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10 octobre 2015 6 10 /10 /octobre /2015 06:34

SÉNÈQUE : POUR LA TRANQUILLITÉ DE L’ÂME

Entre simplicité et rutilance, quel choix ?

Tous les développements de La Tranquillité de l'âme [=discours sur la tranquillité de l'âme] vont dans le même sens et répondent, de manière plus ou moins directe, à la même question : comment atteindre la tranquillité et la vie heureuse ? Comment se défaire de nos hésitations et de nos va-et-vient perpétuels pour connaître enfin la sérénité ?

SÉNÈQUE : POUR LA TRANQUILLITÉ DE L’ÂME

...

Te voilà en proie à quelque difficulté. La Fortune, à ton insu, dans ta vie publique ou dans ta vie privée, t'a coulé autour du cou un nœud que tu ne peux ni desserrer ni défaire. Songe alors aux esclaves qu'on enchaîne : ils ont dans un premier temps du mal à supporter leur fardeau et les liens qui entravent leurs jambes ; puis, lorsqu'ils se sont résignés à ne plus se révolter mais à accepter leur situation, la nécessité leur apprend à supporter leur sort avec courage et l'habitude leur facilite la tâche. Tu trouveras dans n'importe quelle situation de quoi te divertir, te détendre et te faire plaisir pourvu que tu veuilles bien relativiser tes malheurs plutôt que te les rendre insupportables.

Voici le plus grand service que la nature nous ait rendu : comme elle savait à quelles misères nous exposait notre naissance, elle a inventé, pour adoucir nos malheurs, l'habitude, qui a tôt fait de transformer les plus graves tourments en une présence familière. Personne ne pourrait résister longtemps, si l'adversité gardait dans la durée la même violence que lors du premier assaut.

 

Le fardeau commun:chacun sa chaîne

Nous sommes tous liés à la Fortune : chez certains, la chaîne est dorée et lâche, chez d'autres elle est courte et de grossière fabrique, mais quelle importance ? Tout le monde est enfermé dans la même prison, et même ceux qui tiennent les autres enchaînés le sont eux-mêmes — à moins que tu n'estimes qu'une chaîne est plus légère quand on la porte au bras gauche [la coutume voulait que le condamné soit attaché à son geôlier par le bras gauche]. L'un est lié par les honneurs publics, l'autre l'est par la richesse. Certains sont écrasés par le poids de leur noble naissance, d'autres le sont par celui de leur basse condition. Certaines têtes sont soumises au pouvoir d'autrui, d'autres le sont à leur propre pouvoir. Certains sont cantonnés en un lieu donné en raison d'une sentence d'exil, d'autres le sont en raison de leurs fonctions sacerdotales : mais dans tous les cas, la vie est un esclavage.

 

Des vertus de l’habitude ?

Aussi faut-il s'habituer à sa propre condition, s'en plaindre le moins possible et saisir tous les avantages que l'on a à portée de main : aucune situation n'est si terrible qu'une âme sereine ne puisse y trouver une source de réconfort. Souvent, des lieux exigus se prêtent à de nombreux usages grâce à l'œil expert de l'architecte, et un bon ordonnancement de l'espace rend le moindre petit recoin habitable. Face aux difficultés, fais appel à ta raison : ce qui était dur peut s'adoucir, ce qui était étroit s'élargir, et le fardeau peut devenir léger quand on sait le porter.

En outre, ne laissons pas trop libre cours à nos désirs ; maintenons-les dans un périmètre limité puisqu'ils ne se laissent pas enfermer totalement. Abandonnons ce qui ne peut pas, ou difficilement, se réaliser et tenons-nous-en à ce qui, étant à notre portée, titille nos espérances. Mais gardons bien à l'esprit que les objets de nos désirs sont tout autant frivoles les uns que les autres et que, sous des dehors divers, ils sont, au fond, tous aussi vains. Et n'allons pas envier les grands de ce monde : ce que nous prenons pour un sommet n'est en réalité que le bord d'un précipice.

SÉNÈQUE : POUR LA TRANQUILLITÉ DE L’ÂME

...

Grandeur et servitude

A rebours, ceux qu'un sort inique a placés sur ces dangereuses arêtes gagneront en sécurité s'ils n'attachent aucun orgueil à une situation qui prête en elle-même à l'orgueil et s'ils ramènent autant que possible leur condition à un niveau plus humble. Bien des hommes sont obligés, il est vrai, de rester sur le faîte où ils se trouvent, car ils ne pourraient en descendre sans chuter ; mais qu'ils attestent du moins que le plus grand poids à porter est de devoir peser sur les autres et que, si de leur hauteur ils dominent la foule, ils le font comme des crucifiés cloués sur leur croix. Que leur justice, leur magnanimité, leur humanité et leur générosité bienveillante leur ménagent, contre un heureux coup du sort qui les ferait tomber, de nombreuses protections dont la perspective leur permette de regarder plus sereinement l'abîme devant lequel ils se trouvent.

Rien néanmoins ne saurait mieux nous protéger contre ces tourments de l'âme que de toujours mettre une limite à nos ambitions et de leur fixer nous-mêmes un terme raisonnable, sans permettre à la Fortune de le faire. Dans ces conditions, notre âme sera bien aiguillonnée par quelques désirs, mais comme ils seront limités, ils ne l'entraîneront pas dans des aventures périlleuses et infinies.

[...]

Aussi n'est-il plus besoin à présent de recourir à des remèdes trop durs — ils sont désormais derrière nous : tu n'as plus à lutter contre toi-même, à te mettre en colère contre toi-même, à te montrer sévère envers toi-même. Ce qui importe désormais, l'étape finale, c'est d'avoir confiance en toi et d'être convaincu que tu suis le bon chemin, sans te laisser dérouter par les traces de ceux — et ils sont nombreux — qui se sont fourvoyés de tous côtés [...]. Nous allons donc chercher comment l'âme peut avancer d'une allure toujours égale et aisée, se sourire à elle-même, observer avec bonheur ses propres réalisations ; comment, sans interrompre la joie qu'elle en tire, elle peut rester dans cet état de calme et ne connaître ni hauts ni bas : ce sera la tranquillité. Cherchons une règle générale permettant d'atteindre cet état : de ce remède universel, tu prendras la part que tu veux.

Sénèque, la tranquillité de l’âme, Points Essais.

 

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3 octobre 2015 6 03 /10 /octobre /2015 09:38

UNE LANGUE POUR L’UNION SACRÉE

Petite anthologie du « français-tirailleur »

 

 Demba et Dupont

Taillé sur mesure

La Première Guerre mondiale fut l’occasion pour les Français de voir affluer en France une masse d’Africains, 170891, originaires d’Afrique occidentale française (AOF), recrutés sur place et incorporés dans l’armée française. L’immense majorité de ces soldats était analphabète, beaucoup venant directement de leur village de brousse qu’ils n’avaient jamais quitté.

Recrutement au village
Recrutement au village

...

Arrivés en France, de 1914 à 1918, il a fallu, avant de les envoyer au front, leur inculquer un minimum de français, afin qu’ils puissent ensuite se fondre dans l’armée, comprendre les ordres et consignes, et communiquer avec leurs camarades métropolitains. Une langue fut hâtivement créée à cette fin : le « français-tirailleur », plus tard appelé le « français-petit nègre » qui, popularisé par les tirailleurs de retour, connaîtra un énorme succès en Afrique, en influençant (aujourd’hui encore) le français parlé par beaucoup d’autochtones.

UNE LANGUE POUR L’UNION SACRÉE

...

Une grammaire exotique

Le français-tirailleur fut forgé à partir de quelques langues parlées en AOF, tout particulièrement le bambara appartenant au groupe malinké, majoritairement parlé au Mali.

Le manuel rédigé qui fut le premier support de ce français spécial, est un modèle du genre, riche de signification. Son auteur décréta d’autorité que l’article n’existe pas dans les langues parlées en AOF, que le genre est toujours masculin. Ainsi, une jument devient « un cheval-femme ».

La formule magique « y en a » doit toujours remplacer le verbe être : « tirailleur y en a bon, lui toujours obéir ».

« y en a » doit aussi remplacer le verbe avoir ainsi que les démonstratifs : « Moi y en a gagner cheval ».

Les possessifs, « sa », « notre », se substituent à « pour lui », « pour nous ».

Les verbes sont toujours conjugués à l’infinitif, parfois précédés d’une indication de temps, ce qui donne : « Encore trois jours, toi partir ».

Le féminin n’existe pas, ma tête devient « mon tête ».

Quant au pluriel, il valait mieux l’éviter, ou l’exprimer par le singulier précédé de « beaucoup », ou de « trop », prononcé « tro-pe », auquel on pouvait éventuellement ajouter le nombre, ainsi : « ça y en a moutons trois ».

 

C’est ce manuel qui servit de moyen d’apprentissage du français pour les soldats africains, français également appris avant d’être enseigné par des sous-officiers ou « maîtres de langue » métropolitains.

 

Cet enseignement fut lui aussi spécifique, indépendamment de la spécificité linguistique. Les leçons étaient des leçons à thèmes, axées sur la guerre, une véritable idéologie destinée à donner aux soldats africains l’image et l’idée qu’on souhaitait qu’ils retiennent et qui puissent modeler leur vision de cette guerre et de ses protagonistes, déterminer leur action.

 

Leçon 89 :

La France, pays de paix et de liberté, injustement attaquée

Tout le monde y en a content, aimer France, parce que France y en a pays bon,

Parce que France y en a courage beaucoup,

Parce que France y en a lutter contre Allemagne,

Y en a empêcher lui faire le monde esclaves,

Comme ça, monde y en a rester libre.

