroc, Tunisie) fut divisé en deux grands groupes géographiques. Le premier s’étendait sur une bonne partie de l’Ouest du continent. Il fut découpé en huit colonies dont l’ensemble constituait l’A.O.F. : l’Afrique Occidentale Française. Figure-toi que parmi ces huit colonies se trouvaient le Mali actuel, la Mauritanie et le Niger dont la superficie, pour chacun de ces Etats équivaut à plus de deux fois celle de la France.

Le second groupe constituait l’A.E.F. : l’Afrique Equatoriale Française qui comportait quatre colonies dont l’ensemble se situait au centre de l’Afrique près de l’équateur d’où son nom. Parmi ces quatre colonies, le Tchad aussi à lui seul, fait plus de deux fois la superficie de la France et la Centrafrique alors appelé Oubangui-Chari est également beaucoup plus vaste que la France.

 

fleche 026LUC : Mais c’est énorme ! La France est toute minuscule à côté.

 

fleche 254TELLI : Oui, et la Belgique ?

30 000 km² face à sa colonie du Congo-Zaïre ( actuelle République démocratique du Congo RDC)  qui s’étend sur 2 345 000 km². Elle est 78 fois plus petite ! Sans compter les autres colonies belges d’Afrique, celles qu’elle hérita de l’Allemagne au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Et l’Angleterre face à sa colonie géante du Nigeria ? Et le Portugal ? 92 000 km² face à l’Angola : 1 246 700 km², le Mozambique : 785 000 km², sans compter le reste de l’empire colonial portugais d’Afrique !

 

fleche 026LUC : Mais comment ont-ils fait ?

 

fleche 254TELLI : Tout cela constituait un très vaste espace à dominer, à gouverner pour ces petites nations européennes, petites voire minuscules en superficie.


fleche 026LUC : A quels Etats africains actuels correspondaient ces colonies françaises ?

 

fleche 254TELLI : En A.O.F. ce sont le Sénégal, la Mauritanie, le Mali (ancien Soudan français), la Guinée, le Burkina-Faso (ancienne Haute Volta), le Niger, la Côte d’Ivoire, le Bénin (ancien Dahomey). On peut y ajouter le Togo, ancienne colonie allemande cédée à la France par le Traité de Versailles en 1919 après la défaite de l’Allemagne. Quant à l’A.E.F. les Etats actuels qui en sont issus sont : le Gabon, la République du Congo (capitale Brazzaville), la Centrafrique (ancien Oubangui-Chari, nom de deux petits fleuves) et le Tchad. La France coloniale s’étendait ainsi de l’Atlantique à l’Océan Indien si on y inclut la Côte française des Somalis avec Djibouti (anciennement dénommé Territoire français des Afars et des Issas) sur la corne orientale de l’Afrique.

 

fleche 026LUC : Comment chaque territoire français était-il gouverné ? Parce qu’il y avait très peu de Français ?

 

fleche 254TELLI : Une véritable Administration coloniale fut mise en place. Elle était très hiérarchisée, très rigide sous la forme d’une pyramide. Tout le sommet, le centre et la majeure partie de la base étaient occupés par des Français. Jamais aucun autochtone n’en fit partie. Tout en bas, à l’extrême ras du  « sol » pointaient quelques auxiliaires africains, anonymes et insignifiants.

Au sommet  des deux grandes Fédérations de colonies : A.O.F et A.E.F, se trouvait un gouverneur général qui résidait dans le chef-lieu de la Fédération, pour l’A.O.F à Dakar, capitale du Sénégal ; pour l’A.E.F à Brazzaville, capitale de l’actuelle République du Congo. Puis chaque colonie ou territoire avait à sa tête un gouverneur de territoire sous les ordres directs du gouverneur général et résidant dans une ville ayant de ce fait le statut de chef-lieu. La colonie était divisée en cercles à la tête desquels était placé le commandant de cercle dépendant du gouverneur de territoire. A son tour le cercle était scindé en subdivisions dirigées par un Administrateur chef de subdivision (ou commandant de subdivision)  puis venaient les cantons et enfin les villages avec respectivement à leur tête un chef de canton et un chef de village, dignitaires africains le plus souvent analphabètes.