France seulement y en a lutter Allemagne commencement guerre,

France y en a perdu beaucoup soldats,

Y en a perdu beaucoup tirailleurs,

Mais y en a content quand même,

Parce qu’y en a donné liberté à tous,

Y en a donné liberté au Sénégal, [Sénégal : ici terme générique désignant l’AOF]

Y en a donné liberté Belgique, et tout le monde,

Aussi tout le monde y en a content lui.

Leçon 69 :

Pourquoi l’Allemagne a-t-elle voulu la guerre ?

Allemagne y en a vouloir vaincre France,

Lui y en a travailler, y en a rien dire,

Y en a faire beaucoup canons,

Y en a faire beaucoup mitrailleuses,

Y en a faire tout ça avant guerre,

Parce que y en a vouloir manger France,

Y en a vouloir manger Sénégal [=Afrique]

Parce que Sénégal y en a France [=l’Afrique c’est la France]

Lui y en a vouloir faire tout ça esclaves pour lui,

Mais y en a travailler, y en a rien dire.

France, lui, y en a pas vouloir guerre,

Parce que France y en a pas vouloir faire canons comme Allemagne avant guerre.

Parce que France y en a bon beaucoup.

Alors, quand Allemagne y en a prêt complet,

Y en a envoyer soldats contre France,

Y en a déclarer guerre à France.

Revue de troupes noires

Leçon 70 :

Les buts de guerre de l’Allemagne

Toujours Allemagne y en a beaucoup orgueilleux, lui y en a jaloux.

Parce que France, Angleterre et pays alliés,

Y en a riche beaucoup,

Y en a colonies beaucoup.

Lui, y en a colonie un peu seulement,

Mais y en a orgueilleux,

Y en a vouloir être plus fort que tous,

Y en a vouloir être maître du monde entier,

Alors, lui, y en a préparer pendant 40 ans,

Y en a faire la guerre quand y en a prêt, complet,

Pour faire esclaves blancs et noirs, beaucoup.

Alors, tout le monde y en a lever contre lui,

Tout le monde y en a venir France pour faire bataille ;

Maintenant, y en a pas content pour ça,

Mais y en a trop tard,

Alliés y en a vouloir écraser Allemagne,

Comme ça paix y a toujours dans monde.

Si brigand y en a jeter contre ton case,

Toi, y en a faire quoi ?

Y en a appeler camarades et tout le monde y en a punir brigand.

1918, défilé de la victoire
1918, défilé de la victoire

...

Leçon 100 :

Quels avantages pour l’Afrique ?

Les leçons d’une guerre

Beaucoup tirailleurs y en a gagné citations,

Beaucoup y en a gagné Croix de Guerre,

Mais, y en a pas moyen écrire tout ici,

Parce que y en a beaucoup trop ;

Français, beaucoup aussi y en a gagner.

Français et Sénégalais [Africains] y en a bons soldats.

Y en a maintenant même chose frères,

Y en a fait bataillon ensemble,

Y en a blesser ensemble,

Sang sénégalais [Africains] y en mélangé sang français souvent.

France y en a oublier jamais ça.

Après victoire, France y en a content aider Sénégal,

Pour que Sénégal y en a être bien et heureux.

Interrogatoire

Ces leçons et cette pédagogie de la guerre ont-elles atteint leur objectif ?

Mieux qu’un discours, le loyalisme des combattants africains et leur adhésion sans réserve à la cause de la « mère-Patrie » ne s’illustrent-ils pas tout entier dans ce dialogue étonnant entre un officier allemand et un soldat africain capturé par l’ennemi avec d’autres soldats français, au cours d’un interrogatoire on ne peut plus orienté :

Toi, pas Français, toi nègre, pourquoi te battre ?

Madame la France, y en a même chose bon maman, y en a z’enfants blancs, y en a z’enfants noirs, y en a tout lé z’enfants défendre maman !

 

Madame la France
Madame la France

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27 septembre 2015 7 27 /09 /septembre /2015 08:19
AFRIQUE, LE DÉFI DE LA DÉMOGRAPHIE

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AFRIQUE, LE DÉFI DE LA DÉMOGRAPHIE

Danse sur un volcan

En 2050, un terrien sur 4 sera Africain

L’étude de l’Institut national d’études démographiques (INED) publiée début septembre 2015 sous le titre : « Tous les pays du monde » est riche d’enseignement et inspire légitimement une réflexion sur la situation démographique du continent africain, tout particulièrement l’Afrique subsaharienne, car, de toutes les régions du monde, c’est cette partie qui attire l’attention par la spécificité de son dynamisme démographique.

Selon cette étude, d’ici à 2050, la population du continent africain augmentera de 111%, pour atteindre 2,5 milliards d’habitants, avec 1,3 milliard de nouveaux habitants. Ce bond spectaculaire est lié à une fécondité elle-même exceptionnelle pour ce XXIe siècle. Quand la moyenne mondiale du nombre d’enfants par femme s’établit à 2,5, la moyenne africaine est de 4,7, avec des pics de naissances dans la plupart des États. Le nombre d’enfants par femme diminue partout dans le monde sauf en Afrique.

Seize pays atteignent un taux de fécondité supérieur à 5 enfants par femme, et 8 pays se classent parmi les plus féconds au monde, avec plus de 6 enfants par femme. Selon l’INED, les femmes donnant naissance à plus de 6 enfants se trouvent désormais tous en Afrique, pour l’essentiel.

Le Niger est de loin champion avec plus de 7 enfants par femme. Suivent le Soudan du Sud : 6,9, la République Démocratique du Congo et la Somalie avec 6,6, le Tchad : 6,5, la Centrafrique : 6,2, l’Angola : 6,1, le Burkina Faso : 6.

(NB : Il n’est pas sans intérêt de comparer les taux de naissance dans ces pays avec le rang qu’ils occupent dans le Palmarès mondial de IDH (indice de développement humain) et celui du taux de scolarisation, des filles en particulier.)

Évolution de la population mondiale de 1950 à 2015

Part de chaque région dans la population mondiale (%)

Région

1950

1960

1970

1980

1990

2000

2010

2015

Afrique

9,1

9,4

9,9

10,8

11,9

13,3

15,1

16,1

Afrique du Nord

1,9

2,1

2,3

2,4

2,6

2,8

2,9

3,0

Afrique subsaharienne

7,1

7,3

7,7

8,4

9,3

10,5

12,1

13,1

Amérique

13,5

14,1

14,1

13,9

13,7

13,7

13,6

13,5

Amérique du Nord

6,8

6,8

6,3

5,7

5,3

5,1

5,0

4,9

Amérique latine et Caraïbes

6,7

7,3

7,8

8,2

8,4

8,6

8,7

8,6

Asie

55,2

55,9

57,6

59,1

60,3

30,6

60,2

59,8

Asie centrale

0,7

0,8

0,9

0,9

0,9

0,9

0,9

0,9

Asie de l’Est

26,4

26,1

26,6

26,4

25,8

24,4

22,7

21,9

Asie de l’Ouest

2,0

2,2

2,3

2,6

2,8

3,0

3,4

3,5

Asie du Sud

19,5

19,7

20,1

21,2

22,4

23,7

24,6

24,8

Asie du Sud-est

6,5

7,1

7,6

8,1

8,4

8,6

8,6

8,6

Europe

21,7

20,1

17,8

15,6

13,6

11,9

10,6

10,0

Océanie

0,5

0,5

0,5

0,5

0,5

0,5

0,5

0,5

D’hier à demain

La croissance de la population africaine est continue, à un rythme accéléré de décennie en décennie, depuis le milieu du XXe siècle. Les raisons en sont multiples.

La comparaison avec d’autres continents ou régions est ainsi largement à l’avantage de l’Afrique, en nombre absolu, comme en pourcentage.

Croissance de la population mondiale entre 1990 et 2012(en %)

Monde

33,4%

Moyen-Orient

68,2%

Asie hors Chine

42,8%

Chine

19%

Afrique

73,3%

Amérique latine

36,6%

Amérique du Nord

27,9%

Europe

11,5%

Pacifique

11,1%

Demain ?

Pour le meilleur ou pour le pire ?

S’il est légitime de se réjouir de ce sursaut et ce dynamisme démographique de l’Afrique (qui fut longtemps le continent de loin le moins peuplé de tous), il n’en est pas moins légitime de considérer que cette croissance anarchique de sa population pose, à très court terme, une grave question quant à la capacité des États concernés, à produire les ressources nécessaires à la satisfaction des besoins de cette masse supplémentaire de population, en alimentation, santé, écoles (éducation), habitat, transports, emplois… bref, à lui assurer le minimum vital, digne et décent.

 

Le grand nombre et la jeunesse de la population sont une richesse et source potentielle de puissance.

« Cependant, si l'unité de mesure de la puissance est désormais le milliard d'habitants, peut-on assurer aujourd'hui que le milliard africain constitue, en l'état, le salut assuré pour ce continent ? Le taux élevé de fécondité est à la fois cause et conséquence de la pauvreté. Si les enfants africains restent les plus vulnérables, les moins scolarisés, les moins formés et les moins qualifiés, si beaucoup parmi eux n'ont d'autre horizon que la rue, la mendicité et la misère, une fécondité aussi élevée se justifie-t-elle ? Le milliard d'Africains doit-il se résoudre à devenir un milliard d'analphabètes et de nécessiteux écrasés par la misère ?