Cette hiérarchie peut être schématisée comme suit :

organigramme1

      Tout ce personnel colonial, du gouverneur général à l’Administrateur chef de subdivision, était Français, nommé par le gouvernement français, de même que les membres de leur cabinet (finances, armée, travaux publics, employés de bureau, dactylographes…). Mais l’organigramme de cette Administration coloniale serait incomplet si l’on n’y ajoutait l’échelon inférieur (qui le resta toujours sans aucune possibilité pour ceux qui le composaient de franchir la barrière les séparant des autres catégories de la pyramide). Les membres de cet échelon, tous Africains, s’occupaient de besognes subalternes auxiliaires certes, mais d’une utilité inestimable pour le fonctionnement régulier des rouages du système. Tous commençaient leur carrière en qualité d’auxiliaires subalternes et la finissaient  auxiliaires subalternes.

 

fleche 026LUC : Que faisaient tous ces Africains embauchés par les Français ?

 

fleche 254TELLI : Tout ce que les autres ne faisaient pas : entretien des locaux, chauffeur, manœuvres, plantons (ceux qui assurent des liaisons entre différents services), garçons de bureau, facteurs, domestiques, boys, gardiens, nourrices, cuisiniers, jardiniers... D’autres assumaient une fonction essentielle : servir de liaison entre tous ces Français qui vivaient dans les colonies et la population autochtone.

 

fleche 026LUC : Comment ces Français qui vivaient en Afrique au début de la colonisation communiquaient-ils avec les Africains puisque ces derniers ne parlaient pas le français et que les Français ne parlaient pas leurs langues ?

 

fleche 254TELLI : En effet, c’est là sans doute l’obstacle premier auquel se heurta l’Administration coloniale en Afrique, très peu d’autochtones parlant la langue du colonisateur.

Pour communiquer, il existait un corps spécial qui fut créé avec la colonisation et qui disparut avec elle. Il comportait deux étages : un étage supérieur constitué par les interprètes et un étage inférieur par des gardes appelés « gardes-cercles ».

 

bouton 006Tidiane Diakité, L’Afrique expliquée. Réponses aux questions des jeunes, Cultures croisées.

MB900439170

Partager cet article
Repost0
13 juin 2012 3 13 /06 /juin /2012 10:52

 fleur 010

 

fleur185.gifUn zoologiste qui, en Afrique, a observé de près les gorilles, s'étonne de l'uniformité de leur vie et de leur grand désœuvrement. Des heures et des heures sans rien faire... Ils ne connaissent donc pas l'ennui ?


Cette question est bien d'un homme, d'un singe occupé. Loin de fuir la monotonie, les fleur185animaux la recherchent, et ce qu'ils redoutent le plus c'est de la voir cesser. Car elle ne cesse que pour être remplacée par la peur, cause de tout affairement.


L'inaction est divine. C'est pourtant contre elle que l'homme s'est insurgé. Lui seul, dans la nature, est incapable de supporter la fleur185monotonie, lui seul veut à tout prix que quelque chose arrive, n'importe quoi. Par là, il se montre indigne de son ancêtre : le besoin de nouveauté est le fait d'un gorille fourvoyé.

Cioran, De l'inconvénient d'être né.

 

A méditer et commenter

nature47.gif

Partager cet article
Repost0
10 juin 2012 7 10 /06 /juin /2012 16:55

imagesVivre ou attendre de vivre ?

 

Comme la flatterie ressemble à l'amitié ! Non contente de l'imiter, elle la surpasse et la laisse loin derrière elle. On lui réserve le meilleur accueil, les ouïes grandes ouvertes, et elle descend au plus profond de l'âme, d'autant plus goûtée qu'elle est néfaste. Enseigne-moi à faire la différence entre les choses qui se ressemblent. Un ennemi flatteur vient vers moi en ami. Les vices s'insinuent en nous sous le nom de vertus. La témérité se cache sous le titre de courage. La mollesse se fait appeler modération. Le peureux se fait passer pour prudent. Voilà les dangereuses méprises que nous commettons. Applique à chacune de ces notions son signe distinctif.