Selon le professeur Jean-Robert Pitt, il n'est de richesse que d'hommes et de femmes instruits, imaginatifs... Et selon l'adage africain, ce n'est pas la richesse qui fait l'homme, mais l'homme qui fait la richesse. Adage sensé, combien généreux et humain. Mais il faut surtout des hommes et des femmes libres et épanouis, heureux de vivre.

Il y a eu en Afrique une croissance de la production agricole de 2,6 % par an entre 1970 et 2007, mais elle a été annulée par celle de la population qui, dans la même période, s'est élevée de 2,7 %.

Le cas du Niger illustre cette réalité africaine. Régulièrement classé parmi les pays les plus pauvres de la planète dans les différents rapports du Programme des Nations unies pour le développement, ce pays cumule tous les indicateurs négatifs, à la fois effets et causes du sous-développement. Avec un taux d'analphabètes de 83,5 %, une espérance de vie ne dépassant pas 45,7 ans et un revenu par habitant de 170 dollars, il est classé à l'avant-dernier rang mondial dans ces palmarès. Comment justifier des indicateurs aussi mauvais sans prendre en considération la croissance démographique du pays, et son indice de fécondité le plus élevé de la planète : 7,07 enfants par femme ! Avec pour conséquence un bond spectaculaire du nombre d'habitants qui, si la tendance se maintient, passerait de 15,3 millions aujourd'hui à 58,2 millions en 2050. En quarante ans, la population aura été multipliée par 3,8 !

Avec une croissance aussi incontrôlée, comment éviter, demain, les conséquences d'ores et déjà prévisibles, parmi lesquelles la non-satisfaction des besoins alimentaires, le déficit de scolarisation et de formation des jeunes (principalement des filles dans un pays où une bonne proportion de la population reste réfractaire à leur scolarisation), la carence sanitaire et la question de l'emploi ? (malgré l’uranium, l’or, la bauxite, le charbon, le bétail).

Ce qui, compte tenu de l'incapacité du Niger à résoudre tous ces problèmes vitaux posés à la fois, signifie inéluctablement autant de sous-alimentés, d'enfants souffreteux, non scolarisés et par voie de conséquence, autant de futurs handicapés de la vie.

Quelle aide provenant de l'extérieur pourrait être de nature à résoudre autant de problèmes liés tant à des traits culturels qu'à une carence manifeste des pouvoirs publics ? »

Tidiane Diakité, 50 ans après, l’Afrique, Arléa, 2011.

 

Selon une étude des Nations unies, un pays dont la population s’accroit de 2,5% doit consacrer à l’ensemble de cette population, de 5 à 12,5 % de son revenu national selon le cas « sans que soit amélioré d’un iota le niveau de vie de ses habitants », cela n’assurant que les dépenses de « pure préservation ».

De fait, en Afrique, la croissance économique est inéluctablement enrayée par la croissance démographique, d’où cette différence entre le mot et sa réalité. (La croissance en Afrique se distingue de la croissance au Japon ou en Belgique… par son contenu et sa réalité).

AFRIQUE, LE DÉFI DE LA DÉMOGRAPHIE

...

Démographie contre développement ?

L’Afrique n’a jamais su faire face seule au surcroît de ressources et d’investissements nécessaire, à la mesure de l’augmentation de sa population, en même temps qu’aux impératifs de son développement, d’où l’idée de l’aide au développement, initiée par les pays développés, principalement la France, à l’orée des années 60, celles des indépendances des colonies françaises, et l’avènement d’une politique de coopération.

 

La question essentielle est celle-ci :

Cette politique de coopération et d’aide au développement telle qu’elle est menée -dans le cadre multilatéral, bilatéral, public ou privé, ONG, associations diverses, jumelages… — peut-elle constituer une réelle solution pour le développement de l’Afrique, c’est-à-dire, l’amener à la capacité de nourrir, soigner, éduquer sa population, et parvenir ainsi à son émancipation et à la maîtrise de son destin ?

Le résultat de plus d’un demi-siècle d’aide et de coopération ne semble guère plaider en faveur de la manière (ou méthode) dont cette aide est dispensée depuis si longtemps.

AFRIQUE, LE DÉFI DE LA DÉMOGRAPHIE

...

Aide au développement, l’indispensable révision

Il est avant tout essentiel de réviser la pratique de l’aide et de la coopération destinée à l’Afrique, et triompher enfin de ses blocages multiples (du côté des bailleurs comme du côté des bénéficiaires de l’aide).

 

Qu’apporte à l’Afrique du XXIe siècle une aide qui n’aurait pas comme priorité la promotion de l’école, de l’éducation de la jeunesse, la promotion de la femme en amenant celle-ci à la pleine possession des outils matériels, intellectuels et culturels de son émancipation, laquelle passe entre autres, par la maîtrise de sa fécondité ?

 

Qu’apporte à l’Afrique une aide qui  ne mettrait pas au cœur de son programme et de sa pratique la promotion de l’agriculture, la formation des paysans, celle de la jeunesse rurale aux techniques et méthodes de culture garantissant une production suffisante et saine, en préservant la nature et l’environnement ?

Surtout, une aide efficace, en Afrique, est-elle dissociable de l’état de la société, de même qu’une certaine culture et la gouvernance ?

L’Afrique peut-elle se développer enfin, sans la maîtrise de sa démographie, et sans une population en majorité éduquée et qualifiée ?

 

Bref, sans une révision complète des concepts d’aide et de développement adaptés à l’Afrique du XXIe siècle, l’aide s’apparentera à un produit toxique qui déresponsabilise les États, démobilise les consciences et asphyxie l’Afrique.

 

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21 septembre 2015 1 21 /09 /septembre /2015 08:31

ARISTOTE, LE BIENFAITEUR ET L’OBLIGÉ : AMBIVALENCE

Altruisme ou égoïsme, la motivation secrète

Aristote (384-322 av. JC)

Les bienfaiteurs aiment plus vivement, semble-t-il, leurs obligés, que ceux-ci n'aiment ceux qui leur ont fait du bien. Il y a là comme une offense à la raison qui mérite l'examen. La plupart des gens paraissent tirer l'explication du fait que les uns ont une dette à acquitter, les autres une dette à recouvrer; il en irait donc comme dans les prêts à intérêt, où les débiteurs souhaitent la mort de leurs créditeurs, les créanciers de leur côté se préoccupant avec soin du salut de leurs débiteurs. Ainsi les bienfaiteurs désireraient de même que vécussent leurs obligés, dans l'espoir de recouvrer un jour la récompense de leurs bienfaits ; les obligés au contraire ne se soucieraient pas de payer les autres de retour. Peut-être Epicharme [poète comique] soutiendrait-il que s'exprimer de la sorte, c'est voir l'homme sous un mauvais angle. Toutefois il n'y a rien là qui contredise à l'humaine nature, la plupart des gens oubliant volontiers les bienfaits et aimant mieux en recevoir qu'en rendre. Mais la cause de ce fait peut bien paraître plus naturelle et différer de l'explication qu'on donne pour ceux qui ont prêté de l'argent à intérêt. Ceux-ci n'ont pas d'affection pour leurs débiteurs et ne veulent leur salut qu'en vue de recouvrer leur argent. Par contre les bienfaiteurs aiment leurs obligés et s'attachent à eux, même si dans le présent ces derniers ne leur sont d'aucune utilité et ne doivent pas l'être dans l'avenir.

ARISTOTE, LE BIENFAITEUR ET L’OBLIGÉ : AMBIVALENCE

...

L’artiste et l’œuvre

Ces sentiments ne sont pas inconnus aux artistes : tous aiment leur œuvre plus qu'ils ne seraient aimés d'elle si, d'inanimée qu'elle est, elle prenait vie. Les poètes, tout particulièrement, sont animés des mêmes sentiments : ils aiment à l'excès leurs poèmes et les chérissent comme de véritables enfants. L'attitude des bienfaiteurs n'est pas sans analogie avec la leur. L'objet de leurs bienfaits est leur œuvre propre ; ils l'aiment plus que la création n'aime le créateur. En voici la raison : tous trouvent désirable et aimable le fait même d'exister ; or notre existence ne se manifeste que par la force en acte, c'est-à-dire par la vie et l'action. Par la force en acte, celui qui crée quelque chose existe de quelque manière. Il aime donc son œuvre puisqu'il aime l'existence même, conséquence bien naturelle, puisque ce qui est en puissance se révèle dans l'acte par la force qui se déploie. En même temps, le bienfaiteur trouve beau ce qui lui permet d'agir ainsi ; il se complaît à ce qui lui en donne l'occasion. Par contre, l'obligé ne trouve rien de beau dans l'acte du bienfaiteur, mais seulement de l'utile — ce qui provoque moins d'agrément et de sympathie. Or nous tirons de l'agrément de la force qui se déploie dans le présent, de l'espérance qui envisage l'avenir, du souvenir qui porte sur le passé. Toutefois notre agrément le plus vif provient de la force en acte ; il y a là quelque chose qui nous plaît tout particulièrement.

Belle action ou action utile ?