 

fleurs_autre012.gifD'autre part, celui à qui l'on demande s'il porte des cornes n'est pas assez stupide pour se tâter le front, ni assez obtus ou inepte pour répondre qu'il n'en sait rien, à moins que tu n'aies réussi à le persuader grâce à une très retorse argumentation. Ces petits jeux nous illusionnent sans nous faire de tort, à la manière des gobelets et des osselets des prestidigitateurs dont c'est l'astuce même qui nous amuse. Explique-moi le truc : le jeu est terminé. Je dis la même chose de ces petites attrapes (tu connais un nom qui aille mieux aux sophismes ?). On ne souffre pas de les ignorer, on ne gagne rien à les comprendre.

 

fleurs_autre020.gifSi tu veux à tout prix clarifier l'ambiguïté des mots, montre-nous que n'est pas heureux celui que le vulgaire tient pour tel, celui qui a accumulé beaucoup d'argent, mais celui qui a tout son bien en son âme, l'homme de droiture et de noblesse qui foule aux pieds ce que les autres admirent, ne voit personne avec qui il souhaiterait échanger sa vie, n'apprécie en l'homme que les qualités proprement humaines, suit l'enseignement de la nature, s'adapte à ses lois, vit selon ses préceptes, celui qu'aucun pouvoir n'est capable de déposséder, celui qui fait du mal un bien, l'homme au jugement sûr, inébranlable, intrépide, qui peut être touché mais non bouleversé, celui que la Fortune, même quand elle tire de toutes ses forces ses traits les plus terribles, égratigne sans le blesser, et encore, rarement. En effet, les coups du sort qui terrassent l'humanité rebondissent sur lui comme sur le toit la grêle battante qui, sans faire aucun mal aux habitants de la maison, crépite avant de fondre.

[…]

 

fleurs autre012Un bien est toujours nécessaire. Ce qui est nécessaire n'est pas toujours un bien puisqu'il est sûr et certain qu'il y a des choses nécessaires de très faible valeur. Personne n'ignore la dignité du bien au point de le rabaisser au niveau des ustensiles de la vie de tous les jours.

 

fleurs autre020Alors quoi ? Tu ne vas pas faire ton possible pour montrer que tout le monde perd son temps à courir après le superflu et que beaucoup d'hommes ont passé leur vie à rechercher les moyens de vivre ? Examine-les l'un après l'autre ou considère-les en bloc : pas un qui ne vive les yeux rivés au lendemain.

 

fleurs autre012Tu me demandes quel mal il y a ? Un mal infini : ils ne vivent pas, ils attendent de vivre. Ils remettent tout à plus tard. Même si nous faisions attention, la vie aurait toujours sur nous une longueur d'avance. Mais, comme nous nous attardons, elle passe comme si elle n'était pas à nous et, si le jour dernier l'achève, elle meurt un peu chaque jour.

Sénèque, Apprendre à vivre, Arléa


cloches010.gif 

Partager cet article
Repost0
2 juin 2012 6 02 /06 /juin /2012 14:52

  route migra Affichage Web moyen

 

Etrangers et immigrés : mythe et réalité 

 

Dans les années 1870, alors qu'il passait en revue une promotion de l'école Polytechnique, le Président Mac-Mahon s'était écrié, en voyant une des futures élites de la nation avec un taux de mélanine largement supérieur à la moyenne des autochtones : « Ah ! C'est vous le Nègre ?! Continuez mon ami, continuez ! » Le Nègre en question s'appelait Sosthène Mortenol, il était d'origine guadeloupéenne et allait devenir un héros de la Grande Guerre en organisant la défense anti-aérienne du camp retranché de Paris.

 

Mortenol n’était pas un immigré africain, il était sujet colonial français, natif des Antilles.

Il y a eu des Africains en France depuis le 16e siècle, et même avant. Mais, c’est bien la 1ère Guerre mondiale qui ouvrit la porte de la France aux Africains et fit prendre conscience aux Français de la présence africaine dans l’Hexagone (189 000 Africains mobilisés et 30 000 tués). Le défilé des soldats coloniaux sur les Champs Elysées le 14 juillet joua également un rôle dans cette prise de conscience.

 

La 2e Guerre mondiale ouvrit encore plus cette porte. Et pour cause ! Les deux conflits nécessitèrent des combattants mais aussi des travailleurs africains pendant et longtemps après. Et depuis, la présence d’Africains dans l’armée française est une donnée constante jusqu’aux indépendances des colonies françaises, voire après. A l’origine le vibrant plaidoyer du lieutenant-colonel Mangin en 1910 pour la « Force noire ».