Pour le bienfaiteur son œuvre subsiste, car ce qui est bien est durable, tandis que pour l'obligé l'utilité disparaît rapidement. Ajoutons encore que le souvenir de nos belles actions est agréable, alors que le souvenir des actions utiles ne l'est pas du tout, ou l'est beaucoup moins ; il en va tout autrement, semble-t-il, en ce qui concerne l'attente. Disons encore que l'affection qu'on accorde ressemble à un état de création, l'affection qui nous est témoignée à un état passif. Aussi les gens qui montrent leur supériorité dans l'ordre de l'action manifestent-ils tout naturellement de l'amitié et les traits qui caractérisent celle-ci. Il faut ajouter aussi que tout le monde aime davantage ce qui a coûté beaucoup de peine ; par exemple ceux qui ont fait eux-mêmes leur fortune y tiennent plus que ceux qui l'ont reçue par héritage. Par conséquent recevoir un bienfait ne semble comporter aucune difficulté, alors qu'obliger implique de l'effort. Raison pour laquelle les mères aiment leurs enfants plus que les pères : elles ont souffert davantage pour leur donner la vie et elles ont une conscience plus nette qu'ils leur appartiennent, sentiment qui semble également caractériser proprement les bienfaiteurs.

Aristote, Éthique de Nicomaque.

ARISTOTE, LE BIENFAITEUR ET L’OBLIGÉ : AMBIVALENCE

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8 septembre 2015 2 08 /09 /septembre /2015 09:46

MÉDITATIONS POLITIQUES

 

« Le temps n'est plus gentilhomme, il est agresseur ; il n'est plus complice, il est adversaire. La majorité des Français a peur du présent et de l'avenir : les vieux, les jeunes, les chômeurs, les parents, ceux qui savent et ont peur d'être dépassés, ceux qui ne savent pas et sont paumés.

Avoir peur du temps c'est avoir peur du changement.

Inventer un projet est une grille de lecture de l'avenir.

*

Faute de communautés, faute d'ambitions collectives, nous sommes une foule solitaire composée d'individus narcissiques.

*

La pensée de la mort arrive dès la fin de la carrière ; or celle-ci devient plus précoce alors que la vie s'allonge.

*

L'essence d'une personne se révèle clairement avec l'âge avancé.

*

La plupart des citoyens, des travailleurs, des hommes, se sentent, se savent incapables de peser sur leur propre destin.

Et l'on voudrait qu'ils se sentent responsables. En fait, ils sont dans le « désespoir ».

*

Cette vision prophétique que le secteur laïc semble avoir perdue alors que les religions semblent la redécouvrir...

*

On ne peut pas vivre sans un certain nombre de certitudes. Elles peuvent naître de la proclamation politique, elles doivent naître du bien vivre ensemble, du construire ensemble une société

*

L'une des tâches majeures dans une société complexe consiste à dire qui fait quoi, à préciser les niveaux pertinents de responsabilité et de décision.

Cette tâche est essentielle aujourd'hui alors que nous cessons d'être une société centralisée et hiérarchisée, alors que nous devons tout faire pour cesser d'être une société centralisée et hiérarchisée.

Du paysan au chercheur

Il est des métiers merveilleux et difficiles, que notre société moderne a tort de mépriser.

Celui de maître qui forme nos enfants ;

celui du juge qui arbitre nos différends et assure la paix ;

celui du chercheur qui sans trêve essaie d'étendre le domaine de nos connaissances ;

celui du paysan qui jour après jour essaie d'arracher à la nature tout ce dont nous avons besoin pour vivre.

*

Qu'est-ce qui est le plus important pour l'individu : la distance parcourue ou le niveau atteint ?

La société est responsable de la première.

*

La jeunesse n'est pas une clientèle.

Parce que chaque jeune a encore une vue globale des choses même si elle est imprécise ; parce qu'aussi elle a gardé ses exigences les plus authentiques.

*

On trouve désormais une foule de jeunes qui n'ont plus ni projet ni rêve à plus de quarante-huit heures.

*

Savoir présenter le changement comme une destruction et comme une construction, comme un abandon mais comme une conquête. Sans celle-ci le changement est difficilement accepté.

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Dire à la société et aux multiples communautés qui la composent, les pistes de l'avenir prévisible et souhaité. Leur donner le goût et la possibilité de s'y adapter et de la préparer. Ne pas prétendre faire à leur place.

De là, la nécessité d'émettre un message politique lisible : non des promesses, des perspectives.

*

Nous avons jadis parlé de rupture. Il nous faut désormais parler de « changement de logique ».

Les forces de changement n'apprivoiseront la société que si elles voient loin et marchent patiemment et sans défaillance. Une société ne cherche pas la rupture mais la continuité.

*

L'unité des Français est plus dans leur histoire que dans leur présent. Nous devons faire en sorte qu'elle soit plus encore dans leurs projets communs que dans leur héritage. L'unité des institutions nous est une nécessité et une commodité, elle ne tient pas lieu d'unité de volonté et de destin.

*

Pour conduire un changement nécessaire, la société doit payer un prix. Mais ce prix est moins élevé que celui de nos retards. Le faire comprendre est désormais la première tâche du politique, celle de tous les responsables.

*

Il faut à l'homme pour vivre du beefsteak et des patates dans le panier. Et du rêve, de l'ambition, de l'avenir dans la tête. Ni politique triviale, ni politique folle, une politique triviale et folle. Humaine, quoi !

*

Pour accomplir sa difficile unité, la France a longtemps lutté contre la diversité de ses composantes qui résultait elle-même de la diversité de ses paysages et de ses histoires. Maintenant qu'elle est accomplie, cette unité appelle la reconnaissance des diversités parce que diversité signifie richesse.

*

La vie nationale est faite de tensions.

Déséquilibres et équilibres alternent en se renouvelant. Le rôle du politique n'est pas de faire qu'il n'y ait pas tension, mais que les tensions soient négociées entre partenaires appelés à vivre ensemble. Et si la négociation n'aboutit pas, il revient au politique d'arbitrer.

*

L'une des fonctions majeures du politique c'est d'intégrer la durée dans la gestion du quotidien ; c'est envisager demain pour comprendre aujourd'hui.

Demain mais parfois aussi hier. Car le temps est la dimension du politique.

 

Devise et valeurs

Liberté, égalité, fraternité, ce ne sont pas seulement trois mots mis côte à côte. C'est toute une politique et toute une morale. C'est une règle de vie individuelle et collective. Ce sont des valeurs qui se complètent et se fécondent l'une l'autre. Sans liberté, l'égalité est contrainte et la fraternité n'a pas de sens. Sans égalité, la liberté est cruelle et la fraternité hypocrite. Sans fraternité, l'égalité et la liberté ne sont que des droits : elles ne sont pas les valeurs et les règles qu'elles doivent être.

*

Penser à tous ceux qui éprouvent une panique muette devant la vie !

*

Il nous faut admirer la façon dont les gens se débrouillent dans un monde dont ils ignorent tout.

En France, l’égalité des chances demeure un concept révolutionnaire. Seuls ceux qui mènent le combat pour l'égalité des chances peuvent faire accepter l'inégalité des résultats. Mais aussi ils le doivent

*

Les individus sont moins égaux face à la crise que dans la prospérité Et les temps qui viennent peuvent attenter à nos libertés, détruire notre solidarité Il n'y aura pas de sortie de crise sans solidarité active, sans égalité des chances, sans liberté d'être, de penser et de faire. Il n'y a pas de mobilisation des forces sans égalité. »

Edgar Pisani, Croire pour vivre. Méditations politiques.

 

Qu’est-ce à dire ?

 

La nation et le vivre ensemble

           ou

L’art de bâtir communauté de cœur et de destin

 

La nation n’est pas cette vieille momie décrépite et désincarnée à qui il faut rendre un culte par une logorrhée aux finalités confuses, et un psittacisme sans fin. La nation se vit et se sent dans les actes du quotidien, dans le regard de l’autre et de chacun. Une fois la nation constituée, elle est défendue au besoin par les armes.

Au cœur de la Nation, cette communauté de cœur et de destin, sont des hommes et des femmes, des citoyens libres et conscients, égaux et solidaires, dotés de sensibilité et de dignité, non des esclaves bâillonnés et enchaînés .

 

Cohésion, maître mot

Pour parler de la Nation, encore faut-il la connaître dans son essence.

Pour discourir sur la République, encore faut-il incarner la République, généreuse, ouverte et pacificatrice.

 

Or, la Nation pour certains (qui se croient dépositaires exclusifs de l’idée de nation), comme la République pour d’autres, se résume à une incantation sans vision du passé ni du futur. En somme, la nation sans son histoire et sans les citoyens.

Les uns et les autres, par cette étroitesse de vision, de ce que fait la Nation, la desservent plus qu’ils ne la servent.

En effet, à la différence d'un Empire, voire parfois un État,   la nation ne se construit pas par les armes, à coups de sabre ou de trique, ni même par la loi, mais, au moyen de la conquête méthodique des cœurs et des âmes, par le regard et l’écoute.

On ne fera jamais rien de grand, de durable, aujourd’hui ou demain, qui n’ait pour objet et pour finalité l’humain, dans chaque acte et chaque individu.

 

Une politique, une action nourrie de raison et d’humanité constitue un levier puissant, le matériau idoine, pour bâtir cette communauté de cœur et de destin. Sans le regard affectif, point d’intégration, partant, de cohésion d’aucune sorte. La Nation a besoin de tous pour être.

Il n’y a pas ceux « d’en haut » et ceux « d’en bas », ceux de l’« avant » et ceux de l’« arrière », il n’y a que ceux qui sont tous à bord du même navire, le navire républicain, qui appelle chacun à la manœuvre, pour avancer sur les meilleures eaux, dans les meilleures conditions.

 

Pour ce faire, l’épaisseur humaine est la condition requise, exigible de tout meneur d’hommes qui ambitionne de construire durablement une société unie, épanouie.

MÉDITATIONS POLITIQUES

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Tout se fait avec des Hommes

La société ne sera ni apaisée, ni fraternelle par le mépris des uns pour les autres. Elle ne s’épanouira ni par le sectarisme, ni par l’exclusion. C’est une question de cœur, non de verbe, une question d’état d’esprit, de volonté de partage, de reconnaissance et de respect de l’autre, d’intelligence intuitive enfin, pour un vivre ensemble fondé sur un projet, une vision partagée.

 

« Respecter l’autre, c’est d’abord se respecter soi-même.

Comprendre celui qui n’est pas nous et le respecter permet donc d’économiser beaucoup de sang. » (Maréchal Lyautey)

MÉDITATIONS POLITIQUES

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29 août 2015 6 29 /08 /août /2015 09:14

LES FEMMES FRANÇAISES DANS LES COLONIES D’AFRIQUE

Des auxiliaires de la colonisation ou des nuisances pour l’image de la métropole ?

La présence de femmes françaises blanches dans les colonies d’Afrique fut l’objet d’un vif débat en France et aux colonies, du début à la fin de la colonisation.

Fallait-il admettre des Françaises dans les colonies tropicales d’Afrique, qu’il s’agisse de femmes seules ou d’épouses accompagnant leur conjoint agent de l’administration coloniale, ou opérant dans le privé : commerçant, exploitant forestier…

Dès le début de la colonisation au XIXe siècle et pour longtemps, l’accès aux colonies d’Afrique subsaharienne fut fermé aux femmes célibataires ou seules, ou sévèrement règlementé, tout comme aux hommes pauvres, non employés par l’administration, et ne justifiant pas d’un niveau de ressources jugé décent.

Les sœurs des missions (catholiques ou protestantes), celles des congrégations qui fondaient des écoles, des dispensaires ou des centres sociaux d’éducation de jeunes filles africaines, échappent à ce débat.

La question ne fut jamais véritablement tranchée et il y avait autant d’arguments favorables à cette présence (hormis celle de femmes célibataires) que d’arguments défavorables, marquant une opposition parfois farouche.

Il y eut, de la part de l’État, quelques textes, certes, mais sans réelle portée ni volonté semble-t-il, comme si les gouvernements successifs qui ont eu à se pencher sur cette question éprouvaient quelques difficultés à statuer en la matière.

LES FEMMES FRANÇAISES DANS LES COLONIES D’AFRIQUE

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L’impératif démographique

La question démographique se posait à la fin du XIXe et au début du XXe siècle en France, les gouvernants y étaient sans doute sensibles. En ces temps d’incertitude en Europe, la question était loin d’être secondaire, et le taux de natalité, dans des pays comme l’Allemagne, était regardé de près (la ligne bleue des Vosges oblige !) ; on comprend dès lors qu’en France, on se soucie du taux de natalité par rapport à celui des principales puissances du moment. La question lancinante posée était la suivante :

« La femme qui quitte la France pour aller vivre en pays tropical n’est-elle pas perdue pour la reproduction de la race française et de la race blanche ? »

 

Les services parfois reconnus qu’elle était susceptible de rendre à la France et aux autochtones, par sa présence aux colonies, pouvaient-ils compenser la perte d’enfants qu’elle aurait pu mettre au monde si elle était restée en métropole ?

 

Pour beaucoup, là résidait l’essentiel de l’argumentation en défaveur du départ des Françaises pour les colonies tropicales d’Afrique, la question ne se posant pas pour les colonies de peuplement d’Afrique du Nord, l’Algérie en particulier.

LES FEMMES FRANÇAISES DANS LES COLONIES D’AFRIQUE

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Aspect social

 

Les Françaises aux colonies rendaient d’éminents services à un double niveau.

 

      Vie privée

Tout d’abord, leur influence bienfaitrice sur leur époux était reconnue et appréciée en haut lieu comme au sein des partis dits coloniaux. Ainsi, la Française jouait de fait un rôle modérateur sur la conduite de son mari, sur lequel elle avait le plus souvent une réelle influence morale consistant généralement à le rappeler à une certaine tempérance par rapport à la consommation d’alcool ; en effet, pour certains, l’alcool était considéré comme un antidote facile contre les rigueurs du climat.

« Elle l’empêche presque toujours de sombrer dans l’alcoolisme ou dans l’opiomanie, comme il arrive à trop d’hommes sans foyer ; elle l’empêche surtout de contracter ces lamentables unions avec des femmes indigènes qui constituent, si elles se prolongent, une vraie déchéance morale… » lit-on dans un rapport d’inspection coloniale en Afrique française au tout début du XXe siècle.

 

L’inspecteur appartenait à un corps spécifique parmi le personnel de la colonisation et avait un rôle important.

Résidant en métropole, il se rendait régulièrement  en mission dans les colonies où il remplaçait de fait le ministre de tutelle qui, lui, ne se déplaçait pas. L’inspecteur colonial disposait d’un pouvoir d’investigation sans limite, mais non d’un pouvoir décisionnel. À l’issue de sa tournée, il présentait un rapport destiné au ministre des Colonies et aussi au Parlement (via le ministre), et donnait son avis sur une série de questions si on le lui demandait.

Éducatrice universelle

« La femme possédant quelques qualités qui, Dieu merci, ne sont point rares en France, jouera, en accompagnant son mari, un rôle salutaire, tant dans le modeste cadre de son intérieur que dans les milieux européens et indigènes qu’elle fréquentera, si bien que son influence ne tardera pas à avoir une répercussion sur l’atmosphère de la colonie tout entière. »

De fait, l’influence modératrice exercée par l’épouse sur son mari allait au-delà de la stricte sphère conjugale ou familiale, en agissant sur les méthodes de gouvernement de la colonie en son entier.

C’est le tempérament même de la femme —pensait-on alors— qui l’amène à influer instinctivement et positivement sur l’action des responsables de l’administration coloniale, et sur leurs rapports avec leurs sujets coloniaux.

 

      Vie publique

Ainsi, peut-on lire à ce sujet :

« Ayant presque toujours horreur de la violence, la femme empêche, par sa simple présence, bien des actes de brutalité ; elle inspire une modération et une réserve dont on ne se seraient pas départis, s’ils avaient eu son influence, les malheureux déséquilibrés qui créèrent jadis, par leurs excès, la néfaste légende des "tortionnaires coloniaux". »

 

L’action de la femme n’est pas seulement positive par les abus qu’elle empêche ; elle l’est également si l’Européen déraciné prend conscience qu’elle remplit une fonction sociale véritable vis-à-vis des indigènes, dans la mesure où elle sait s’employer intelligemment à « l’œuvre d’apprivoisement, qui est un des grands objectifs de la politique coloniale ».

 

En se faisant éducatrice, et des Européens, et des Africains, « sans affectation, elle exerce sur les indigènes de son entourage, une influence souvent plus efficace que celle de bien des administrateurs et bien des instituteurs. »

 

Mais, même utile aux colonies, la présence de la Française y est toujours soumise à cette question essentielle :

« La femme blanche peut-elle conserver sa santé sous les tropiques, et peut-elle y procréer et y élever ses enfants ? »

 

L’envers du décor

Une deuxième catégorie de femmes (d’épouses) vivant dans les colonies françaises d’Afrique, donne lieu à un autre tableau aux couleurs sans doute moins vives. On tombe du grenier à la cave.

Elles sont généralement qualifiées de « femmes légères » ou de « dévergondées », et semblent avoir posé quelques problèmes à l’administration coloniale. Les rapports ne sont pas particulièrement tendres à leur égard.

« Celles qui, incapables d’adaptation, et qui considèrent les indigènes avec mépris… ou avec trop d’amour, constituent un fléau qu’il ne faut en aucune façon tolérer dans les colonies… car, elles détruisent sûrement l’indispensable prestige de l’homme blanc sur l’homme de couleur. »

 

Ces deux types extrêmes de femmes aux colonies, « la femme apôtre, ayant l’âme d’un Livingstone, comme la femme médecin ou infirmière, dont l’action est si précieuse en Afrique du Nord, et, à l’autre bout de l’échelle morale, la femme vaine ou stupide qui, même sans être complètement dévergondée, s’exhibera, dévêtue, devant ses domestiques, sous prétexte qu’ "un Noir n’est pas un homme" ou au contraire, prendra plaisir à déchaîner parmi eux des passions déplorables et dangereuses ».

 

Ces deux catégories de femmes, l’éducatrice des hommes et la fantasque défrayant la chronique, ont rempli, en plus des rapports officiels, une partie de la littérature coloniale, de la fin du XIXe au milieu du XXe siècle.

 

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23 août 2015 7 23 /08 /août /2015 06:54

MARC-AURÈLE, PIÉTÉ ET IMPIÉTÉ

Entrer en soi pour voir et savoir

 

Marc-Aurèle (121-180 ap. JC)

 

L'injuste est impie. La nature universelle, en effet, ayant constitué les êtres raisonnables les uns pour les autres, afin qu'ils s'aident les uns les autres selon leur pouvoir, qu'ils ne se nuisent en aucune façon, l'homme qui transgresse cette volonté se montre évidemment impie envers la plus auguste des divinités.