 

Démobilisés après la guerre et de retour au pays, certains anciens soldats reprirent le chemin de la métropole, non pour des raisons économiques, mais parce que, ayant goûté à la liberté, ils ne supportaient plus les tracasseries de l’administration coloniale sur place. Ils firent souche.

 

De 1919 à 1939, 30 000 soldats africains furent stationnés en France, surtout dans le sud du pays.

 

migrat soldat Affichage Web moyen


En 1926, on évalue à 1915 le nombre des Africains et à 665 celui des Malgaches résidant en France, chiffres certainement sous-évalués car beaucoup d’Africains s’embarquant sans papiers sur les navires assurant la liaison entre la métropole et l’empire colonial échappaient facilement à tout contrôle.

 

Dès 1940, après la défaite, 5 000 tirailleurs africains et malgaches, déserteurs ou évadés des camps de prisonniers, gagnent les rangs de la Résistance et ceux des FFI, se répartissant entre les maquis des 38 départements métropolitains. Le Guinéen Addi Bâ est l’un d’eux. Il participe à la création d’un maquis dans les Vosges avant d’être fusillé par les Allemands en 1943. On trouve également 52 Africains dans les maquis du Vercors, qui participent à tous les combats, libérant les villes de Romans-sur-Isère (août 1944) puis du quartier de la Part-Dieu à Lyon (septembre 1944).

 

Parmi les 1030 Compagnons de l’Ordre de la Libération, la plus prestigieuse des décorations de la France Libre, on compte 14 Africains. De 1939 à 1945, 178 000 Africains sont enrôlés et 25 000 sont tués. Beaucoup de rescapés se sont installés en France et y ont fondé une famille. Le nombre d’Africains présents en France après cette guerre est en augmentation par rapport à celui de l’entre-deux guerres. 13 517 personnes en 1946 et 17 787 en 1962.

 

Les tombes des soldats africains des deux guerres constituent une attache affective très forte qui élargit encore un peu plus la route entre l’Afrique et la France, que les besoins de la reconstruction transforment en boulevard. On connaît l’action de l’Office national d’immigration (ONI). Et surtout, depuis 1946, les ressortissants des colonies sont citoyens français, de par la loi, donc chez eux en France (jusqu’aux indépendances). Parallèlement, on note une augmentation du nombre d’étudiants : 5 815 en 1960-1961.

 

Travailleurs, étrangers, immigrés

 

Dès les années 1960, le nombre de travailleurs africains dépasse celui des étudiants. Entre 1960 et 1963, 15 000 travailleurs recrutés débarquent à Marseille et à Bordeaux. Et à partir de 1974, ces travailleurs étrangers sont désormais désignés par le nouveau vocable d’immigrés.

 

Mots et nuances

 

La confusion dans l’emploi des termes liés à la présence d’étrangers sur le sol français ne contribue pas toujours à la clarté du débat et à son apaisement.

 

Confusion par exemple entre présence africaine et immigration africaine en France, entre ressortissants des DOM-TOM et Africains, enfin entre étrangers et immigrés. La définition de ces deux termes doit prendre en compte un double critère : le critère du lieu de naissance et le critère de la nationalité.

 

Est étranger celui qui, né ou non en France, et ayant sa résidence permanente dans ce pays, n’en possède pas la nationalité. L’immigré est celui qui, né hors de France, entré ensuite dans ce pays, a conservé sa nationalité d’origine ou est devenu Français.

 

migrat France Affichage Web moyen

  (INSEE : enquêtes annuelles de recensement, 2004-2005)

 

Depuis 1992, une stabilisation plus réelle semble s’être imposée en raison du ralentissement de l’immigration, du développement des retours et d’une accélération des francisations… Le nombre des étrangers a réellement diminué, tandis que celui des immigrés a augmenté…

 

Au sein de la population étrangère, le recul des Européens se poursuit. Les non-Européens sont majoritaires pour la première fois avec 52% des étrangers…

 

L’Afrique constitue la première aire géographique de provenance. (Historiens et géographes, juillet-août 2003)

 

La migration africaineest celle qui augmente le plus fortement depuis la fin des années 90. Quatre grands facteurs sont à l’origine de ce phénomène :

bouton 007-La croissance démographique.

bouton 007-La pauvreté.

bouton 007-L’appauvrissement des ressources naturelles : sécheresse, désertification, faible productivité agricole…

bouton 007-Les conflits, guerres civiles notamment

(Catherine Wihtol de Wenden, Atlas des migrations dans le monde).