Le menteur aussi est impie, à l'égard de cette même divinité. La nature universelle, en effet, est la mère des êtres véritables, et les êtres véritables sont apparentés à tous les êtres donnés. De plus, cette divinité est encore appelée Vérité et Cause première de toutes les vérités. L'homme qui ment volontairement est donc impie, puisqu'il commet, en trompant, une injustice. Et celui qui ment involontairement l'est aussi, puisqu'il est en désaccord avec la nature universelle et puisqu'il trouble l'ordre en s'insurgeant contre la nature du monde. Car il s'insurge contre elle l'homme qui se porte, même malgré lui, à ce qui est contraire à la vérité. Il avait reçu de la nature, en effet, des directives qu'il a négligées, et il est maintenant incapable de discerner le vrai du faux.

En outre, celui qui poursuit les plaisirs comme des biens et qui fuit les douleurs comme des maux est impie. Il est inévitable, en effet, qu'un tel homme en vienne à reprocher fréquemment à la commune nature de faire le partage entre les bons et les méchants sans tenir compte du mérite, car il arrive fréquemment que les méchants vivent dans les plaisirs et sont en possession de tout ce qui les procure, et que les bons tombent dans la peine et dans ce qui la cause. — En outre, celui qui craint les douleurs craindra aussi un jour quelqu'un des événements qui doivent arriver dans le monde, et c'est déjà une impiété. Quant à celui qui poursuit les plaisirs, il ne pourra pas s'abstenir des plaisirs, et cela est aussi une impiété manifeste. Il faut donc, à l'égard des choses pour lesquelles la commune nature est indifférente — car elle n'aurait pas créé indifféremment les unes et les autres, si elle n'était indifférente aux unes comme aux autres —, il faut, dis-je, que ceux qui veulent suivre la nature et vivre en accord avec la nature soient à leur égard indifférents. En conséquence, quiconque ne reste pas lui-même indifférent à la douleur et au plaisir, à la mort et à la vie, à la célébrité et à l'obscurité, choses dont use indifféremment la nature universelle, commet de toute évidence une impiété. Je dis que la commune nature use indifféremment de ces accidents pour énoncer qu'ils arrivent indifféremment, par enchaînement successif, aux êtres qui naissent et à ceux qui les suivent, en vertu d'une initiative originelle de la Providence, selon laquelle, à partir d'un certain point d'origine, elle aurait pris l'initiative de l'organisation actuelle du monde, arrêtant certaines lois concernant les choses à venir et déterminant les forces qui devaient engendrer les réalités, les transformations et les successions auxquelles nous assistons.

La nature pour guide

Il serait plus digne d'un honnête homme de sortir du milieu des hommes sans avoir connu le goût du mensonge, de toute espèce de fausseté, d'arrogance et d'orgueil. Mais expirer avec le dégoût de ces vices, c'est avoir tout au moins navigué en changeant de manœuvre. Préfères-tu t'obstiner dans ta perversité, et l'expérience ne te persuade-t-elle point encore de fuir cette peste ? Car c'est une peste que la corruption de l'intelligence, et beaucoup plus pernicieuse que telle infection et altération de l'air qui nous entoure. Cette peste-ci, en effet, s'attaque aux animaux en tant qu'animaux ; mais cette peste-là s'en prend aux hommes en tant qu'hommes.

 

Ne méprise pas la mort, mais fais-lui bon accueil, comme étant une des choses voulues par la nature. Ce que sont en effet la jeunesse, la vieillesse, la croissance, la maturité, l'apparition des dents, de la barbe et des cheveux blancs, la fécondation, la grossesse, l'enfantement et toutes les autres activités naturelles qu'amènent les saisons de ta vie, telle est aussi ta propre dissolution. Il est donc d'un homme réfléchi de ne pas, en face de la mort, se comporter avec hostilité, véhémence et dédain, mais de l'attendre comme une action naturelle. Et, de la même façon que tu attends aujourd'hui l'instant où l'enfant qu'elle porte sortira du ventre de ta femme, tu dois semblablement attendre l'heure où ton âme se détachera de son enveloppe.

Et si tu veux encore un précepte tout simple, qui te touche le cœur et te rende accommodant entre tout à l'égard de la mort : porte ton attention sur les choses dont tu vas te séparer et sur les mœurs auxquelles ton âme ne sera plus mêlée. Il ne faut pas pourtant se buter contre les hommes, mais leur marquer de l'intérêt et les supporter avec douceur, sans oublier toutefois que la mort te délivrera des hommes qui n'ont pas les mêmes principes que toi. La seule chose, en effet, s'il en est une, qui pourrait te rattacher à la vie et t'y retenir, c'est qu'il te fût permis de vivre avec des hommes qui auraient en honneur les mêmes principes que toi. Mais tu vois bien, maintenant, quelle lassitude occasionne le désaccord dans l'existence commune, au point de te faire dire : « Hâte-toi, ô mort, de peur que par hasard, moi aussi, je ne m'oublie moi-même. »

 

Celui qui pèche, pèche contre lui-même; celui qui est injuste, se fait tort à lui-même en se rendant lui-même méchant.

 

On est souvent injuste par omission, et non pas seulement par action.

 

Il suffit que l'opinion présente soit convaincante, que l'action présente soit utile à la communauté, et que la disposition présente soit accueillante à tout ce qui provient de la cause extérieure.

MARC-AURÈLE, PIÉTÉ ET IMPIÉTÉ

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L’instinct social

Effacer ce qui est imagination ; réprimer l'impulsion ; éteindre le désir ; rester maître de sa faculté directive.

 

Une est l'âme qui est répartie entre les animaux dépourvus de raison ; une est aussi l'âme qui est partagée entre les êtres doués de raison, comme une est la terre pour tout ce qui naît de la terre, une la lumière en laquelle nous voyons, un l'air que nous aspirons avec tous ceux qui voient et tous ceux qui respirent.

 

Tous les êtres qui ont part à quelque chose de commun recherchent ce qui leur est semblable. Tout ce qui est terreux incline vers la terre, tout ce qui est liquide tend à se déverser, tout souffle agit de même, de
sorte qu'il faut, pour les séparer, opposer des obstacles et user de violence. Le feu qui monte par la vertu du feu élémentaire, est à tel point disposé à flamber avec tout feu d'ici-bas, que toute matière, pour peu qu'elle soit plus sèche, est facilement inflammable, parce qu'elle est moins mélangée de tout ce qui peut empêcher son inflammation.

Ainsi donc tout être qui participe de la commune nature intelligente s'efforce de rejoindre ce qui lui est apparenté, et davantage encore. En effet, plus un être est supérieur aux autres, plus il est prêt à se mêler et à se fondre avec ce qui lui est apparenté. De là vient précisément qu'on découvre, chez les êtres dépourvus de raison, des essaims, des troupeaux, des nichées, et comme des amours. C'est qu'en eux, en effet, il y a déjà des âmes, et que l'instinct social se révèle intense en ces êtres supérieurs, alors qu'il n'est ni entre les plantes, ni entre les pierres ou les pièces de bois. Chez les êtres doués de raison, on observe des gouvernements, des amitiés, des familles, des réunions, et, en cas de guerre, des conventions et des trêves. Et chez les êtres d'une supériorité encore plus affirmée, même s'ils sont distants, il se forme une espèce d'union, comme entre les astres. Semblablement, l'effort pour s'élever vers ce qui leur est supérieur peut engendrer la sympathie, même entre des êtres que la distance sépare.

Or, rends-toi compte de ce qui présentement arrive. Seuls, en effet, les êtres raisonnables oublient présentement cet empressement et cette inclination des uns envers les autres, et c'est là le seul cas où ne s'observe plus cette commune attirance. Mais ils ont beau fuir, ils seront repris, car la nature est la plus forte. Tu le verras bien, si tu fais attention à ce que je dis. Tu aurais plus vite fait de trouver un objet terrestre sans contact terrestre, qu'un homme qui soit isolé de l'homme.

 

Tout porte son fruit, l'homme, Dieu et le Monde, et chacun le porte en sa saison propre. Quoique l'usage n'applique couramment ce mot qu'à la vigne et aux autres végétaux analogues, cela n'importe pas. La raison a un fruit à la fois collectif et particulier ; de ce fruit en naissent d'autres semblables, de même nature que la raison même.

 

Si tu le peux, dissuade-les ; si tu ne le peux pas, souviens-toi que la bienveillance t'a été donnée pour ce cas. Les Dieux eux-mêmes sont bienveillants aux gens de cette sorte ; maintes fois même ils les aident à obtenir la santé, la richesse et la gloire, tant ils sont bons ! Cela t'est possible, à toi aussi; ou bien alors, dis-moi qui t'en empêche ?

 

Travaille, non comme un misérable, ni comme un homme qui veut se faire plaindre ou admirer, mais soumets uniquement ta volonté à ceci : à se mouvoir et à se contenir comme le juge à propos la raison de la cité.

— Aujourd'hui, je suis sorti de tout embarras, ou plutôt j'ai désavoué tout embarras, car il n'était pas hors de moi, mais en moi, dans mes opinions.

MARC-AURÈLE, PIÉTÉ ET IMPIÉTÉ

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Tout se transforme

Tout est en cours de transformation. Toi-même aussi tu es en état de transformation continue et, à certains égards, de dissolution ; de même pour l'univers entier.

 

La faute d'un autre, il faut la laisser où elle est.

 

La cessation d'une activité, le repos et comme la mort d'une impulsion, d'une opinion, ne sont pas un mal. Passe maintenant aux périodes de l'âge telles que l'enfance, l'adolescence, la jeunesse, la vieillesse; là aussi, toute transformation est une mort. Est-ce terrible ? Passe maintenant à la vie que tu as menée auprès de ton grand-père, puis auprès de ta mère, puis auprès de ton père. Et, trouvant bien d'autres dissolutions, transformations et cessations, demande-toi : Est-ce terrible ?