 

A ces quatre facteurs, il faut en ajouter d’autres, notamment l’impact des « ajustements structurels » sur les économies et les sociétés, imposés par le FMI et la Banque mondiale, dans les années 80-90. Mais aussi le pillage de l’Afrique plus que d’autres régions du monde, hier comme aujourd’hui, pillage des ressources naturelles : mines, terres, forêts, pêche… avec ou sans la complicité des responsables africains, ce qui se traduit par le grossissement des cohortes de migrants.

 

Enfin, dès le lendemain des indépendances, et aujourd’hui encore, arrivent de nouvelles catégories d’expatriés : les réfugiés et les demandeurs d’asile. Autre nouveauté : l’arrivée en France de migrants africains non-francophones ou n’étant pas ressortissants d’anciennes colonies françaises : Angolais, Ghanéens, Congolais de la RDC… Cependant l’essentiel de l’immigration africaine est interne au continent.

 

Phénomène peu étudié en dehors des tragédies qui secouent parfois le continent, la migration des Africains à l'intérieur de leur continent mériterait plus d'attention car révélatrice des réalités dont la connaissance et la maîtrise constituent un préalable à la recherche de solutions au problème de l'immigration illégale.

L'Afrique, contrairement à une opinion généralement répandue, recèle l'écrasante majorité des migrants africains. En Afrique de l'Ouest (principal foyer d'émigration), 7,5 millions de personnes vivent dans un pays autre que le leur, soit dix fois plus que le nombre d'Africains établis en Europe. L'Afrique compte aujourd'hui 40 millions de migrants dont la plupart sont des migrants internes au continent. Tous ne convergent donc pas vers l'Europe. La région la plus concernée par l'émigration vers l'Europe, l'Afrique subsaharienne, « compte 17 millions de migrants internes au continent », tandis que « les trente pays les plus riches de l'OCDE en accueillent moins de 4 millions » 42 % des migrants africains « se concentrent en Afrique de l'Ouest, circulant entre pays voisins ».

Ce premier constat donne la mesure de la mobilité des Africains, dans leur continent.

Ainsi l'Afrique garde-t-elle entre ses murs une partie essentielle de sa misère et ceux qui la portent. (Tidiane Diakité, Les migrations dans la classe : Altérité, identités et humanité, ouvrage collectif, Le Manuscrit Recherche-Université) 

 

Dans les années 90, deux autres vocables naissent et prennent de l’ampleur : sans papiers et clandestins, qui brouillent encore un peu plus le regard porté sur le migrant africain.

 

Pourquoi la France ?

 

« Quand un enfant entend parler à l'école de nos ancêtres les Gaulois, précise un sociologue ghanéen, il entre dans un monde culturel aliénant par rapport à sa propre culture. On lui parle de la Reine d'Angleterre et on lui apprend davantage sur les Gaulois que sur sa propre ethnie. Ses aspirations le poussent vers l'Occident... L'Occident tire avantage de cette aliénation culturelle. Pourquoi les produits de l'Hexagone sont-ils si présents dans les anciennes colonies françaises ? s'interroge-t-il. Question à laquelle il répond : en raison de l'identification des Africains à la culture d'origine de ces marchandises. Et de poursuivre : l'Occident ne peut à la fois accepter les avantages de cette aliénation (l'exportation de sa culture et de ses produits) et en refuser les inconvénients, l'attrait exercé sur les migrants ». En effet, le déversement sur les populations africaines de produits occidentaux de toutes sortes au lendemain des indépendances ainsi que d'images racoleuses de sociétés de consommation, le tout facilité par la révolution des transports et celle des médias constitue pour ces populations des sources de tentation qui les submergent.