Ainsi donc, il n'en ira point autrement de la cessation, du repos et de la transformation de ta vie tout entière.

 

De la même façon que tu es un complément de l'organisme social, que chacune de tes actions soit un complément de la vie collective. Toute action donc qui ne se rapporterait pas, soit de près, soit de loin, à une fin commune, désorganise la vie de la cité, ne lui permet pas d'être une et revêt un caractère séditieux, tout comme un citoyen qui, dans un groupe, fait bande à part et se sépare de la concorde requise.

 

Colères et jeux d'enfants, « frêles âmes soulevant des cadavres » : voilà pour rendre plus claire l’Évocation des Morts.

 

Remonte au caractère de la forme, considère-la en te la représentant dépouillée de matière ; puis, détermine aussi le temps que doit, au plus, normalement durer ce caractère particularisé.

 

Tu as enduré mille maux, parce que tu ne t'es point contenté de ce que ta faculté directrice se conformât au rôle pour lequel elle a été constituée. Mais c'en est assez !

 

Lorsqu'on te blâme ou qu'on te prend en haine, ou que des hommes contre toi manifestent de tels sentiments, tourne-toi vers leurs âmes, pénètre à l'intérieur et vois ce qu'ils sont. Tu verras qu'il ne faut pas te tourmenter pour les amener à se faire quelque opinion sur toi. Il faut pourtant leur être bienveillant, car par nature ce sont des amis. Les Dieux eux-mêmes viennent à leur aide de toutes façons, par des songes, par des oracles, pour que ces hommes obtiennent cependant les biens dont ils s'inquiètent.

Nature et naturel

Les cycles du monde sont toujours pareils, en haut comme en bas, d'un siècle à un autre. Ou bien l'Intelligence universelle fait à chaque instant acte d'initiative ; accepte alors l'initiative qu'elle donne. Ou bien elle n'a pris qu'une fois pour toutes l'initiative, et tout le reste en découle par voie de conséquence... Bref, s'il y a un Dieu, tout est pour le mieux. Mais si tout marche au hasard, ne te laisse pas toi-même aller au hasard.

Bientôt la terre nous recouvrira tous. Ensuite cette terre se transformera, et celle qui lui succédera, à l'infini se transformera, et de nouveau à l'infini changera la terre qui en naîtra. En considérant les agitations de ces vagues de changements et de transformations et leur rapidité, on méprisera tout ce qui est mortel.

 

Tu peux supprimer bien des sujets pour toi de trouble superflus et qui n'existent tous qu'en ton opinion. Et tu t'ouvriras un immense champ libre, si tu embrasses par la pensée le monde tout entier, si tu réfléchis à l'éternelle durée, si tu médites sur la rapide transformation de chaque chose prise en particulier, combien est court le temps qui sépare la naissance de la dissolution, l'infini qui précéda la naissance comme aussi l'infini qui suivra la dissolution !

 

— Tout ce que tu vois sera bientôt détruit, et tous ceux qui assistent à cette dissolution seront bientôt détruits, et celui qui meurt dans l'extrême vieillesse sera réduit au même point que celui dont la mort fut prématurée.

Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même, GF Flammarion.

MARC-AURÈLE, PIÉTÉ ET IMPIÉTÉ

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16 août 2015 7 16 /08 /août /2015 08:11

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

Du bon usage des plaisirs

Épicure (341-270 av. JC)
Épicure (341-270 av. JC)

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Qu'on ne remette pas la philosophie à plus tard parce qu'on est jeune, et qu'on ne se lasse pas de philosopher parce qu'on se trouve être vieux. Il n'est en effet, pour personne, ni trop tôt ni trop tard lorsqu'il s'agit d'assurer la santé de l'âme. Or celui qui dit que le moment de philosopher n'est pas encore venu, ou que ce moment est passé, est semblable à celui qui dit, s'agissant du bonheur, que le moment n'est pas encore venu ou qu'il est passé. Par conséquent, doivent philosopher aussi bien le jeune que le vieillard, celui-ci afin qu'en vieillissant il reste jeune sous l'effet des biens, par la gratitude qu'il éprouve à l'égard des événements passés, et celui-là, afin que, tout jeune qu'il soit, il soit aussi un ancien par son absence de crainte devant ce qui va arriver. Il faut donc consacrer ses soins à ce qui produit le bonheur, tant il est vrai que, lorsqu'il est présent, nous avons tout, et que, lorsqu'il est absent, nous faisons tout pour l'avoir.

 

Les recommandations que je t'adresse continuellement, mets-les en pratique et fais-en l'objet de tes soins, reconnaissant en elles distinctement les éléments du bien vivre.

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

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Ni trop vieux, ni trop jeune

 

Accoutume-toi à considérer que la mort n'est rien pour nous, puisque tout bien et tout mal sont contenus dans la sensation ; or la mort est privation de sensation. Par suite, la sûre connaissance que la mort n'est rien pour nous fait que le caractère mortel de la vie est source de jouissance, non pas en ajoutant à la vie un temps illimité, mais au contraire en la débarrassant du regret de ne pas être immortel. En effet, il n'y a rien de terrifiant dans le fait de vivre pour qui a réellement saisi qu'il n'y a rien de terrifiant dans le fait de ne pas vivre. Aussi parle-t-il pour ne rien dire, celui qui dit craindre la mort, non pour la douleur qu'il éprouvera en sa présence, mais pour la douleur qu'il éprouve parce qu'elle doit arriver un jour ; car ce dont la présence ne nous gêne pas ne suscite qu'une douleur sans fondement quand on s'y attend. Ainsi, le plus effroyable des maux, la mort, n'est rien pour nous, étant donné, précisément, que quand nous sommes, la mort n'est pas présente ; et que, quand la mort est présente, alors nous ne sommes pas. Elle n'est donc ni pour les vivants ni pour ceux qui sont morts, étant donné, précisément, qu'elle n'est rien pour les premiers et que les seconds ne sont plus.

 

Mais la plupart des hommes, tantôt fuient la mort comme si elle était le plus grand des maux, tantôt la choisissent comme une manière de se délivrer des maux de la vie. Le sage, pour sa part, ne rejette pas la vie et il ne craint pas non plus de ne pas vivre, car vivre ne l'accable pas et il ne juge pas non plus que ne pas vivre soit un mal. Et de même qu'il ne choisit nullement la nourriture la plus abondante mais la plus agréable, il ne cherche pas non plus à jouir du moment le plus long, mais du plus agréable.

 

Quant à celui qui recommande au jeune homme de bien vivre et au vieillard de bien achever de vivre, il est stupide, non seulement si l'on tient compte des satisfactions que la vie procure, mais aussi parce que c'est par un seul et même soin que l'on parvient à bien vivre et à bien mourir. Et il est encore bien pire, celui qui dit que c'est une belle chose que de ne pas être né, et une fois né de franchir au plus vite les portes de l'Hadès [les enfers]. En effet, s'il est convaincu de ce qu'il affirme ainsi, comment se fait-il qu'il ne quitte pas la vie ? De fait, c'est à sa portée, pourvu qu'il y soit fermement déterminé.

 

En revanche, si c'est une plaisanterie de sa part, il parle pour ne rien dire sur des questions qui ne l'admettent pas.

 

Il faut en outre garder en mémoire que ce qui va arriver n'est pas en tout point sous notre gouverne, et qu'il n'y échappe pas non plus en tout point, afin que nous ne l'attendions pas comme s'il devait infailliblement se produire, et que nous ne nourrissions pas non plus l'espoir qu'il ne se produise absolument pas.

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

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Désirs et bonheur

 

Il faut en outre établir par analogie que, parmi les désirs, les uns sont naturels, les autres sans fondement et que, parmi ceux qui sont naturels, les uns sont nécessaires et les autres naturels seulement. Parmi ceux qui sont nécessaires, les uns sont nécessaires au bonheur, d'autres à l'absence de dysfonctionnements dans le corps, et d'autres à la vie elle-même. En effet, une étude rigoureuse des désirs permet de rapporter tout choix et tout refus à la santé du corps et à l'absence de trouble dans l'âme, puisque c'est cela la fin de la vie bienheureuse. C'est en effet en vue de cela que nous faisons tout, afin de ne pas souffrir et de ne pas éprouver de craintes. Mais une fois que cet état s'est réalisé en nous, toute la tempête de l'âme se dissipe, le vivant n'ayant pas besoin de se mettre en marche vers quelque chose qui lui manquerait, ni à rechercher quelque autre chose, grâce à laquelle le bien de l'âme et du corps trouverait conjointement sa plénitude. C'est en effet quand nous souffrons de l'absence du plaisir que nous avons besoin du plaisir ; mais, quand nous ne souffrons pas, nous n'avons plus besoin du plaisir. Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est principe et fin de la vie bienheureuse. Nous savons en effet qu'il est un bien premier et apparenté, et c'est en partant de lui que nous commençons, en toute circonstance, à choisir et à refuser, et c'est à lui que nous aboutissons, parce que nous discernons tout bien en nous servant de l'affection [ce que l’on éprouve] comme d'une règle.