Outre l'aspect culturel ou le prestige intellectuel, le titre de « Patrie des droits de l'Homme » fait de la France la destination naturelle de tous ceux qui se sentent menacés dans leur existence ou dans leur liberté. (Tidiane Diakité et Nathalie Mounier, L’immigration n’est pas une Histoire sans paroles, Les Oiseaux de Papier)

 

Des dividendes de la migration pour l’Afrique ?

 

"L'ensemble des pays en développement dans le monde ont reçu de leurs émigrés « entre 167 et 200 milliards de dollars en 2005, soit plus que l'Aide Publique au Développement (APD). En 2006, cette aide s'élevait à 104 milliards de dollars, reprises de dettes comprises." Selon des statistiques sénégalaises, les sommes envoyées par les immigrés représentent en moyenne 14 % du PIB.

Les fonds transférés en Afrique chaque année par les 30 millions de migrants de ce continent répartis dans le monde entier s'élèvent à 50 milliards de dollars par an, selon les sociétés de transfert, dont Western-union. "Les flux que nous traitons progressent d'environ 30 % par an" affirme le directeur exécutif de Money Express qui précise : "En 2005, ils ont atteint 85 milliards de F CFA (130 millions d'euros)".

À ces chiffres, il faut ajouter les transferts d'argent non comptabilisés dans les statistiques officielles. Des fonds importants sont colportés d'Europe en Afrique de main à main ou par des officines plus ou moins clandestines qui échappent à tout contrôle. Pour les responsables des organismes officiels de convoyeurs de fonds, "la somme (envoyée par an) est en réalité beaucoup plus élevée car les statistiques ne prennent pas en compte les transferts informels, évalués entre 80 et 100 milliards de dollars par an pour une diaspora (africaine) d'environ 30 millions d'individus"  (Tidiane Diakité et Nathalie Mounier, L’immigration n’est pas une Histoire sans paroles, Les Oiseaux de Papier).


A cela s’ajoute la formation des jeunes Africains dans les universités, instituts et écoles spécialisées, autant de relais potentiels pour la France en Afrique.

 

Malgré tout, la frontière entre la France et l'Afrique ne doit pas être une barrière entre les Français et les Africains qui ont tant de choses à se dire ! La France doit savoir puiser dans son histoire et dans la force de son génie les moyens de se rassurer que le "barbare africain" ne s'installera pas en vainqueur sur les décombres de ses maisons, mais qu'ensemble, l'Afrique et la France doivent frayer le chemin du futur.

 

 

 

planete divers012

Partager cet article
Repost0
30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 15:24

 

palis-Affichage-Web-moyen.jpg

Spectacle surréaliste ! le palais présidentiel envahi par des manifestants qui, non contents de transformer ce haut lieu du pouvoir en auberge, s'en sont pris au chef de l'Etat qu'ils ont frappé et blessé grièvement.

 

 

Mali : une tragédie lourde de sens

 

L'Afrique aux Africains !

 

Vieux refrain connu, maintes fois ressassé du temps de la fièvre des indépendances, passage obligé dans tout discours et toute rencontre d'élites africaines dans les années 1950-1960.

Les Africains en Afrique et ailleurs ont passé des nuits blanches et des journées entières à suivre dans le détail les débats de la dernière campagne électorale en France, avec un point de fixation :

 

Qu'en sera-t-il de la Françafrique ?

 

Pour tous, l'important, une fois le nom du nouveau président connu, le 6 mai 2012, c'était de savoir ce que deviendraient les relations entre la France et l'Afrique, tout particulièrement la Françafrique ( ou Françafric !). Cela semblait le seul intérêt de cette élection pour beaucoup d'entre eux. On suivait alors le moindre mot, le moindre signe se rapportant à l'Afrique et au changement que le nouveau président introduirait ou non dans les rapports avec ce continent ,comme si le destin de ce dernier ne pouvait se dessiner qu'en France, et non en Afrique même, par les Africains eux-mêmes. L'Afrique aura-t-elle besoin, ad vitam aeternam, d'un tuteur pour être, après 50 ans de souveraineté proclamée [voir Tidiane Diakité, 50 ans après, l'Afrique, Arléa].

Ce qui se passe actuellement au Mali est riche de signes révélateurs, à la fois de l'état de ce pays comme de celui de tout un continent. Alors que les Africains et leurs dirigeants ont les yeux rivés sur l'élection présidentielle française, à leur côté, agonise, lentement un Etat, le Mali, patrimoine historique, culturel, véritable mémoire de tout un continent ( des sites et monuments sont classés au patrimoine mondial de l'UNESCO), dans l'indifférence générale. Qui, en Afrique, a conscience du symbole que représenterait la probable désintégration du Mali, ce trésor culturel du passé africain?

L'agression sauvage du président malien de transition, le 21 mai 2012, dénote, en plus de l'aspect strictement politique, la déliquescence d'une certaine culture et la transgression de codes sociaux dignes d'intérêt. On a osé agresser physiquement un chef d'Etat dans l'exercie de ses fonctions, qui plus est, un homme âgé de 70 ans. La sacralité et le respect dus à l'âge ont vécu ! Les codes sociaux les plus traditionnellement ancrés dans les cultures sont-ils, eux aussi, en déliquescence, à l'image du pays lui-même ? Ce pays semble désormais marcher sur la tête, pris d'un soudain vertige, sans boussole ni gouvernail, ballotté au gré des vents mauvais qui le font dériver inexorablement vers les rivages insondables de l'abîme. Et que dire du reste ?

presid-Affichage-Web-moyen.jpg

La démocratie n'a-t-elle pas pour fonction première le respect de l'autre et de ses opinions ? N'a-t-elle pas pour vertu principale d'éviter coups de fusil et coups de poing en guise de débat et de confrontation d'idées ? En Afrique, elle ne permet d'éviter ni les uns ni les autres.

Face au spectacle désolant de ce grand pays qui chancelle, se défait, et tombe de jour en jour, de plus en plus en lambeaux, aucune voix ne s'élève, ni individuellement ni collectivement. Les Etats voisins ne voient ni n'entendent... rien qui puisse troubler leur petit "confort national".

Et la CEDEAO ? Est-elle fière de son oeuvre au Mali ? Elle s'est bien sûr donné la peine de produire des plans de "sortie de crise" ainsi que des discours, mais pour le résultat que l'on sait.

 Et l'Union africaine elle-même, qui semble avoir perdu le sens et la pertinence du mot union ! Où est-elle ? Voilà tout un continent muet, frappé d'anémie politique et mentale, face au spectacle de la décomposition d'un Etat membre, et d'une tragédie qui devrait le toucher au premier chef.

Le parallèle est saisissant : quand en Europe, tous les Etats de l'Union européenne accourent au chevet d'un des leurs en proie à des difficultés financières, en Afrique, l'Union africaine tourne le dos à l'un des siens, gravement blessé, en voie de disparition, par la perte de sa substance.

L'Afrique souffre cruellement d'un manque de leadership. Parmi cet aréopage rutilant sans inspiration ni vision de dirigeants, aucune personnalité ne fait autorité, aucun esprit ne brille pour illuminer et guider.  

Quant à l'intéressé lui-même, le président malien venu se faire soigner au Val-de-Grâce, à Paris, selon ses proches : "Si son état physique est relativement satisfaisant, son moral inquiète : le président de transition est plus affecté par l'image déplorable que son agression a donné du Mali que par cette agression elle-même. Et pourtant il a frôlé la mort". Cette image déplorable se confine-t-elle au seul Mali ?

Si seulement le Mali pouvait autant attirer le regard et l'attention des Africains que l'élection présidentielle française. Comment ne pas souscrire à l'avis de ce lecteur de Jeune Afrique : "L'agression du présdent intérimaire malien par des partisans de la junte, le 21 mai, est la goutte d'eau qui risque de faire déborder le vase. C'est une humiliation pour tous les Africains qui se donnent en spectacle et illustrent leur incapacité à gérer efficacement une crise..." (Jeune Afrique, Courrier des lecteurs, 27 mai 2012)

Autre indice révélateur. Combien de chefs d'Etat africains ont déjà défilé à l'Elysée depuis le 6 mai ? Et combien sont-ils allés au Mali depuis 6 mois ? Combien ont parlé du Mali ?

Il serait temps, en effet, pour les Africains, leurs dirigeants surtout, de penser tout autant à la France-Afrique qu'à l'"Afrique-Afrique."

canstock1134289

Partager cet article
Repost0