 

En outre, puisqu'il est notre bien premier et connaturel [attaché à notre constitution naturelle], pour cette raison nous ne choisissons pas non plus tout plaisir. En réalité, il nous arrive de laisser de côté de nombreux plaisirs, quand il s'ensuit, pour nous, plus de désagrément. Et nous considérons que beaucoup de souffrances l'emportent sur des plaisirs, chaque fois que, pour nous, un plaisir plus grand vient à la suite des souffrances que l'on a longtemps endurées. Ainsi, tout plaisir, parce qu'il a une nature qui nous est appropriée, est un bien, et pourtant tout plaisir n'est pas à choisir. De même encore, toute souffrance est un mal, mais toute souffrance n'est pas toujours par nature à refuser. C'est toutefois par la mesure comparative et l'examen de ce qui est utile et de ce qui est dommageable qu'il convient de discerner tous ces états, car, selon les moments, nous usons du bien comme d'un mal ou, à l'inverse, du mal comme d'un bien.

 

Par ailleurs, nous considérons l'autosuffisance elle aussi comme un grand bien, non pas dans l'idée de faire avec peu en toutes circonstances, mais afin que, dans le cas où nous n'avons pas beaucoup, nous nous contentions de peu, parce que nous sommes légitimement convaincus que ceux qui ont le moins besoin de l'abondance sont ceux qui en tirent le plus de jouissance, et que tout ce qui est naturel est facile à acquérir, alors qu'il est difficile d'accéder à ce qui est sans fondement. Car les saveurs simples apportent un plaisir égal à un régime d'abondance quand on a supprimé toute la souffrance qui résulte du manque, et du pain et de l'eau procurent le plaisir le plus élevé, lorsqu'on s'en procure alors qu'on en manque. Donc, s'accoutumer aux régimes simples et non abondants assure la plénitude de la santé, rend l'homme actif dans les occupations nécessaires à la conduite de la vie, nous met dans de plus fortes dispositions quand nous allons, par moments, vers l'abondance, et nous prépare à être sans crainte devant les aléas de la fortune.

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

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Prudence, sobriété et bien-être

Quand donc nous disons que le plaisir est la fin, nous ne parlons pas des plaisirs des débauchés ni de ceux qui consistent dans les jouissances — comme le croient certains qui, ignorant de quoi nous parlons, sont en désaccord avec nos propos ou les prennent dans un sens qu'ils n'ont pas —, mais du fait, pour le corps, de ne pas souffrir et, pour l'âme, de ne pas être troublée. En effet, ce n'est ni l'incessante succession des beuveries et des parties de plaisir, ni les jouissances que l'on trouve auprès des jeunes garçons et des femmes, ni celles que procurent les poissons et tous les autres mets qu'offre une table abondante, qui rendent la vie agréable : c'est un raisonnement sobre, qui recherche la connaissance exacte des raisons de tout choix et de tout refus, et qui rejette les opinions à partir desquelles une extrême confusion s'empare des âmes.

 

Or le principe de tout cela et le plus grand bien, c'est la prudence [raisonnement juste et sobre]. C'est pourquoi la prudence est plus respectable encore que la philosophie, car elle entraîne naturellement tout le reste des vertus, enseignant qu'il n'est pas possible de mener une vie agréable, qui ne soit pas prudente, belle et juste, pas plus que la vie ne peut être prudente, belle et juste si elle n'est pas agréable. Car les vertus sont naturellement liées à la vie agréable et la vie agréable en est inséparable.

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

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Ainsi, fais de ces choses et de celles qui s'y apparentent l'objet de tes soins, jour et nuit, pour toi-même et pour qui t'est semblable, et jamais, ni éveillé, ni en songe, tu ne connaîtras de trouble profond, mais tu vivras comme un dieu parmi les hommes.

Épicure, Lettre à Ménécée, GF Flammarion.

ÉPICURE, LE BIEN VIVRE

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9 août 2015 7 09 /08 /août /2015 07:34
DÉMOCRATIE OU OSTRACISME ?

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DÉMOCRATIE OU OSTRACISME ?

 

 

Une nouvelle éthique politique pour une citoyenneté constructive

 

 

La politique n'est plus une négociation entre un passé glorieux et un présent difficile, mais un jeu dialectique entre un présent analysé et un futur esquissé, débattu et voulu.

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Ce qui pèse le plus lourd, c’est le mépris. Ce qui compte le plus, c’est la dignité ressentie et reconnue. Il n’y a pas de démocratie quand le système social fait que l’individu est soit un gagnant, soit un soumis, soit un révolté.

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Est-ce être libre d'être obsédé par la faim, la maladie ou la mort ? Est-ce être libre que de devoir chercher jour après jour du travail ? Est-ce être vraiment libre que d'être le témoin impuissant d'une violation des droits de l'homme ?

Il n'y aura de vraie liberté que quand tous les hommes seront libres. Et s'ils sont libres, ils seront égaux et solidaires.

DÉMOCRATIE OU OSTRACISME ?

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Liberté, responsabilité

La liberté n'est pas la faculté de faire n'importe quoi car il n'y a point de liberté sans responsabilité ; car le degré ultime de la liberté est la responsabilité.

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La démocratie à laquelle nous tenons est celle où chacun respecte l'autre. Où chaque parti sait qu'il partage avec les autres la responsabilité de la vie collective. Où la majorité sait qu'elle est transitoire, comme l'opposition. Où, s'acceptant l'une l'autre, majorité et opposition savent qu'elles sont coresponsables dans le temps de la collectivité nationale.

La démocratie refuse l'outrance et l'ostracisme politique, social, religieux, ou ethnique.

Les valeurs ?

Nous ne savons sans doute pas apprécier comme il convient la liberté dont nous jouissons. Elle fait partie de nous. Nous sommes tentés de croire que rien ne la menace. Or, tant à l'échelle de l'histoire qu'à celle de la planète, la liberté est un bien rare.

Croire en la République et la démocratie ce n'est pas seulement savoir jouir de sa liberté sans en abuser, c'est aussi être prêt à combattre pour la défendre et à faire effort pour que le plus grand nombre y ait accès à travers le monde.

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Quels sont, sur le long terme, les domaines où une volonté politique peut changer les choses ?

Quels sont les choix et les lois qui peuvent modeler notre société ?

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Le phénomène préfasciste en France est autant antiétatique qu'il est raciste.

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Battons-nous pour la pratique démocratique mais sachons qu'il y a des débats qui ne peuvent pas ne pas demeurer opaques. Pourquoi ne pas le dire au lieu de faire des contorsions ?

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Les valeurs, ce n'est pas assez : il faut dire le quoi et le comment des choses. Le propre du discours prophétique, c'est que le verbe s'est fait chair.

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Nous allons, insensiblement, vers de nouvelles définitions de la Loi et du droit : une Loi plus hautaine qui demande moins de textes d'application, un droit qui se fait dans la multitude des contrats que la Loi encadre et arbitre.

Mais cela constitue une nouvelle conception juridique, sociale, administrative, culturelle, politique.

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La morale se situe en amont de tout contrat, de toute politique, de toute décision. Elle qualifie l'acteur ou le... disqualifie.

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Dans la société moderne, instrumentalisée, le sens est sacrifié au moyen. Y compris dans le discours politique et l'éducation.

DÉMOCRATIE OU OSTRACISME ?

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  Politique et médiatisation

L'un des effets pernicieux de la médiatisation de la vie politique c'est qu'elle privilégie l'instant, l'événement, la pulsion. Sans y être insensibles, il nous faut réintroduire la durée, le sens du temps, du long terme. Il y va de notre avenir. Cela suppose une stratégie.

En dépit des sollicitations, un président doit avoir une stratégie qui embrasse le quinquennat et le dépasse.

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Au moment où il sera possible de traiter du problème des médias, peut-être vaudra-t-il mieux ne pas opposer secteur public et secteur privé, mais s'interroger sur la nature du service public de l'information, tous les secteurs étant concernés.

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Dire si l'objectif du politique est la conquête du pouvoir ou le bien public ; la conquête du pouvoir pour une autre éthique.

Nous sentons bien qu'il se passe beaucoup de choses partout, autour de nous, en nous. Et comme nous ne comprenons pas encore ce qui se passe, nous avons peur et nous nous replions au lieu de chercher, d'espérer, de communiquer, d'évoluer ; d'accomplir avant de recommencer.

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Le débat politique a de plus en plus tendance à se concentrer sur des questions qui préoccupent peu les Français.

Peu leur importent les jeux de la politique, de la bureaucratie et de la finance. Ils veulent qu'on leur parle du drapeau, de la liberté, aussi bien que du boulot et du panier de la ménagère.

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Le rôle de l'identité professionnelle dans la construction de l'identité personnelle tend à décliner. Cela appelle l'existence d'une identité locale. C'est dans cette perspective qu'il faut placer la question du vote des immigrés, mais d'abord celle de l'organisation de la vie locale qui n'est pas qu'institutionnelle.

 

DÉMOCRATIE OU OSTRACISME ?

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Être bien dans sa tête

Le rôle du politique : « faire que les gens se posent bien les questions dans leur tête ».

Rôle d'information et de prise de conscience,

rôle de débat démocratique,

création de déséquilibres dynamiques,

rôle catalytique.

Le reste nous sera largement donné de surcroît.

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La médiation c'est l'intelligence du vivre, du travailler ensemble, du construire ensemble en tirant avantage de tous les savoirs et de toutes les sensibilités.

Edgar Pisani, Croire pour vivre. Méditations politiques

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8 août 2015 6 08 /08 /août /2015 07:35

REVELATION LOUIS XIV

Le Roi-Soleil et les Africains

 

In Magazine

CITIZEN K INTERNATIONAL

N° été 2015

(Vendu en kiosque

Prix 1€)

 

 

Magazine CITIZEN K International, été 2015
Magazine CITIZEN K International, été 2015

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